Chers confrères,
À plusieurs reprises, ces derniers temps, on nous a demandé des nouvelles de nos communautés et confrères au Congo. Aujourd’hui seulement sommes-nous en mesure de transmettre des nouvelles sûres qui nous permettent de dire que nos confrères sont en bonne santé et beaucoup plus sereins qu’à la même époque, l’année dernière. Sans entrer dans les détails de la situation générale au Congo, que vous connaissez déjà à travers M.C.S., je me limiterai à la situation de nos confrères et de leurs missions, sur la foi d’un témoignage direct.
Kisangani a connu trois jours de guerre (4, 5 et 6 août). Celle-ci, très dure, s’est presque entièrement déroulée autour du nouvel aéroport et du dépôt de pétrole à St-Gabriel. Elle opposait les rebelles et les soldats du gouvernement Kabila. Ces derniers ont vaincu la rébellion. Des prêtres diocésains ont offert d’aider les blessés et d’ensevelir les morts, mais aucun n’a reçu la permission d’approcher du champ de bataille. On ne connaît pas le nombre de blessés ni de morts.
Plusieurs prêtres diocésains indiquent que dans la seule ville de Kisangani, où ont eu lieu plusieurs escarmouches, on peut compter environ 200 morts. Toutes les victimes sont des militaires, sauf quelques civils (une dizaine environ) tués par des éclats d’obus ou des balles perdues.
Aujourd’hui encore le nouvel aéroport est fermé à toute circulation. Seul l’ancien aéroport fonctionne, et pour des opérations militaires. Le service aérien régulier n’est pas encore rétabli.
Une grande partie de nos confrères étaient à Kisangani pour leur retraite annuelle avant le début de ces événements. Tous ceux de Basoko, le P. Mondry d’Opienge, le P. André Lutete d’Ibambi et le P. Jean-Claude Nkuka de Babonde sont encore à Kisangani.
À l’intérieur, seuls les PP. Broccardo et Lamieri sont demeurés à Mambasa, alors que le P. Maher est à Ibambi et le P. Jadowski à Babonde.
Il n’y a pas eu de pillage au cours de ces événements. Toutes nos maisons, et tous nos confrères ont été traités avec respect. On déplore seulement deux incidents, l’un impliquant des soldats ayant pénétré à Ste-Marthe, sur la Rive Gauche, pour vérifier si des Rwandais y étaient cachés, et l’autre le provincialat, la Maison Sacré-Coeur, où on s’est emparé de la phonie et du téléphone, pour les remettre après que le Fr. Selenke ait protesté et que le gouverneur soit intervenu.
On a fouillé quelques couvents de soeurs pour y chercher des Rwandais.
Mgr Monsengwo se trouve à Kisangani. Il est venu participer à la retraite des prêtres diocésains et pour les ordinations du 16 août.
Il est difficile, de loin, d’imaginer comment évoluera la situation. Nous pouvons néanmoins espérer pour le mieux. Vous pourrez certainement en apprendre davantage par M.C.S.
Nos confrères sont sereins, quoique attristés par ces événements qui font encore souffrir ce pays martyr. Bien qu’ils se réservent le droit de retourner dans leur propre pays, nos confrères ont à nouveau réitéré leur intention de rester sur place au service de l’Évangile et en solidarité avec le peuple congolais. Ils sont inquiets quant au respect des droits humains, car une “chasse” aux Rwandais semble se dessiner. Plusieurs sont préoccupés aussi pour l’unité du pays, clairement menacée selon eux par des intérêts inavoués.
Le Congo occupe une place spéciale dans nos coeurs et dans l’histoire de la Congrégation. Nous sommes tous touchés par ces événements, et voulons exprimer combien nous estimons et combien nous sommes proches et solidaires de nos confrères de la province ZA , de l’Église locale qui est née de nos efforts missionnaires et du peuple que nous admirons et aimons. Nous le faisons en priant le Sacré-Coeur de Jésus, source de réconciliation et de paix. Nous invoquons avec ferveur la protection de Notre-Dame du Rosaire, patronne de Kisangani, et du vénérable Père Fondateur, qui a tant aimé le Congo qu’il a toujours considéré comme la mission principale de toute la Congrégation.
Puisse notre espérance chrétienne être toujours plus forte que toutes ces épreuves; puisse le zèle missionnaire rester toujours vivant dans la Congrégation, en particulier chez nos jeunes.
Salutations cordiales dans le Coeur de Jésus,
P. Virginio Bressanelli, SCJ
supérieur général
P.S. Je profite de cette occasion pour vous informer du décès, le 17 août dernier, de Mme Maria Bettoni Panteghini, la mère du P. Panteghini. Les funérailles auront lieu dans sa ville natale, le 20 août 1998, en présence du P. Panteghini. L’adresse est: 25010, Bienno (Brescia), Italie.