**436.10** **AD ****B.21/7a.4** Ms autogr. 2 p. (21 x 13) LC 105 //Ribeauville ce 20 avril 1871// Mon bien cher ami, J'ai souffert, cela va sans dire de notre dispersion et de l'anxiété dans laquelle j'ai vécu tout cet hiver à cause de toutes mes pauvres brebis dispersées. Et maintenant je languis de me voir si longtemps hors de mon centre et j'avoue que si j'avais pu prévoir une si longue absence de Rome, je n'aurais pas eu le courage de m'en éloigner. Je suis comme un pauvre naufragé qui... voit le port et ne peut l'atteindre. Mon âme revivait en pensant qu'immédiatement après Pâques, je pourrais être à Sta-Chiara. Je comp­tais passer à Paris la semaine dernière et à la fin de celle-ci me trouver soit à Marseil­le, soit au pied du Mont-Cenis. J'ai besoin, avant de rentrer, de voir le P. Général. Lui-même a été arrêté sur sa route vers Paris par la nouvelle des désordres qui règnent dans la capitale. J'espère que sous peu la révolution y sera vaincue et qu'alors, après un très court séjour auprès de mon Supérieur, je pourrai revenir dans mon petit coin et me retrouver dans mon élément. Vous me parlez de MM. Bernard et Roserot. Quant au 1°, le P. Eschbach m'a écrit qu'il était parti pour Rome. J'ai moi-même écrit à l'abbé Roserot et j'attends sa réponse. Vous me parlez aussi de vous-même, mon cher ami, et me demandez conseil pour votre avenir. Eh bien! je suis à l'aise pour vous dire maintenant mon sentiment. Vous avez été à Nimes et vous avez vu par vous-même. Il y a plus: le bon abbé De­saire y est et a pu étudier le terrain. Ce que vous dites de lui et de vos propres impres­sions me fait croire que vous pouvez sans imprudence vous engager. Vous le savez, mon trés cher, je me défie des imaginations. Malgré votre calme apparent, votre ima­gination s'enflamme. Mon petit Desaire est ardent et (plein) d'enthousiasme. J'ai donc voulu vous éprouver tous les deux et savoir quel esprit vous inspire. Aujourd'hui que vous connaissez le terrain et que vous sentez encore les mêmes im­pulsions, je vous dirai avec confiance: oui, allez à Nîmes. Du reste il y a dans la bonne et chère congrégation de l'excellent Père d'Alzon un élément qui est certes un bon pronostic pour sa durée, c'est son grand amour pour le St-Siège, son attachement au roc de l'Eglise. Donc, mon cher ami, si vous sentez vo­tre impulsion pour l'Assomption de Nîmes, allez-y in suo tempore. Je vous y suivrai de ma bénédiction et de mon affection1. A Dieu, et s'il plaît à son infinie bonté, au revoir à bientôt. En attendant, je suis tout à vous dans les SS. Cœurs de Jésus et de Marie. Priez pour votre dévoué. En écrivant à vos parents, présentez-leur mes respects. M. Freyd 1 Tout ce paragraphe est reproduit en NHV IX, 63-64.