1865-lc

435.12

AD B.21 /7a.3

Ms autogr. 6 p. (21 x 13)

De Mr Boute

5 mai 65

Mon bien cher ami,

Votre lettre de Jérusalem m'a fait d'autant plus de plaisir que je commençais à éprouver de sérieuses inquiétudes à votre sujet. Sachant que vous deviez vous rendre en caravane de Suez à Jérusalem, je ne rêvais que bédouins et embuscades de voleurs. Votre mère, que je venais de quitter, quand j'ai reçu votre lettre, était encore plus ef­frayée que moi, et je me gardai bien de lui faire part de mes craintes. Mais enfin, vous avez échappé aux arabes du désert, que Dieu en soit béni. Je vous suppose, à l'heure qu'il est, en Asie Mineure dont vous visitez les principales localités si riches en souve­nirs. J'espère que ma lettre arrivera à temps à Constantinople pour vous y trouver. Ce long voyage doit bien vous fatiguer et je conçois aisément que vous vous sentiez pris du désir de revoir votre pays natal. Les traces de la fatigue, et par suite de la mai­greur, sont empreintes sur vos traits, si je dois en juger par votre photographie que vous m'avez envoyée, et dont je vous remercie. Je suis convaincu que votre mère par­tage mon avis. Voyez donc vite Constantinople, le midi de l'Italie même s'il le faut; mais revenez- nous bientôt, en juillet au plus tard. Venez calmer les inquiétudes ma­ternelles et faire cesser des impatiences bien légitimes. J'ai laissé vos parents en par­faite santé, sauf votre mère qui souffre toujours un peu; la cause du mal, c'est votre absence, ou plutôt la crainte que vous ne soyez exposé à quelque danger.

Siméon vous aura sans doute fait part de la mort de son frère julien, décédé au Me­xique, à l'ambulance; la dysenterie l'a emporté, pauvre jeune homme qui espérait un si bel avenir1. C'est en arrivant à La Capelle, le mardi de Pâques, que votre père, à qui Siméon venait d'écrire, m'apprit cette triste nouvelle. Nous nous gardâmes bien d'en parler à personne; Mr Longuet seul le sait2: que serait devenue votre mère, quel­les n'auraient point été ses frayeurs sur votre sort si quelque imprudence lui avait ré­vélé la vérité. Revenez donc vite, pour votre mère, pour vos parents, vos amis, et pour moi qui vous aime tant. - J'ai trouvé votre père bien disposé pour vos futurs projets, si vous y persistez toujours: il parle de Rome comme si vous y étiez déjà. Toute la famille pense de même, mais pense aussi avec raison qu'il est temps de vous livrer à vos nouvelles études pour arriver à temps3.

J'en viens maintenant à notre affaire, que j'aurais cru être le premier à vous annon­cer, mais Siméon m'a prévenu, et il a bien fait, s'il vous a raconté la chose avec exactitude4. Il faudrait écrire un livre pour exposer tous les faits. Je ne vous dirai donc que l'essentiel.

Mr Dehaene a été brutalement révoqué sans avis préalable, ni avis ministériel au rectorat écrit. Il avait vu le ministre au mois d'8bre dernier à Paris, et en avait été par­faitement reçu. Il avait été question, il est vrai des maisons de Gravelines et de Dun­kerque, mais le ministre avait autorisé Mr le Principal à conserver la propriété de ces établissements, en prenant l'engagement d'en abandonner la direction, ce que Mr le Principal avait déjà fait depuis longtemps. Il dormait donc sur ses deux oreilles, comme on dit, quand le 6 ou 7 mars dernier, on apprend, par suite d'une indiscrétion, que Mr Dehaene est remplacé par un certain Mr Pourtaultz prêtre aumônier à Lescar, près de Pau.

Le recteur est venu en personne, par ordre du ministre, pour installer le nouveau Principal, ce qui se fit en passant par chaque classe. Immédiatement après la classe de 10 h., nous demandâmes à être admis auprès du recteur et tous les prêtres et abbés, au nombre de 11, donnèrent leur démission. Le recteur nous harangua pour nous in­viter à revenir sur cette détermination de notre part; mais nous fûmes unanimes à la maintenir.

Au moment de nous retirer, le recteur me dit qu'il avait à me parler en particulier, et nous restâmes 3/4 d'h. en conférence. Il voulait m'amener à rester au collège en me promettant les plus grands avantages; je lui énonçai les motifs qui ne pouvaient, permettre à aucun prêtre d'occuper une telle position: que ce serait se mettre au pilori de l'opinion publique et du clergé. Il n'en persista pas moins, dans deux autres confé­rences subséquentes, à me poursuivre de ses sophismes; mais je demeurai inébranla­ble; néanmoins nous consentîmes à continuer de faire la classe jusqu'à ce qu'il eût pourvu à notre remplacement; ce qui dura encore trois jours.

Nous sortîmes tous ensuite du collège, sauf les professeurs laïcs, pour nous retirer aux Capucins, dont l'établissement était à notre disposition, attendu que le dernier venait de partir peu de temps auparavant. Les familles retirèrent aussitôt leurs en­fants qui nous étaient confiés; il n'en resta que douze à 14, tous fils de fonctionnai­res. L'administration comptait beaucoup sur la rentrée de Pâques; mais le nombre est resté le même. Ainsi de 145 pensionnaires que nous avions, le collège est réduit à 15 pensionnaires à l'heure qu'il est.

Le nouveau Principal voit très bien maintenant que la position n'est pas tenable pour lui, malgré l'appui du ministre, les efforts de l'administration locale, malgré la propagande de quelques professeurs laïcs qui n'aboutit à rien; la confiance n'est plus là, elle nous a suivis avec la sympathie du pays tout entier et du clergé. Le bruit court en ce moment que Mr Pourtaultz a demandé son changement et sera remplacé par un principal laïc, on parle de Mr Thooris comme nouveau principal. Le fameux Baye Benjamin est nommé professeur de seconde au collège d'Hazebrouck et fait la 8° et la 7° faute d'élèves en seconde; cette dernière classe avec la rhétorique compte 3 élèves. Voilà donc un collège tombé; quand et comment se relèvera-t-il? Dieu seul le sait. Quant à moi, je suis d'avis quil a reçu le coup mortel. Voyez si la position est tenable pour Mr Pourtaultz, qui n'a pas le pouvoir de confesser même ses élèves. Il m'a dit lui-même l'accueil que Mgr l'Archevêque lui avait fait. Il lui dit ces propres paroles: «Puisque M. Duruy n'a pas confiance en mon prêtre, moi, je n'ai nulle confiance au sien». Il n'entre plus un seul prêtre au collège…

Maintenant, si vous désirez savoir ce que nous nous proposons de faire, je vous di­rai que nous avons l'intention d'ouvrir ici, dans l'établissement dit des Capucins, une maison libre; nos pièces ont été déposées le 28 avril dernier; si au bout du mois exigé par la loi, c.a.d. le 20 mai, on ne fait pas opposition, nous ouvrons; mais nous som­mes presque certains que le ministre en fera, malgré l'évidence de la loi; le conseil académique, dont nous pensons avoir la majorité, aura à juger le conflit. Le ministre en appellera peut-être au conseil supérieur de l'instruction publique, au conseil d'état peut-être encore, nous le suivrons sur ce terrain, forts de notre droit et des sympa­thies du pays, si calme autrefois et si agité aujourd'hui par cette affaire. On prie beaucoup pour nous; priez aussi, je vous en conjure; j'ai dit pour nous, je devrais dire pour notre œuvre, car nos personnes n'ont rien à voir en cela; nous savons les déga­ger de tout intérêt et de tout amour propre, pour ne considérer que la continuation de notre œuvre.

Une bonne partie de nos élèves pensionnaires est allée au petit séminaire, que Mgr a bien voulu mettre à notre disposition: une trentaine à Dunkerque et une trentaine a Gravelines, en attendant que nous puissions ouvrir. Mr Lacroix est allé à Gravelines, Mr Gantier à Dunkerque; nous restons 5 prêtres ici: Mr le Principal, Mr Debussche­re aine, Mr Hebant que vous ne connaissez pas, et votre ami5. Mais Mr Dekeister, me direz-vous, vous l'oubliez: Mr Dekeister est nommé curé de Vieux-Berquin, pa­roisse a 2 vicaires, à 2 lieues d'Hazebrouck, près de la station de Strazcelle (? ).

Mr Dehaene a été nommé chanoine honoraire, en réponse à la révocation de Mr le ministre. - Je fais la classe de rhétorique tous les matins chez Mr Bieswal, pour son fils et un de ses camarades, puis je fais la huitième pour son autre fils plus jeune. Vous voyez que l'occupation ne me manque pas et que je n'ai pas le loisir de m'en­nuyer. A votre retour qu'il me serait agréable de vous recevoir dans notre charmante retraite! Quel vaste et beau jardin que vous verriez! Allons, venez vite. Mr Dehaene vous invite aussi à venir; nous causerons tous ensemble; puis j'irai vous reconduire à La Capelle pour faire le pèlerinage de Liesse promis à votre mère pour les vacances.

Le papier faisant défaut juste au moment où je n'ai plus rien à vous dire, je vous serre la main et vous embrasse de tout cœur. Merci pour votre bonne lettre. Ecrivez­moi encore avant votre retour.

Votre ami

Boute Ptre

1 Cf LC 11 (note 5).

2 Mr Longuet, époux de Juliette-Augustine Vandelet et donc beau-frère de madame Dehon et oncle maternel par alliance de Léon.

3 Sur ce problème de la vocation de Léon cf NHV I, 31r°; II, 70r°.

4 La révocation de Mr Dehaene dont il est question en LD 21 (note 4). Sur toute cette affaire et son arrière-plan politique cf Lemire: «L'abbé Dehaene et la Flandre», chap. XI: La révocation de Mr De­haene - 1865 pp. 271-304; et en NHV I, 14v°.

5 Le 5°, selon Lemire o.c. p. 347, était Mr Baron.

158.01

AD B.21/6.12.1

Ms autogr. 2 p. (21 x 13)

De Mr Demiselle

Soissons 12 juin 1865

Mon bien cher Mr Léon,

Je suis très heureux de savoir de vos nouvelles et surtout d'apprendre que vous al­lez nous arriver. Je compte sur vous à Soissons pour quelques jours. Vous vous repo­serez chez moi avant d'aller vous jeter dans les bras de vos chers parents.

J'arrive de Rome, il y a quinze jours. Je m'y suis mis au courant des Etudes théolo­giques en suivant moi-même quelques cours et en parcourant avec soin les notes et cahiers des professeurs. Ma conviction est que nous ne sommes en France que des pygmées en comparaison des hommes qui enseignent â Rome. Quel enseignement! quelle ampleur et quelle profondeur! Il est vraiment digne de cette Eglise Romaine, la mère et la maîtresse de toutes les Eglises.

Je vous adresse en toute confiance pour vous introduire aux cours du Collège Ro­main a un étudiant des Ardennes, ancien suppléant du juge de Paix de son canton, Mr l'abbé Lecomte, diacre, demeurant Piazza Margana aux pieds (sic!) du Capitole. J'ai lié avec lui pendant mon séjour à Rome; avec lui j'ai suivi quelques cours. Il est parfaitement en état de vous mettre parfaitement au courant des Etudes Romaines. Je le répète, nous ne sommes en France que des Pygmées en comparaison de Rome.

J'ai besoin de vous répéter aussi que je compte sur quelques jours â votre passage â Soissons. Vous m'écrirez un mot quelques jours à l'avance. Ma sœur se fait une fête de vous recevoir. C'est alors que nous causerons de votre voyage en détail.

En attendant ce plaisir, je suis, mon cher Mr Léon, de tout cœur et d'âme tout à vous.

Demiselle

Piazza Margana, 24, primo piano. Suivre la rue qui va de l'église du Gesù au Capi­tole, prendre à droite avant d'arriver à la montée.

435.13

AD B.21 /7a.3

Ms autogr. 4 p. (21 x 13)

De Mr Boute

Hazebrouck 6 août 65

Mon bien cher ami,

Le temps m'a fait défaut jusqu'ici pour répondre à votre lettre du 25 juillet, et me manque encore pour écrire longuement. Vos parents ont reçu la circulaire concer­nant l'ouverture de notre nouvel établissement au mois d'octobre prochain1. On nous promet au moins pour commencer une centaine de pensionnaires. Vous ne sau­riez vous imaginer que d'efforts nous avons dû faire, que de ressorts nous avons dû faire jouer pour arriver à cet heureux résultat. Le ministre enfin s'est contenté de sa défaite à Lille en conseil départemental (autrefois académique); il n'a pas jugé à pro­pos d'en appeler de ce jugement; on nous a assuré, de très bonne source, qu'il aurait été également battu au conseil supérieur de l'instruction publique. Mais nous som­mes heureux de savoir enfin qu'il n'a pas cru devoir interjeter appel dans le délai pre­scrit par la loi de 18502; ce qui aurait pu reporter le débat à six mois.

Notre affaire a fait beaucoup de bruit; à Paris même on en parlait dans les salons; un de nos députés en a entretenu aussi l'impératrice pendant sa régence, laquelle ré­pondit: «Nous ne savions rien de tout cela». Vous comprenez dés lors pourquoi Mr Duruy a jugé prudent de battre en retraite. Nous savons de plus très positivement qu'il eût suffi à Mr Dehaene de faire la plus petite demande pour être réintégré au collège, et elle aurait été accueillie avec empressement; un inspecteur général est mê­me venu chez nous pour sonder le terrain, mais nous préférons jouir de la position li­bre que nous avons conquise, ouvrir à nos risques et périls, mais vivre avec indépen­dance. Le but que nous voulons atteindre est de fonder une œuvre permanente, pro­fitable à la ville et au pays, et qui ne dépende plus d'une personne, ou d'un caprice. - C'est le 15 juillet au soir qu'a expiré le délai de l'appel; nous savions, d'après nos ren­seignements, qu'il n'aurait pas lieu, mais néanmoins, nous avons toujours été, jusqu'à l'expiration de ce jour, dans la plus grande inquiétude à ce sujet. Ce n'est que le 15 au soir que nous avons respiré à pleins poumons. Nous nous sommes occupés alors des moyens d'approprier à sa nouvelle destination le vaste établissement des ca­pucins que nous occupons et que vous connaissez; nous allons l'exhausser d'un étage, et demain lundi, les ouvriers vont se mettre à l'œuvre, de manière que la partie la plus nécessaire soit terminée pour la rentrée. Vous voyez que je vais être encore très occupé, et que si je vais vous voir (je ne sais encore à quelle époque), ce ne sera que pour un jour ou deux. J'ai eu une peine extrême à trouver un entrepreneur, par suite de l'extrême rareté des ouvriers; on me répondait partout: «J'ai déjà une foule d'en­treprises et je ne puis trouver d'ouvriers: Armentières, Roubaix et Lille les absorbent tous». Jugez de mon embarras; enfin j'ai trouvé ce que je voulais, et comme je vous l'ai dit, nous commençons demain. Mais vous qui avez maintenant tout le temps, ve­nez donc nous voir; venez passer quelques jours dans notre retraite où vous respire­rez aussi bien que chez vous l'air pur de la campagne. Allons faites un pas pour vos anciens amis, vous à qui il ne coûte rien de courir au bout de monde; vous ne pouvez douter de l'accueil qui vous sera fait. Notre vie est, comme notre régime, toujours la même. M. le Principal se joint à moi pour vous inviter, et nous irons voir Mr Dekei­ster dans sa cure à 2 vicaires, à 2 lieues d'Hazebrouck, sur le chemin de fer: c'est Vieux Berquin. Nous causerons tout à l'aise de vos projets que Mr le Principal et moi approuvons de tout cœur. Mais nous sommes d'avis qu'il faut commencer, dès cette année, à en préparer la réalisation, en vous rendant à Rome.

Votre bonne mère est donc heureuse de vous voir près d'elle; elle n'a donc plus au­cune inquiétude à concevoir sur un fils qui lui est si cher. Compensez par vos tendres­ses les longs soucis, les noirs pressentiments que vous lui avez causés par une si lon­gue absence. Dites-lui bien que le n'ai point oublié le pèlerinage de N.D. de Liesse, et que, malgré mes occupations, je ne désespère point le réaliser avec elle et vous. Le temps dépendra pour moi de notre retraite qui n'est pas encore fixée. La ferons-nous ici? Irons-nous à Cambrai? C'est un point encore indécis.

Vous m'écrirez du reste au sujet des couches de Laure que je suis heureux d'ap­prendre qu'elle va aussi (bien) que peut le comporter sa position2. Dites lui bien de ma part que je ne l'oublierai point d'ici à ce moment; qu'elle ait confiance en Dieu et à la Ste Vierge, et qu'elle fasse une bonne communion quelques jours avant le mo­ment attendu, et qu'elle n'ait aucune crainte. Embrassez Henri et vos bons parents pour moi. Mes compliments à Adeline4.

Tout à vous

Boute Ptre (prêtre)

Vous savez, je crois, que Mr Dehaene est chanoine honoraire de notre métropole.

1 L'institution St François d'Assise, ouverte par Mr Dehaene à Hazebrouck après sa révocation du col­lège communal (cf LC 12).

2 La loi Falloux sur la liberté de l'enseignement secondaire, du 15 mars 1850.

3 Laure, femme d'Henri Dehon, accouchera le 17 août de Marthe-Marie-Louise, baptisée le 21 sep­tembre par Mr Boute, avec Léon comme parrain.

4 Adeline: il s'agit très probablement de Marie-Joseph-Adèle Jouniaux (veuve Debouzy), née en 1810 à Wignehies, l'ancienne paroisse de Mr Boute. Elle fut longtemps domestique dans la famille Dehon. C'est par son entremise que les fils Dehon avaient été mis en pension à Hazebrouck où Mr Boute était professeur (cf NHV I, 5v° /6r° et 13r°). Elle mourut le 1 ° décembre 1887 (cf NQ IV, 5v° 3 dé­cembre 1887).

158.02

AD B.17/6.12.2

Ms autogr. 2 p. (21 x 13)

De Mr Demiselle

Soissons 25 7bre 1865

Mon cher Monsieur Léon,

Monseigneur ne sera de retour que vers le 6 ou 7 octobre.

Quant à moi, je ne puis disposer à mon gré de mes mouvements. Mon voyage à Rome a presque épuisé mes vacances canoniales. Mais surtout je suis obligé de laisser à mes confrères la faculté de prendre les leurs, et par conséquent, de résider en leur absence; ce qui fait qu'en ce moment, je ne pourrai pas m'absenter sans nuire au bon ordre du service et des offices. Je crois qu'il faut que j'y renonce. Je ferai ma semaine du 15 au 22. D'ici là, j'ai à prêcher dans les environs. Ce qui me console, c'est que je serai partaitement libre pour vous recevoir et vous faire voir la ville et les environs de Soissons. Soit que vous veniez avant le 15, jour fixé pour votre départ de La Capelle, soit que vous nous arriviez ce jour-là pour partir d'ici à Paris d'une manière définiti­ve. Ma soeur me charge de vous dire qu'elle sera très heureuse de vous posséder ici quelques jours.

Mr l'abbé Lecomte n'a pas été ordonné lundi dernier, comme il le pensait, le cardi­nal de Reims étant absent1. J'attends de lui une lettre qui me donne avis de l'époque ultérieure de son ordination, qui doit avoir lieu avant son retour à Rome.

Mes compliments affectueux et félicitations à Mr et Mme Henri. Hommages respec­tueux à la bonne maman Dehon. Pour vous et Mr et Mme Jules, l'expression de mes meilleurs sentiments2.

Demiselle

Soyez assez bon pour transmettre à Mr et Mme Vandelet de Sommeron(?) mes compliments respectueux autant qu'affectueux. Dites aussi à Gustave Fievet de venir passer quelques jours avec moi en retournant à Paris. Ces visites me dédommage­raient un peu de celles que je voudrais et que je ne peux pas faire.

1 Cf LC 13.

2 Mr et Mme Henri Dehon; Mr et Mme Jules: les parents de Léon (son père, Jules-Alexandre).

3 Les Vandelet (de Sommeron?): cf LD 18 note 8: village à 2 km de La Capelle.

4 Sans doute un fils Fiévet, la famille amie des Dehon à La Capelle; cf LD 11, 14, etc…

436.01

AD B.21/7a.4

Ms autogr. 2 p. (21 x 13)

Du P. Freyd

Rome le 3 8bre 1865

Mon bien cher Mr Dehon,

Je viens pour votre entière tranquillité vous dire que Rome et les petits états du St-­Père restent toujours préservés du fléau. Rien ne sera donc changé à notre rentrée. Je vous engagerais seulement à prendre la voie de terre, Lyon Chambéry, Florence… car les bateaux qui viennent de Marseille font toujours une ennuyeuse et coûteuse quarantaine de 7 jours à Civita.

Si vous pouviez apporter deux paires de draps, ce serait bien et suffisant pour vous. Je vous apprends que vous trouverez chez nous 3 autres Messieurs de votre ca­tégorie, c.à. d. qui ont fait leur droit à Paris l'an dernier et étaient les dirigés de Mgr de Ségur: 2 sont de Lyon, le 3° de Chambéry1.

A bientôt donc, mon bon ami, comptez sur le plus paternel dévouement de votre serviteur et futur supérieur.

S. Sp. i. c. M.

1 Sur ces condisciples cf NHV IV, 143: celui de Chambéry est M. Perreau; de Lyon, sans doute M. De Rivoyre (de Roanne). Le P. Dehon cite encore M. Gilbert de Troyes comme «ayant étudié le droit à Paris avec lui» (IV, 147). Cf LD 32.

159.00

AD B.17/6.13

Ms autogr. 2 p. (21 x 13)

De W. de Mérode

(Cf LD 31 note 5)

7 8bre 1865

Voici, Monsieur, la lettre que vous désirez pour mon frère. Je suis désolé de ne pas vous avoir vu, quand vous avez passé à Trélon. J'espère être plus heureux une autre fois et que vous voudrez bien nous faire l'honneur de venir déjeuner ou dîner avec nous, à onze heures ou à 6 heures. Je réclame la même faveur quand vous passerez à Paris. Nous demeurons rue de Grenelle 87. J'espère bien aussi vous voir à Rome, où j'irai en novembre ou décembre. Veuillez agréer, Monsieur, l'assurance de mes senti­ments de haute considération.

W. de Mérode

Trélon, ce 7 8bre 1865.

435.14

AD B.21/7a.3

Ms autogr. 4 p. (21 x 13)

De Mr Boute

Hazebrouck 11 Xbre 1865

Mon bien cher ami,

Vous m'avez écrit de votre nouveau séjour au commencement de fibre, et nous voi­ci au 11 Xbre sans voir arriver ma réponse. Vous n'avez pas pensé assurément que je vous perdais de vue ou même que je voulusse vous négliger. Votre amitié a rejeté sur la besogne forcée qu'amène toujours un premier établissement un si long retard. Vous avez touché juste; mais ce qui n'a pu se présenter à votre esprit, c'est la pensée constante où j'étais chaque jour de vous répondre, quand soudain venait surgir un obstacle, une circonstance qui paralysait ma bonne volonté. Vous aurez peine à me croire, mais c'est la vérité, quand je vous affirmerai que depuis votre lettre, il ne s'est point écoulé une seule heure du jour, sans que ma pensée ne se portât vers vous, préoccupé que j'étais toujours de la nécessité où je me trouvais de remettre indéfini­ment. Je saute aujourd'hui à pieds joints sur la besogne pour vous écrire quelques li­gnes et surtout pour vous remercier de votre bonne lettre. Son éloquente simplicité m'a plu infiniment; de même qu'à ceux à qui je l'ai lue.

Vous voilà donc séminariste et heureux puisque vous vous trouvez enfin dans vo­tre élément et le milieu qui vous convient. Avec votre facilité de travail et votre appli­cation à l'étude, vous arriverez aisément, je crois, à parcourir le cercle des études phi­losophiques, telles qu'elles se font à Rome. Dans quatre années ou cinq au plus, vous nous reviendrez avec un bonnet de docteur en plus. Je désire vivre encore assez de temps pour vous voir débuter dans la carrière que vous venez d'embrasser. - Je ne suis point surpris de l'émotion de Mr votre père au moment de la séparation. Il est le seul de la famille qui conçoit encore, de temps à autre, quelque espoir de vous voir revenir sur votre décision; mais il se fera, ou plutôt il s'est déjà fait à cette pensée qu'il aura bientôt un fils dans le sacerdoce, et une fois le sacrifice accompli, il n'y pensera plus. Je trouve que vous avez bien fait de vous mette à la disposition de votre évêque; c'est la voie la plus simple et la plus selon Dieu. Suivez toujours ses inspirations et il saura vous conduire aux fins auxquelles il vous destine. L'homme a beau s'agiter, c'est toujours Dieu qui le mène.

J'ai appris avec bonheur que vous étiez très satisfait de votre nouvelle position et accoutumé dès le premier jour avec votre nouveau costume. C'est déjà une grande marque de vocation. J'ai vu avec peine la retraite, momentanée sans doute, de Mon­seigneur de Merode: mais il parait qu'il ne doit pas quitter Rome, et la connaissance que vous avez déjà faite de ce prélat ne peut que vous être bien avantageuse1.

Mr votre père est-il toujours dans l'intention d'aller vous voir aux fêtes de Pâques? Je le désire pour vous et pour lui-même; il serait enchanté des cérémonies qui se célè­brent à cette époque et retournerait chez lui plus catholique encore… Pour moi, j'at­tendrai pour faire mon voyage de Rome que nous soyons tout à fait casés. Nous som­mes bien établis, si vous voulez, mais il nous manque encore une foule de choses dont chaque jour nous révèle le besoin, et mille détails de toutes sortes appellent notre at­tention, je vous dirai que, outre ma classe, je suis chargé de l'économat, de la direc­tion des travaux et des appropriations qui continuent et en outre de la comptabilité: jugez si je suis occupé. Tout marche à souhait: nous avons 120 pensionnaires, c'est pour le moment tout ce que nous pouvons prendre; nous avons 70 externes: le même nombre qu'auparavant. L'autre collège végète et on n'en parle pas plus que s'il n'exi­stait pas. Nous sommes de plein exercice, et 15 professeurs. Tous les élèves sont très contents et nous espérons voir notre établissement s'accroître de plus en plus; nous y consacrons nos soins et notre dévouement. C'est une œuvre que nous voulons fon­der, mais une œuvre indépendante des personnes et qui subsiste après nous. Nous sommes cinq associés à l'œuvre et, en outre, nous avons Dunkerque et Gravelines dans notre association, bien que ces maisons s'administrent elles-mêmes et à part; mais si l'une avait besoin de l'autre, il est stipulé qu'elle doit en obtenir tous les se­cours possibles. Il arrive donc que, au lieu de songer à prendre ma retraite, me voici, pas la force des choses et les dispositions de la providence, appelé à renouveler ma jeunesse, comme l'aigle de l'Ecriture: sicut aquila quae renovat juventutem suam. Amen2.

Mr le Principal et Mr Lacroix particulièrement vous disent mille et mille choses ai­mables. Je sais tout l'intérêt qu'ils vous portent. - Quand vous écrirez chez vous, ce que vous faites sans doute souvent, mais trop peu encore au gré de vos parents, rappelez-moi à leur bon souvenir: ils recevront de la sorte de mes nouvelles par la voie de Rome. - Rien de nouveau à Hazebrouck, si ce n'est qu'on est en plein jubilé et que celui-ci marche très bien. Tout à vous; pensez à moi à vos moments de loisir.

Boute Ptre

1 Cf LD 31 (note 5) et 32 (note 4).

2 Il s'agit toujours du nouvel établissement S. François-Xavier (cf LC, 12, 14).

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