I. Lecture du saint Evangile (Luc, chap. II, 4-7).
4. Descendit autem et Joseph a Galilaea de civitate Nazareth, in Judaeam in civitatem David quae vocatur Bethléem, eo quod esset de domo et familia David,
5. Ut profiteretur cum Maria desponsata sibi, uxore praegnante.
6. Factum est autem cum essent ibi, impleti sunt dies, ut pareret.
7. Et peperit filium suum primogenitum et pannis eum involvit, et reclinavit eum in praesepio, quia non erat eis locus in diversorio.
4. Joseph partit de Nazareth, ville de Galilée, pour aller en Judée, à Bethléem, ville de David, parce qu'il était de la maison et de la famille de David;
5. Pour s'inscrire avec Marie son épouse, qui allait être mère.
6. Mais comme ils étaient là, le jour de l'enfantement arriva.
7. Et elle mit au monde son fils premier-né, et elle l'enveloppa de langes et le coucha dans une crèche, parce qu'il n'y avait pas de place à l'hôtellerie.
II. Sommaire. - Notre-Seigneur s'est fait pauvre pour nous enrichir de ses mérites et de sa grâce. Il voulait réparer tous nos péchés d'avarice, de sensualité et de vanité. - Il voulait aussi nous donner un moyen de préservation contre les tentations de la richesse, et une source de grâces et de mérites dans l'imitation de son détachement et de ses sacrifices. - Nous méditerons aussi sur les avantages de la pauvreté volontaire.
I. Lecture du saint Evangile.
II. Méditation.
Le disciple. - Bon Maître, expliquez-moi le mystère de votre crèche. Dites-moi pourquoi vous avez aimé la pauvreté. Les fils des rois naissent dans les palais, et vous êtes né dans une étable. Quel est donc le motif de cette préférence?
Le Sauveur. - N'étais-je pas venu pour réparer le péché, et pour vous donner l'exemple de la réparation? Une des sources les plus fécondes du péché, c'est la richesse, c'est l'abondance, ce sont les biens de ce monde. Les hommes s'attachent à ces biens au point d'oublier leur Créateur à qui ils les doivent. J'étais avide de privations pour réparer toutes vos cupidites. Je voulais pouvoir dire à mon Père: «Pour que vous pardonniez à mes frères l'abus qu'ils ont fait des richesses, je me prive de ces richesses qui devraient être toutes à mon service». C'était un dessein arrêté dans mon Cœur de vivre et de mourir pauvre, et je commençai à exécuter ce dessein dès ma naissance.
On eût pu croire que j'eusse mieux gagné les hommes par l'éclat de la puissance et de la richesse, mais mes vues sont différentes des vôtres. Je voulais réparer tous vos péchés d'avarice, de sensualité et de vanité.
Je voulais naître pauvre. Aussi voyez comme j'ai tout disposé dans ma providence. J'ai dirigé les événements de manière à naître à Bethléem, loin de la maison paternelle, et à un moment où il n'y aurait de place à l'hôtellerie que pour les riches.
J'ai choisi pour mon premier palais une étable; et pour mon lit, la crèche des animaux. Je reposais sur la paille. J'étais couvert de pauvres langes. C'est là que je voulais recevoir la première visite de mes meilleurs amis, les humbles travailleurs de la campagne.
Non seulement j'acceptais cette pauvreté réparatrice, mais je l'aimais. Saint Paul vous dit comment j'ai pris ma croix avec joie: proposito sibi gaudio, sustinuit crucem (Hebr. 12). J'aimais aussi la pauvreté et les incommodités de l'étable de Bethléem. Ma crèche faisait la joie de mon cœur d'enfant, parce qu'elle vous sauvait et vous rachetait.
Et la pauvreté n'est pas seulement une réparation, elle est encore un moyen de préservation, une source de mérites et de grâces.
Elle est un moyen de préservation contre les embûches et les tentations infinies de la richesse. L'apôtre vous dit que les riches tombent dans les filets du démon. Divites incidunt in laqueum diaboli (1 Tim). Le livre de l'Ecclésiastique vous a dit aussi les séductions de la vanité: Omnia subjacent vanitati (Eccli, 3).
Ceux qui ont l'esprit de pauvreté, c'est-à-dire ceux qui aiment une vie simple et modeste échappent à toutes ses séductions. C'est pour cela que je les ai proclamés bienheureux: Beati pauperes spiritu.
La pauvreté acceptée et aimée est encore une source de grâces et de mérites. C'est un sacrifice uni à mon sacrifice et il en partage toutes les fécondités. C'est une source de bénédictions pour vous-même. C'est aussi un moyen d'apostolat. C'est le salut pour les âmes que vous voulez secourir. L'apôtre saint Paul en faisait l'application quand il disait: j'offre tout ce que j'ai à souffrir pour le salut des âmes. Omnia sustineo propter electos ut et ipsi salutem consequantur (2 Tim. 2). Il parlait de la pauvreté aussi bien que des autres épreuves de sa vie.
La pauvreté facilite l'oraison et la contemplation. Elle délivre des sollicitudes du siècle et des affaires. Celui qui est occupé des biens temporels n'a pas de liberté pour s'élever jusqu'à moi. J'attends en vain à la porte de son cœur, il n'est jamais libre. Je l'ai dit dans la parabole du semeur: la bonne parole qui tombe en cette âme est semblable au bon grain qui tombe dans une terre couverte d'épines. Ces épines sont les sollicitudes temporelles.
Enfin, c'est en récompense du détachement et du sacrifice des biens terrestres que j'ai promis à mes apôtres une place de choix au ciel. Saint Pierre me demandait avec confiance quel serait le fruit de leur pauvreté: Ecce nos reliquimus omnia, qui d ergo erit nobis. Et je leur répondis: Vous aurez au ciel des trônes de rois et de juges. Sedebitis super sedes duodecim, Judicantes duodecim tribus Israël (Matth. 19). Pour tous ces motifs encore je goûtais et j'aimais la pauvreté dans mon cœur d'enfant. Je me réjouissais de me voir sur la paille de l'étable auprès d'humbles animaux. Je prévoyais les grâces infinies de préservation et de sainteté qui en résulteraient pour tous les imitateurs de mon esprit de pauvreté.
Aimez donc et adoptez l'esprit de pauvreté, source de tant de biens et de tant de grâces. Et si la grâce divine vous appelle à la pauvreté volontaire dans la vie religieuse, répondez généreusement à cet appel. Quittez tout comme ont fait mes apôtres et suivez-moi.
Si vous êtes du nombre de ces privilégiés, ne regardez pas en arrière. Ne perdez de vue ni le but, ni les motifs de votre sacrifice, ni le modèle à imiter. Contemplez ma crèche, et mon zèle pour la gloire de mon Père et mon amour pour les âmes et leur salut.
Gardez toujours la mesure de dépouillement que vous avez promise à Dieu. Observez la pauvreté en esprit et en vérité selon vos règles et constitutions. Y manquer, c'est encourir les malédictions qui frappent la rapine dans l'holocauste.
Les religieux tièdes se font illusion en s'attachant à leurs aises. Ils se flattent d'imiter ma pauvreté et ils ne pensent qu'à se ménager toutes sortes d'accommodements.
Attachez-vous à la vertu de pauvreté, elle sera la sauvegarde de votre vœu. Elle ne restera pas en deçà de vos obligations. Elle ira même au delà. Cette vertu féconde retranche tout le superflu. Elle ne cherche ni le plus commode, ni le plus nouveau, ni le plus agréable, parce qu'elle est avide de réparations, de grâces et d'apostolat.
J'aime les âmes qui, après m'avoir promis cette générosité, l'observent fidèlement. Je laissai voir à Marguerite-Marie des âmes religieuses qui souffraient beaucoup et longuement en purgatoire pour avoir eu trop d'attache à leurs aises.
L'âme religieuse qui observe délicatement la pauvreté attire les bénédictions divines sur sa communauté. Elle est laborieuse et soigneuse en tout. Elle a avec moi des rapports faciles dans l'oraison. Elle ressemble à Dieu, en dominant ce qui est terrestre. Elle me ressemble et communie à ma pauvreté. Elle coopère à mon œuvre de sanctification, œuvre de réconciliation et de paix.
Ne craignez pas. Je veille sur le pauvre, je prends soin de lui. Mon Cœur lui est tout dévoué. Vous ne manquerez pas du nécessaire ici-bas, j'y pourvoirai; et vous aurez ensuite les richesses du ciel.
Suivez-moi dans cette vie humble et pauvre qui a eu les préférences de mon Cœur et que j'ai choisie à Bethléem et continuée en Egypte, à Nazareth, dans ma vie publique et jusqu'au Calvaire.
En vous aimant, divin enfant, j'aime vos langes, votre étable, votre crèche. J'aime tout ce que vous aimez, tout ce que votre cœur d'enfant a choisi. J'aime votre vie humble et pauvre. Je veux l'imiter. Donnez-m'en la grâce. Désormais je serai fidèle à l'esprit de pauvreté et de détachement dans la mesure où je vous l'ai promis.
- Scitis gratiam Domini nostri Jesu Christi, quoniam propter vos egenus factus est, cum esset clives (2 Cor. VIII).
- Divites incidunt in laqueum diaboli (1 Tim).
- Posuerunt eum in praesepio. (S. Luc.).
- Habentes alimenta et quibus tegamur, his contenti erimus (1 Tim. 6).
- Vous savez la grâce que vous a faite Notre-Seigneur, de se faire pauvre pour vous, lui qui avait droit à toute richesse (2 Cor. VIII).
- Les riches ont bien des tentations (1 Tim).
- Ils le mirent dans une crèche (S. Luc).
- Si nous avons le vivre et le couvert, soyons contents (1 Tim. 6).