1869-lc

436.24

AD B.21/7a.3

Ms autogr. 4 p. (21 x 13)

De Mr Boute

Hazebrouck 21 janvier 1869

Mon bien cher abbé,

Je partage votre joie et celle de vos bons parents de votre promotion au sacerdoce. Je comprends aisément que votre cœur ait été inondé de ces joies ineffables que Dieu seul peut donner avec lui-même, par cette communication intime qu'il établit entre lui et le prêtre, son représentant sur la terre. Oh! comme vos parents ont dû être tou­chés de vous voir célébrer votre première messe et de communier de la main de leur enfant chéri. Voyez comme Dieu conduit toutes choses à ses fins! Qui eût dit, il y a 5 ou 6 ans, que votre famille vous eût accompagné à Rome, pour assister à votre ordi­nation et retremper leur foi dans le spectacle des grandes et saintes choses que l'on y rencontre à chaque pas? Oh! que je suis heureux d'apprendre de Monsieur votre père lui-même qu'il a communié des mains du St-Père, après avoir eu ce bonheur, quel­ques jours avant, des propres mains de son fils.

Que vous devez être reconnaissant à Dieu d'un tel résultat. Oh! oui, remerciez-le bien ensemble au st sacrifice de l'autel de vous avoir accordé pour vous et pour les vôtres une aussi insigne faveur. Que le bon Dieu est bon et généreux, et prodigue en toutes choses pour les siens. Monsieur votre père m'écrit, ce qui m'a touché au cœur, qu'il voit la main de Dieu à chaque pas de son voyage, que madame Jules ne se res­sent nullement des fatigues du voyage, ni des courses continuelles qu'elle a dû faire. Vous ne m'avez pas parlé de l'époque de leur départ, de sorte que le crains bien que ma lettre vous arrive lorsqu'ils vous autont quitté. Dites-leur bien, quand vous leur écrirez, que je suis aussi heureux de votre bonheur et du leur qu'ils peuvent l'être eux-mêmes, et que j'irai les voir cette année1.

Monsieur le Principal vous estime et vous aime toujours comme autrefois; il me prie d'être auprès de vous et de vos parents l'interprète de son estime et de son affec­tion. Vous avez aussi les vœux et les félicitations de Mr Lacroix. Madame Louis est bien sensible â votre bon souvenir pour les enfants; c'est pour elle une bien grande consolation; elle vous tient en haute estime et vous affectionne comme une mère. Elle parle aussi d'aller à Rome, mais elle ne voudrait y aller qu'avec moi, parce qu'elle se­rait sûre de ne point s'égarer, ni rester en route.

Quant à moi, s'il ne survient point de circonstance imprévue, je suis toujours réso­lu à entreprendre ce voyage pour Pâques, si la saison n'est pas trop défavorable, ou après, si le temps était mauvais.

J'ai répondu à la lettre de Mr Piettre qui a dû vous en faire (part). Je le recomman­de toujours, à l'occasion, à vos bons avis. Je suis heureux, et ses parents comme moi, d'apprendre que Monsieur le Supérieur est satisfait de lui. Je lui écris de suivre en tous points ses avis et les vôtres. Dites-lui, s'il vous plaît, que ses parents vont très bien, et que Monsieur son père s'occupe à son bureau comme par le passé, complètement guéri.

Adieu, mon bien cher abbé, prions l'un pour l'autre et sans doute, à bientôt le plai­sir de vous embrasser cordialement.

Votre dévoué ami

Boute Ptre

Les personnes pieuses en question vous remercient beaucoup de vos bontés pour elles; elles prient pour vous2.

1 Extrait de cette lettre en NHV l, 20v°-21r°.

2 Cf LC 43.

435.25

AD B.21/7a.3

Ms autogr. 4 p. (21 x 13)

De Mr Boute

Hazebrouck 17 avril 1869

Mon bien cher confrère et ami,

Me voici encore une fois bien en retard et aussi bien loin de Rome! Que voulez­-vous? Le temps affreux qui a régné dans nos parages depuis février n'invitait guère un vieillard à entreprendre, quelque désir qu'il en eût, un aussi long voyage. Je me suis donc vu forcé de le remettre à d'autres moments plus favorables.

Le 11 de ce mois, il a fait beau et nous avons pu illuminer. Nous sommes tout émerveillés du récit des fêtes données à Rome pour le jubilé du grand et saint Pontife Pie IX! Que n'étions-nous là pour jouir du spectacle unique dans l'univers. Quatorze papes, avant Pie IX ont célébré leur jubilé sacerdotal, mais ces jubilés se sont bornés à la ville de Rome, tandis que celui de Pie IX a été célébré dans le monde entier. N'est-ce pas un fait tout à fait providentiel que cette manifestation spontanée du monde catholique? Comme elle a dû réjouir le cœur du saint Pontife, ce cœur si bon et si sensible que l'on a abreuvé et que l'on abreuve encore tous les jours d'amertume! Quel sujet de consolation et d'espérance pour le Saint-Siège et pour toute l'Eglise. Ces manifestations se sont produites, comme vous le savez sans doute, dans les plus grandes villes de notre belle France. Vous avez lu aussi dans vos journaux les accla­mations d'une foule immense qui accueillirent à Paris le nonce sur la place Saint­-Sulpice à son entrée dans l'église et à sa sortie. Un journal, l'Univers, fait cette remar­que que pareille démonstration ne s'était pas produite depuis la Fronde. Que tout ce­la est beau et consolant!

Le mauvais temps ne m'a pas permis d'aller faire visite à vos bons parents et enten­dre de leur propre bouche le récit des merveilles dont ils ont été les témoins, et sous un rapport, les acteurs mêmes. J'ajourne cette fête jusqu'à votre retour.

Je suis très heureux d'apprendre que Monsieur Piettre est toujours content au séminaire français; et que ses supérieurs sont satisfaits de lui. Je me permettrai de le re­commander encore à vos bons offices. Rien de plus précieux pour un jeune homme que les conseils charitables d'une personne d'expérience, amie et dévouée.

Rien de nouveau ici; tous ces messieurs, et en particulier Mr le Principal, Mr La­croix, vous offrent leurs sentiments affectueux et dévoués. Madame Louis vous pré­sente son respect et recommande ses enfants et elle-même à vos bonnes prières. Elle serait enchantée si vous pouviez lui rapporter quelques reliques. Celles que vous avez envoyées aux personnes pieuses que vous savez, les ont remplies de bonheur et de joie; elles vous en témoignent leur reconnaissance et m'ont prié de vous dire qu'elles ne cesseront de faire mention de vous dans leurs prières…

Monseigneur de Cambrai vient donner la confirmation et déjeuner à Saint­-François le 7 mai prochain. Grands préparatifs, comme vous pensez bien, et nouvelle besogne pour le pauvre économe.

J'ai gardé la chambre quelques jours par suite d'un rhumatisme aigu; mais

aujourd'hui, je puis sortir et marcher cahin-caha. Mais, tant va la cruche à l'eau… Mr le Principal a eu, lui aussi, son rhumatisme, mais lui aussi va bien maintenant. Je termine avec mon papier, mon bien cher ami, en me disant.

Votre tout dévoué

Boute Ptre

Ci-clos quelques mots pour Mr Piettre.

436.06

AD B.21 /7a.4

Ms autogr. 3 p. (21 x 13)

De P. Freyd

Rome ce 16 juin 1869

Mon cher Ami,

J'avais attendu votre lettre avec une certaine impatience. Elle m'a apporté la nou­velle que je présumais et â laquelle je ne me suis pas attendu en vain.

Vous êtes bien fatigué mais pas sérieusement malade. La préoccupation était plus nuisible que la fièvre. Vous voilà bien, et avec le repos et les soins intelligents d'une mère comme la vôtre, vous nous reviendrez gros comme un gros chanoine.

Rien de nouveau par ici depuis votre départ. La chaleur est bien supportable et il fait même frais parfois le matin et le soir. Ce qui fatigue, c'est le sirocco qui vient et revient.

J'ai reçu hier une lettre de 4 pages de Mr Calpini. Il me dit qu'il va beaucoup mieux et qu'il est à peu près au même état que lorsqu'il se promenait dans sa chambre avec ses béquilles.

Quant au cher abbé Perreau, je viens de lui écrire pour lui recommander les Eaux­-Bonnes de préférence aux bains de Dieppe.

Comme vous ne me dites rien de la santé de vos dignes et chers parents, je suppose que vous les aurez trouvés bien portants. Je suis heureux de penser qu'ils vous possè­deront de longs mois, et maintenant que vous être prêtre, ce sera une double jouis­sance pour eux. Votre excellent père et votre pieuse mère auront le bonheur de com­munier plus d'une fois de la main de leur fils. Ils comprendront de plus en plus quelle grâce Dieu leur a faite en vous appelant au sacerdoce.

Adieu, mon bien cher… Dites à vos bons parents l'affectueuse estime que je leur porte.

A vous mon affection le plus paternelle. Priez pour nous et pour moi en particulier.

M. Freyd

P.S. Comme nous aurons beaucoup de prêtres l'année prochaine parmi nos élèves, j'ai recommandé â ceux qui le sont ou le deviendront bientôt de rapporter des vacan­ces du linge sacré, une aube simple, quelques amicts, purificatoires, manuterges, cordon.

Vous pourriez faire la même chose. C'est pour l'usage d'un chacun et chacun à son départ en fera ce qu'il voudra, ou l'emporter ou le laisser à la chapelle.

181.02

AD B.17/6.34.2

Ms autogr. 2 p. (21 x 13)

De Louis Perreau

Chambéry, 19 juin 691

Mon cher ami,

Il me tarde d'avoir de vos nouvelles. Je vous ai laissé bien souffrant. L'air natal vous a-t-il rendu quelque vigueur? Cette maladie est arrivée bien mal à propos, si nous en jugeons selon le monde: mais bénissons les desseins de Dieu. Il sont mysté­rieux et miséricordieux. J'aime à me rappeler quelquefois que le prêtre qui souffre ressemble davantage à Notre-Seigneur. Entre la sensualité du monde et la justice de Dieu, il faut quelque intercesseurs souffrants. Oh! si nous savions en profiter. Cher ami, écrivez-moi pour me soutenir: je suis bien bas pour l'âme, je me matérialise trop: mon imagination préoccupée de soins matériels m'en poursuit dans les mo­ments où c'est inutile. Priez bien pour moi.

Je me trouve un peu mieux que lors de votre passage et compte partir le 25 ou le 26 pour les bains de mer. Je m'arrêterai un peu à Paris et tâcherai d'assister à la fête pa­tronale du Cercle le jour de St-Pierre: cela me rappellera de délicieux souvenirs2. Si vous n'êtes pas trop fatigué pour m'écrire quelques mots, vous pourriez me rendre un service: ce serait de m'indiquer l'adresse d'un hôtel où je puisse descendre à Paris: si vous m'écriviez tout de suite, votre lettre m'arriverait avant mon départ, je vous en serais reconnaissant.

Adieu, mon cher ami, soignez-vous bien, c'est assurément la volonté du Bon Dieu, il faut l'accepter de bonne grâce. Oubliez tout travail et tout souci. Laissez-vous gâter par votre bonne mère.

Je suis humblement tout à vous dans le Cœur du Notre-Seigneur.

Louis Perreau

1 Lettre presque totalement reproduite en NHV VI, 138-139.

2 Le Cercle du Luxembourg, dont Léon Dehon faisait lui aussi partie pendant ses études de droit à Pa­ris (cf NHV I, 35r° - 36r°).

156.03

AD B.17/6.10.3

Ms autogr. 2 p. (21 x 13)

De Mr Dehaene

13 juillet 18691

Mon bien cher monsieur l'abbé,

Nous avons la distribution des prix le 5 août, par suite la besogne est très grande: un seul jour d'absence pour Mr Boute et pour moi, c'est deux jours de trop. Ensuite, nous arriverions chez vous tout haletants pour vous quitter en toute hâte: ce serait gâter tout le plaisir.

Nous permettez-vous d'assister seulement de vives sympathies à votre délicieuse fê­te de famille et d'aller vous voir au mois de septembre et de faire alors avec vous le pèlerinage de Liesse? Oui, n'est-ce pas? M. Boute croit aussi que c'est la meilleurs combinaison. Montez donc solennellement à l'autel le 19, au milieu d'une popula­tion émue, d'une famille attendrie, aux regards d'un père justement fier et plein de re­connaissance envers Dieu et d'une mère pieuse si bien payée aujourd'hui de toute sa sollicitude! Nos cœurs seront tout près des vôtres.

Mille respects affectueux à vos excellents parents, mille amitiés au bon Henri et à Laure.

Tout vôtre in Jesu et Maria

Dehaene, chan. hon.

P.S. Inutile de remarquer que je suis l'interprète de tous les sentiments de M. Boute.

1 Lettre reproduite en NHV VI, 149-150.

174.02

AD B.17/6.27.2

Ms autogr. 4 p. (21 x 13)

De Mr Le Tallec

Dijon, le 30 juillet 1869

Mon bien cher ami,

Avant tout je dois vous orienter au milieu des conjectures que vous pouvez faire sur ma présence en Bourgogne. L'Allemagne est le terme de mon voyage, et j'y dois passer une bonne partie de mes vacances près de Nassau, dans une maison des Pères du Saint-Esprit. De Dijon je m'y rendrai par Strasbourg et en ce moment, M. de Bre­tenières m'offre la plus cordiale hospitalité. Notre charmant confrère me retient depuis deux jours et mon évasion devient pour moi un 'véritable problème. J'ai quitté Rome en compagnie de M. Roserot que j'ai laissé à Macon: il doit me rejoindre ce soir. Mr Duponchel, à qui nous avons envoyé une lettre tres pressante, se décidera peut-être à faire ici une petite apparition. Décidément l'hôtel de Bretenières devient une succursale du Séminaire français. Monsieur Dugas a quitté Rome le lendemain de notre départ, il avait l'intention de faire un petit voyage d'Italie: Sienne, Orvieto, Perouse semblaient être dans son projet les principales étapes. Il aurait pour guide un de ses cousins, peintre émérite. M. Poiblanc travaille activement à son doctorat, dont il doit passer la glorieuse épreuve le 3 du mois d'août.

Quelques jours avant mon départ de Rome, le dimanche 18, Mgr Du Cosquerl était mourant au Séminaire français et le matin les docteurs, qui jugeaient son état désespéré, craignaient beaucoup qu'il ne mourût dans la journée. Le lundi et les jours suivants, son état donnait quelque espoir. Le jour même de mon départ, le jeudi 22, il allait sensiblement mieux. J'en attends des nouvelles avec beaucoup d'impatience.

Aucun événement important n'a signalé le temps qui a suivi votre départ. Cette an­née, le Séminaire français, par un arrêté du P. Supérieur, n'a pris aucune part aux concours. J'en ai profité pour commencer mes vacances un peu plus tôt que par le passé. Le résultat des examens a été excellent, malgré l'extrême fatigue de plusieurs de nos confrères. MM. Boquet et Boutry sont partis de tres bonne heure et en assez mauvais état. M. Boutry, en rentrant chez lui, a fait une petite maladie qui n'aura pas, j'espère, de gravité.

Notre petite séance de l'Œuvre de Ste Catherine a été très pacifique2. Quelques dé­parts anticipés avaient un peu réduit notre nombre. Nous avons pris de bonnes réso­lutions pour les vacances. M. de Popiel nous a longuement parlé de l'état de son mal­heureux pays3. M. Poiblanc, qui remplaçait M. Boquet absent, nous a entretenus de la Garde d'Honneur du St-Sacrement. Le président que vous avez si dérisoirement imposé à l'Œuvre, a tâché de proposer aux membres l'exemple de St Louis de Gon­zague, modèle des séminaristes pour la science et la piété. J'ai cru devoir ajourner à la rentrée tous nos beaux projets, qui en temps de vacances n'auraient pas manqué de s'évaporer à l'air de France. Et puis vous serez là pour nous appuyer.

J'espère vous écrire lorsque je serai parvenu à ma destination. Veuillez présenter mes respectueux hommages à vos bons parents, dont je conserve le plus affectueux souvenir.

Quant à vous, mon bien cher, recommandez-moi instamment au divin Maître. Le jour de la Saint-Pierre, j'ai prié spécialement pour vous-même au tombeau de St Léon. MM. de Bretenières et Roserot veulent que je les rappelle à votre souvenir. Adieu.

P. Le Tallec

1 Evêque à Haïti. Il devait mourir quelques semaines plus tard (cf LC 52).

2 Sur cette Œuvre de Ste-Catherine cf NHV V, 107-108, et en ST. Deh.: L'Expérience spirituelle du P. Dehon - Les années de formation, chap. V: «Une pieuse association» et document annexe.

3 M. de Popiel: «une pieux polonais allié aux familles royales» (NHV V, 66).

161.02

AD B.17/6.15.2

Ms autogr. 6 p. (21 x 13)

De l'abbé Desaire

1° août 69

Mon bien cher ami,

Je ne fais qu'un bond du Collège romain à ma table pour venir vite vous annoncer ma joie et vous inviter à remercier avec moi notre bon Maître. Je viens de subir mon examen, et le succès a de beaucoup dépassé mon espérance. Dès le 8, j'avais fait ma thèse écrite; on me donna, devinez quelle thèse? l'infaillibilité du Souverain Pontife. Je n'eus pas de peine à voir là une coïncidence heureuse et après avoir récité un De profundis pour ce bon P. Gauthier qui avait su me donner tant d'ardeur pour défen­dre cette thèse, je me suis mis à l'œuvre pour ne finir que fort tard, et m'assurer pour l'écrit un succès à peu près complet. Plusieurs raisons me faisaient craindre pour l'oral, mais tout alla pour le mieux et il ne me reste plus maintenant qu'à redire avec vous: Benedicamus Domino.

On est heureux, vous le savez, quand de faibles efforts sont couronnés et on se ré­jouit surtout de faire part de son bonheur à ceux que l'on considère et que l'on aime comme des frères. Vous avez peut-être été désagréablement surpris en me voyant tant tarder à vous répondre, mais j'aime à croire que vous m'aurez toujours excusé, en faisant la part des agitations incessantes auxquelles est naturellement en proie le jeune élève qui n'a plus que quelques jours avant son examen: aussi votre indulgence aura-t-elle pour le moins égalé mon long retard.

Inutile de vous dire combien j'ai été heureux du prompt rétablissement de votre santé: toujours j'ai eu la conviction que votre indisposition devait être transitoire, tant il me parait maintenant que Notre Seigneur ne peut pas et ne veut pas vous rap­peler à Lui sans que vous ayez apporté votre part de matériaux et de travail à l'édifice de son Eglise. Cette épreuve aura de plus l'avantage de vous rendre plus prudent à l'endroit de votre santé et à ne plus vous laisser engager dans des fatigues qui ne vous sont point demandées, ou plutôt qui sont de vraies fautes de votre part. Continuez à vous bien soigner, et soyez à cet effet sous la main de votre bonne maman ce que vous étiez aux jours de votre berceau. Cette nouvelle année ne manquera pas de vous fatiguer beaucoup et d'aller jusqu'au bout de votre provision de santé.

Il y a plusieurs semaines déjà qu'on disait au Séminaire sur tous les tons que vous aviez prêché; de ce thermomètre de votre santé, tous vos amis concluaient que leurs vœux étaient réalisés et se demandaient où et comment vous aviez prêché. Serait-ce à Saint-Quentin, mon bon ami?! Ne manquez pas de me faire part des observations que vous aurez sans doute faites à ce premier essai, qui peut-être s'est déjà plusieurs fois renouvelé1.

Vous connaissez probablement déjà la mort de Mgr du Cosquer. Je ne sais s'il était déjà arrivé au Séminaire lors de votre départ. Sa santé paraissait très bonne, il était aimable et gai selon son ordinaire; je le vis à plusieurs reprises avant sa maladie; il me parlait avec enthousiasme et émotion du bien qu'il avait trouvé à faire auprès des bons jeunes gens du Cercle Catholique qu'il avait vus très souvent cet hiver; la belle cérémonie qui avait eu lieu à St-Sulpice le jour du 50° anniversaire de l'ordination du St-Père, lui avait surtout laissé les souvenirs les plus doux; tels étaient le sujets les plus ordinaires de ses conversations. Peu de jours après, il fut pris de dysenterie. La fièvre typhoïde se déclara, et après 7 semaines environ de maladie atroce, il s'éteignit dans une longue agonie. Chaque jour on disait la ste messe dans une chambre atte­nante à la sienne; sa résignation et son calme furent admirables et il mourut ainsi d'une bien belle mort. Les obsèques eurent lieu à la Minerve2 et demain son corps qui a été embaumé part,pour (la) France: Mr Rossi l'accompagne. Je ne saurais vous dire combien cette mort inattendue m'a frappé: il me semble voir Mgr à tous les pas. et j'en souffre véritablement durant la nuit. Ah! qu'on juge sainement des choses quand on a pour les peser la balance que présente la vue d'un cadavre, qu'une âme intelli­gente et douée des plus insignes faveurs du ciel animait. Que les grandeurs d'ici-bas apparaissent alors dans leur néant véritable, et comme on se sent épris d'un désir vio­lent d'être meilleur et de pouvoir, sans appréhension, envisager sa propre dernière heure! Espérons que cette mort précieuse devant Dieu méritera pour l'Eglise d'Haïti la fin de ses rudes épreuves et qu'elle la dotera d'un autre saint prélat.

Le Séminaire est maintenant bien vide: les ouvriers y font d'ailleurs un tel tapage durant le jour et durant la nuit qu'il devient inhabitable. M. Umbrecht, ayant subi son examen, part pour la campagne en attendant son départ pour (la) France. MM. Poiblanc, de Popiel et Bernard continuent à préparer leur examen qui aura lieu bien­tôt. Je pense que M. Le Tallec vous aura écrit de Dijon, car il est parti depuis plu­sieurs jours se rendant en Allemagne dans une maison des Peres3. On raconte qu'il paraissait ivre de joie le matin de son départ. M. Dugas ne doit pas encore être à Lyon, car il a rejoint son cousin pour parcourir l'Italie à petites journées. Vos co­sténographes sont partis avec l'assurance bien ferme de n'être point tenus à revenir avant le mois d'octobre, car vos projets de villa ont complètement échoué; il est bien pénible de voir combien on témoigne peu d'égards ici à ce bon Marchese, qui montre cependant un dévouement si généreux. Les craintes puériles que témoignent souvent nos Romains d'être supplantés par les étrangers pourraient bien être un peu la cause des difficultés qu'ont rencontrées tous les projets de ce bon maître4.

Voilà bien, je crois, mon bon ami, toutes les petites nouvelles qui peuvent vous in­téresser. Nous avons ici une chaleur bien forte: aussi que de fois je me prends à envier les frais ombrages de La Capelle! J'aurais déjà un grand besoin de vous revoir, main­tenant surtout qu'avec le retour de votre santé, votre abattement aura sans doute passé. J'ai beaucoup prié à votre intention le grand St Ignace dont on a fait au Gesú une fête splendide. Plusieurs fois, j'ai parlé avec le bon P. Freyd de vous et de nos projets; il me semble le voir toujours mieux disposé à nous appuyer. Il fut tout heu­reux quand je lui dis que j'allais durant deux ans recommencer la philosophie, réso­lution qu'il se hâta d'annoncer à toute la table des maîtres: où il me fit asseoir pour le dîner. Prions beaucoup pour ce bon Père, et abandonnons-nous de plus en plus doci­lement sous sa direction prudente et éclairée5.

Je ne quitterai pas Rome avant le mois de septembre: il m'est pénible de ne pouvoir faire coïncider une partie de mes vacances avec les vôtres, mais, hélas, ma position réclame de petits sacrifices qu'il faut bien, n'est-ce pas, accepter généreusement. Nous sommes encore 5 prêtres â St-Louis: aussitôt que je serai un peu reposé de mes petites fatigues, je travaillerai quelque peu d'histoire et de géographie, car j'en ignore jusqu'aux premiers éléments. D'ailleurs ces jours de calme et de tranquillité qu'on passe ici durant les vacances, sont pour moi pleins de charmes: on laisse le cœur et l'esprit se promener un peu sur les champs qui leur plaisent le plus et ainsi on se relè­ve avantageusement des contraintes où les tenait un travail obligatoire.

Les tours de force liturgiques dont vous êtes le témoin vous montrent, mon bon ami, les conséquences presque nécessaires de l'isolement. Dieu fait tout, me semble-t­il, pour vous dégoûter de la vie séculière. Continuez à noter vos impressions et nous nous les communiquerons mutuellement dans ces heureux instants de conversations qui me font toujours beaucoup de bien et m'enflamment du désir de bien faire6.

Adieu, mon bon ami. Continuez à ne pas m'oublier au st autel; vous savez com­bien il m'est impossible de vous oublier: les Sts Léon sont d'ailleurs si nombreux que vous y avez des intentions de messes spéciales beaucoup plus souvent que si vous por­tiez un autre nom. Oui, durant ces vacances, reposons-nous beaucoup en priant et demandons surtout à Dieu que cette année prochaine nous mette pleinement sur la voie que la Providence voudra bien nous faire suivre.

Ne manquez pas d'offrir à vos bons parents mes respects affectueux, et vous, mon bon ami, croyez-moi bien.

Tout vôtre en Jésus

C. Desaire

P. S. Avez-vous pensé â la commission que m'avait donnée l'auditore du Studio concernant une certaine adresse. Veuillez m'en parler si vous en avez des nouvelles.

Rome 1 août 1869.

1 Sur ces premières prédications, pour les «prémices, le 19 juillet, cf NHV VI, 140-150; pour les di­manches à Sommeron et le panégyrique de Ste Grimonie ou Germaine à La Capelle, en septembre, cf NHV VI, 157-165.

2 L'église de Santa Maria sopra Minerva, de la paroisse sur le territoire de laquelle se trouve le Sémi­naire français.

3 Cf LC 51.

4 L'abbé Virginio Marchese était le chef sténographe: cf NHV VI, 108-113.

5 Il s'agit du projet de l'œuvre d'étude dont il est question en NHV VI, 115-130. L'abbé Desaire y fut aussi engagé activement: cf NHV IX, 37-39, 46-48, 63-65, 160-163.

6 Allusion au problème que se posait alors Léon Dehon pour son avenir: prêtre séculier ou religieux. Les «tours de force liturgiques» dont il est question sont ceux que doit faire le prêtre en paroisse, sou­vent isolé: ce que Léon Dehon devait expérimenter à Sommeron et dont il avait fait part à l'abbé De­saire. Ses lettres au P. Freyd témoigneront bientôt de ses préoccupations à ce sujet.

181.03

AD B.17/6.34.3

Ms autogr. 3 p. (21 x 13)

De Louis Perreau

Le Treport 9 août 691

Très cher ami,

Au bord de la mer, un jour d'orage, au milieu d'une salle de journaux, au Casino, voilà où je me trouve aujourd'hui.

Que Dieu soit béni en tout ce qu'il fait! Je crois qu'il me rendra la santé: mon séjour à la mer m'a ressuscité; j'y suis depuis un mois; jusqu'ici je n'ai pris que des dou­ches d'eau de mer froide, je vais désormais y joindre les vrais bains. Ma bonne mère m'a accompagné à cause de l'état de grande fatigue où j'étais, mais elle m'a mainte­nant laissé seul et est retournée à Chambéry. Pour moi, je suis condamné à rester ici jusqu'à la fin de septembre: la condamnation n'est pas fort triste, et je l'accepte d'au­tant mieux que le 1° mois a eu un grand succès sur ma santé. Par une bonne fortune toute providentielle, j'ai rencontré ici Cadot et Thellier. Ils sont partis, mais Thellier reviendra du 15 au 302.

J'ai eu de vos nouvelles par le R. P. Freyd, mon cher ami; vous étiez mieux, mais j'ai besoin de le savoir par vous. Vous aviez besoin d'un grand repos, j'espère que vous vous le serez abondamment donné. N. Seigneur n'est-il pas toujours avec nous? et n'est-ce pas une consolante pensée que de tous temps, en toute situation, nous sommes ses amis et qu'il nous est donné de faire sa volonté?

Si nous l'aimions, nous serions doux et calmes partout, nous serions heureux, nous serions comme ces musiciens qui préludent à un air de fête: ils s'en approchent tranquillement par des harmonies qui l'appellent. Préludons ici-bas aux chants d'allé­gresse du ciel: au ciel nous serons au Thabor, montons-y avec courage.

Je vous dis tout cela quoique je sois bien lâche, bien misérable, quelquefois bien triste. Je me recommande bien à vos prières.

Adieu! J'espère vous écrire encore. Savez-vous que M. Poiblanc est docteur, que Mgr du Cosquer est au ciel… Que M. Le Tallec est en Allemagne dans une maison des Pères du Saint-Esprit. Restons tous unis dans le Cœur de Celui.

en qui je suis à jamais votre ami

L. Perreau

1 Lettre reproduite en NHV, 150-152.

2 Cadot et Thellier de Poncheville, deux étudiants connus à Paris.

436.07

AD B.21 /7a.4

Ms autogr. 3 p. (21 x 13)

Du P. Freyd

Rome ce 25 août 1869

Mon bien cher ami,

Votre dernière m'est arrivée ce matin au moment où je me proposais de vous écri­re. Je profite du départ de M. Humbrecht et d'un tout petit instant qui me reste pour vous tracer deux lignes.

Je suis bien content de vous savoir auprès de notre cher abbé Perreau; vous vous serez utiles l'un à l'autre et je pense que vous ne vous disputerez point.

Eh oui, mon bien cher, la vie dans le monde n'est pas commode et notre sanctifica­tion y court plus d'un danger. Qui peut, au milieu de la poussière, ne pas en être cou­vert, du moins un peu? Qui, au milieu du bruit, des distractions, du tracas des affai­res mondaines, (peut) demeurer dans un saint recueillement, tel que le demande de nous notre adorable Maître, qui seul veut être notre vie? C'est possible, mais c'est difficile.

Néanmoins j'aime que mes fils spirituels essaient un peu de cette vie; ils appren­nent mieux à faire bonne récolte de force, de vie surnaturelle, d'amour de Dieu, quand ils reviennent. Heureusement, vous avez à revenir et à rester encore quelque temps, quelques années. Nous aurons le loisir d'étudier l'adorable volonté de Dieu sur vous. En attendant, je ne veux pas de préoccupations, mais de la prière et de l'abandon à Dieu seul.

Je devais partir demain pour (la) France, mais j'ai reçu un contre-ordre. Ce sera peut-être pour l'un ou l'autre jeudi des semaines suivantes. Comme Dieu le voudra. En somme je ne me soucie pas grandement des voyages.

Quant à vous ne vous tourmentez pas tant pour votre sténographie. Si vous n'êtes pas ici pour le 1° octobre, cela ne sera pas un péché mortel.

A Dieu, mon cher ami. Je suis avec affection tout vôtre in Xsto Jesu.

M. Freyd

Je n'ai aucune nouvelle de M. Le Tallec depuis son départ. M. Poiblanc seul est en­core ici, il étudie la morale. M. Rouillard est vicaire à Blois.

181.04

AD B.17/6.34.4

Ms autogr. 5 p. (21 x 13)

De Louis Perreau

20 septembre - Treport - 691

Mon cher ami,

Vous voici au moment du départ. Que le Bon Dieu vous accompagne dans votre année nouvelle. Qu'il vous rende le bien que vous m'avez fait en venant ici. Qu'il vous conserve et accroisse en vous l'amour, la simplicité, l'humilité.

Voilà ce que vous souhaite votre ami: c'est là tout, le reste est poussière. Oh! que de fois nous nous le sommes dit de vive voix! Eh bien! il n'y a pas de mal à nous l'écri­re encore, jusqu'à ce que, vraie poussière en nos pauvres corps, nos âmes soient unies dans la félicité céleste. La douce espérance de ce jour éternel sera peut-être la seule qui nous unira en ce monde. Je commence à douter de mon voyage à Rome. Bien que je sois mieux, ma santé laisse encore bien à désirer, et voici bientôt la fin de ma sai­son de bains. Priez pour que je me résigne, j'ai grand besoin que vous me souteniez pour que je ne dissipe pas les jours de maladie: si vous saviez combien je suis autre que je ne parais, vous prieriez beaucoup pour moi.

Nous avons eu de bien gros orages. Les pauvres marins ont été éprouvés: ils ont montré leur foi dans le danger; au retour, les uns ont fait célébrer une messe, il en est d'autres qui ont fait quelque pèlerinage pieds nus. On est si anéanti devant Dieu au milieu de la tempête: nous osons nous grossir, nous autres, quand nous sommes aux rayons d'un soleil paisible.

Adieu, bien cher ami. C'est dans le Tres Saint Cœur de Marie que je suis vôtre.

Abbé L. Perreau

21 septembre.

Ma lettre est encore là. J'y joindrai donc un mot. Ce sera la devise du P. Poiblanc; je viens de recevoir une lettre de lui et il me la répète: «Soyons saints». Oh! quelle grande parole! Penser que nous pouvons être des saints. Mais il faut de la peine, en pratique, peine que l'amour transforme. Il me semble que les saints avaient plutôt les yeux sur le divin modèle que sur les exemples qui les entouraient. Mais surtout, ils s'oubliaient: si on se croit plus saint que les autres, malheur! malheur! tout est perdu.

Soyez saints et parfaits comme mon Père Céleste est parfait. Quel horizon! Le di­vin Maître vient à nous pour nous y conduire; priez pour que vous me trouviez au terme. Je m'arrête souvent en route. J'entrevois quelquefois, mon cher ami, qu'il se­rait plus facile peut-être de faire les choses sans restriction qu'à moitié. On voit de­vant soi souvent deux routes, la route banale et la route de la perfection: la route ba­nale est large, on s'y laisse entraîner, elle n'a pas le dard du remords, mais elle a bien des tristesses. Sursum corda! Pardonnez-moi ma lettre. Prions, car nous mourrons.

Nous mourrons! on le dit avec tristesse quand on est dans la voie trop large. Vous rappelez-vous le St François d'Assise qui est suspendu dans l'escalier du Séminaire: il est mort déjà, lui.

Je vous embrasse in Christo

Louis Perreau

Le P. Poiblanc est vicaire à Semur (4 mille habitants); il pense n'aller à son poste qu'une semaine avant la Toussaint. Thellier ira à Rome avec son frère. Je voudrais bien qu'il vit le p. Supérieur au moins une fois tout seul.

1 Lettre reproduite en NHV VI, 166-168.

L'abbe Perreau devait mourir quelques mois plus tard; cf LC 68 de sa mère à Léon Dehon (31 mai 1870).

158.12

AD B.17/6.12.12

Ms autogr. 2 p. (21 x 13)

De Mr Demiselle

Soissons 4 octobre 1869

Bien cher Abbé,

J'allais vous adresser ma lettre à Rome quand j'apprends par ces MM. Parmentier que vous êtes à La Capelle. Est-ce que votre santé ne serait pas satisfaisante? J'aime à croire que vous aurez voulu laisser passer les chaleurs de septembre qui doivent être très grandes à Rome.

L'objet de ma lettre était de me faire arrêter un logement pour le Concile deux chambres, dont une à deux lits (nous sommes trois), pour deux mois et plus s'il y a lieu. On m'a assuré que Mr l'Econome du Séminaire français trouverait cela dans de bonnes conditions: 70 à 75 frs environ par mois pour chaque chambre, avec un lit, une table et une chaise, pas trop loin de Monteciterio où loge Mgr chez les lazaristes. Une cellule de séminariste me suffirait parfaitement.

Donnez-moi vite de vos nouvelles, ou mieux, venez passer avec moi quelques jours. Mgr est ici, il part le 16 novembre.

Vous avez dû marier Fanny dans le courant de septembre1. J'ai, moi, visité la Nor­mandie jusqu'à Cherbourg et la Bretagne jusqu'à Brest.

J'offre mes meilleurs compliments à Mr et Mme Dehon, respects à maman Dehon, souvenir affectueux à Mr et Mme Henri et leur petite famille.

Je suis bien à vous de cœur

Demiselle

Ma soeur ne veut pas être oubliée.

1 Cf LD 125 (note 2).

184.01

AD B.17/6.37.1

Ms autogr. 4 p. (21 x 13)

De l'abbé Poiblanc

Dijon le 16 octobre 1869

Mon bien cher Abbé,

Je voulais que ma lettre allât vous trouver dans notre cher Séminaire dès les pre­miers jours de votre rentrée, mais pressé de besogne à la veille d'entrer dans le mi­nistère, j'ai, bien contre mon gré, remis de jour en jour.

J'aime à croire que votre santé est parfaitement rétablie et que vous allez pouvoir jouir en paix de l'année du Concile. Heureux homme! Je serais tenté de vous jalou­ser, vraiment le Seigneur vous gâte; tandis que vous assisterez aux grandes séances de l'assemblée incomparable qui va se réunir, et que vous entendrez des paroles pleines de science, de foi, d'amour de l'Eglise, moi, au confessionnal, j'entendrai plus d'un triste récit. Si, au moins, j'y puis faire un peu de bien, je me résignerai sans trop de peine, mais pour cela, priez pour moi et recommandez-moi instamment aux prières de mes chers confrères de Sta-Chiara.

Tous les papiers de la petite association sont chez le P. Eschbach. Prévenez, je vous prie, M. Pineau, qui, j'espère, veut bien ne pas m'oublier, que j'ai remis notre caisse au P. Econome1.

C'est le F. Evodec (?) qui dont avoir les registres et caisses du vestiaire et de la bi­bliothèque. Je n'ai pu faire avant de partir le compte des livres, parce que je ne savais pas au juste ce que vous avez déboursé. Veuillez me le dire et je vous renverrai ce compte réglé.

J'ai vu à Chambéry M. Pillet. Il croit qu'il ne faut pas cesser de donner chaque année la liste complète des élèves. A Lyon, j'ai vu M. Ducasse qui m'a donné son adhésion et sa cotisation que je vous envoie par votre nouveau confrère, Mr Lecomte (qui sera, je n'en doute pas, un bon séminariste à Rome, comme il l'a été à Dijon, où je l'ai connu un an).

S'il n'est pas trop hardi de ma part de formuler encore un avis sur l'association des anciens élèves, je vous dirais que nous pensions, le P. Eschbach et moi, qu'il serait bon d'acheter cette année, puisque nous le pouvons, une des choses nécessaires pour le service funèbre et nous pensions à un drap mortuaire.

Avez-vous des nouvelles de notre cher abbé Perreau?

Sur le commandement formel du R.P. Supérieur, nous avons pensé, MM. Rose­rot, de Quincy et moi, qu'il ne serait pas prudent de laisser circuler et copier le règle­ment de l'association de prières que vous nous (avez) laissé, le moment ne paraissant pas opportun, et je connaissais trop votre seul désir de sanctifier vos confrères pour hésiter un moment, par crainte de vous blesser, à prendre une telle mesure2.

Rappelez-moi au bon souvenir de tous mes excellents et anciens confrères, notam­ment de MM. Bernard, Rossi, de Ryvoire et de tous vos collègues en sténographie. Dites à M. Dugas que j'attends toujours la lettre que son père m'avait fait espérer.

Unis par la prière dans les Cœurs Sacrés de Jésus et de Marie, croyez-moi toujours votre bien affectionné confrère en N.S.J.C.

F. E Poiblanc

J'oubliais de vous dire que je suis vicaire à Semur (Côte d'Or).

P.S. Je n'ai pas encore reçu le bulletin de l'Association. L'abbé de Bretenières l'a reçu.

1 Il s'agit de l'Association des anciens élèves de Santa-Chiara.

2 Cette pieuse association de prière entre séminaristes était sans doute distincte de l'Œuvre Sainte-­Catherine, plus spécialement orientée vers l'apostolat. Cf en ST. Deh.: L'expérience spirituelle du P. Dehon - les années de formation (1843-1871): chap. V.: «Une pieuse association» et le document analysé: «Pieuse association entre séminaristes» (AD B. 3/17).

161.03

AD B.17/6.15.3

Ms autogr. 3 p. (21 x 13)

De l'abbé Desaire

Hauteluce 21 octobre 1869

Mon bon et bien cher Ami,

Que pensez-vous de moi et comment interprétez-vous un silence si prolongé? Pas en mal sans doute, mais vous soupçonnerez peut-être une indifférence fort grande ou une négligence bien coupable. Ne m'en veuillez pas, mon cher ami, car je souffre déjà plus que vous-même de ma honteuse paresse. Souvent fatigué par une maudite fièvre, presque toujours pris par des occupations occasionnées par des affaires de famille, et assez fréquemment en course, j'ai à chaque instant renvoyé l'accomplissement du de­voir de répondre a vos bonnes lettres. Et cependant, vous ai-je oublié un seul instant? Non certainement, car mon cœur ne se taisait pas du silence de ma plume; et quand je pensais ou que je priais, vous étiez et vous êtes bien toujours â mes côtés.

Hé oui, mon bien cher, plus que jamais je vois maintenant les choses se combiner harmonieusement pour me laisser la plus entière liberté et pour que le puisse dire à Dieu, si sa voix m'appelle; me voici… ecce venio ut faciam, Deus, voluntatem tuam. Je conduirai après-demain ma petite sœur au pensionnat des bonnes religieuses que nous avons à Moutiers et je ne désespère point de l'y voir rester! Quant à moi, le re­prendrai sous peu le chemin de Rome, mais seulement après la Toussaint, car j'ai de­sire demander une courte prolongation de mes vacances, pour rendre à ma santé tou­te sa vigueur. Il pourrait d'ailleurs se faire qu'en retardant un peu mon départ, je par­tisse avec notre bon Eveque de Tarentaise. Nous pouvons donc nous dire: à bientôt, et réserver pour les heureux moments où je vous aurai retrouvé tout ce que nous au­rons à nous communiquer comme résultat de nos observations de ces vacances. Que de fois j'ai été ému en relisant vos pages où vous me parliez des débuts de votre minis­tère et des impressions que vous en ressentiez: Qu'il vous aura été doux, après ces premiers essais, de rentrer dans cette chapelle de Ste-Claire où tant de doux souvenirs doivent se présenter à vous! Ne m'y oubliez pas, mon bon ami, et si chez vous, com­me en moi, nos résolutions persistent, confiez-les avec plus de ferveur encore que par le passé, à Celui qui nous montrera la voie, qui nous enseignera la vérité, qui nous donnera la vie.

Veuillez donner de mes nouvelles à nos bons Pères, surtout à celui auquel nous de­vons tant et duquel nous devons tout attendre. Dites bien aussi à tous les autres Pères que je ne suis pas mort encore et que j'espère leur revenir avec une santé non moins florissante que par le passé. Je partirai par mer en prenant le premier navire des Mes­sageries qui fera un voyage à Civita après la Toussaint.

Adieu; priez beaucoup pour moi et croyez toujours aux sentiments fraternels que je vous porte en Jésus.

C. Desaire

P.S. Je n'ai pas envoyé jusqu'ici vos reliquaires, ignorant si vous étiez à La Capelle. Je les adresserai à M. votre père avant mon départ. Si vous m'écrivez à Albertville avant Toussaint, veuillez me dire si je dois les envoyer à d'autres.

435.26

AD B.21 /7a.3

Ms autogr. 4 p. (21 x 13)

De Mr Boute

Hazebrouck 3 novembre 1869

Mon bien cher abbé et ami,

Il y a donc bientôt un mois que j'ai reçu votre dernière lettre de Rome, et je n'y ré­ponds qu'aujourd'hui. Je connais votre indulgence sur mes retards accoutumés, mais aujourd'hui, il y a plus. Mon état de santé ne m'a pas permis jusqu'ici d'entretenir au­cune correspondance. J'ai souffert considérablement depuis cinq mois de rhumati­smes et de névralgies. A l'heure qu'il est, il neige ici, et cette pluie condensée agit sur mes nerfs et sur tout l'organisme de la manière la plus irritante, sans compter mes rhumatismes qui sont loin d'avoir disparu. Je suis la plus grande partie du jour cloué sur mon fauteuil, et la nuit je ne sais où reposer mes membres.

N'était cela, le tempérament est encore bon et la charpente assez solide. Seule­ment, je ne puis pas m'occuper longtemps d'affaires sérieuses; l'esprit est bientôt fati­gué, la mémoire se perd… enfin, c'est comme partout ailleurs, le commencement de la fin, c'est-à-dire la vieillesse avec ses infirmités - multa senes ferunt incommoda, dit notre païen Horace, que vous connaissez comme moi, et mieux que moi.

Je prends patience et je demande à Dieu chaque jour la résignation dans mes souffrances. Accordez-moi, s'il vous plaît, une bonne place dans vos bonnes prières. Mais c'est trop parler de moi; je ne 1»ai fait que pour me disculper auprès de vous pour ce dernier retard et mon absence à vos (mémorables?) prémices, où j'ai assisté d'esprit et de cœur, avec le bien vif regret de n'y être pas en personne.

J'ai reçu par Siméon les reliquaires et les titres authentiques, et dernièrement, de La Capelle, d'autres reliquaires dont votre lettre m'indiquait la destination. Ces deux envois ont (été) remis aux personnes désignées, Madame Louis, et les personnes pieuses, Melle Pilon et sa compagne. Elles vous expriment toute leur vive reconnais­sance pour ce précieux envoi. Je n'ai pas encore vu Mr Darant du…, depuis l'envoi que je lui ai fait, en votre nom, des reliques de St Antoine. Je vous transmets ci-joint un mot de Melle Pilon, qui est encore une nouvelle demande. N'en tenez compte qu'autant que cela ne vous dérange nullement et à moins de frais possible-cuivre au lieu d'argent, en pareille circonstance. Je dois vous dire, pour l'acquit de ma con­science, que j'ai gardé pour le porter sur moi, ce que je fais, le reliquaire contenant des reliques de St François d'Assise, St Fidèle de Sigmaringen, etc, etc, etc…

Quand vous recevrez ce griffonnage, vous serez en plein concile. Nous lisons, avec le plus grand intérêt, tous les détails qui concernent son ouverture; notre attention sera vivement sollicitée dès son ouverture. Vous connaissez sans doute les paroles de l'Empereur, dans son discours lors de l'ouverture des chambres, relativement au con­cile. Les voici textuellement: «De la réunion à Rome de tous les évêques de la catholi­cité, on ne doit attendre qu'une œuvre de sagesse et de conciliation». Les uns trou­vent ces paroles pacifiques et bienveillantes, d'autres les trouvent bien vagues.

Je ne vous parle pas du dernier écrit de Monseigneur d'Orléans. «Observations à l'Univers», vous les connaissez déjà sans aucun doute1; elles ont fait ici beaucoup de bruit. Tout cela agite un peu les esprits. Espérons que le Concile mettra ordre à tou­tes choses et saura concilier tous les intérêts, moins ceux d'amour-propre. Va-t-on poser la question de l'infaillibilité, oui ou non? Les uns sont pour l'affirmative, les autres pour la négative. Ne faudrait-il pas en finir, une fois pour toutes, avec les pré­tendues libertés gallicanes? Si parfois il vous restait cinq minutes au milieu des occu­pations qui vont vous incomber, je vous serais bien reconnaissant, et tous ces mes­sieurs comme moi, pour nous tenir au courant de tout ce qui se passera au sein du concile, avec la physionomie qu'il présentera.

Mr le Principal et tous ces messieurs vous présentent leurs hommages pleins de re­spect et d'affection. - Mr Piettre a renoncé à la carrière ecclésiastique; il est entré dans celle de l'administration. Son séjour chez son frère docteur médecin dans une lo­calité près Paris a tout gâté; c'est notre opinion à tous2.

Je termine par où j'aurais dû commencer: Mr votre frère, qui tient tant à votre san­té, m'invite, dans sa lettre d'envoi des derniers reliquaires, à vous recommander d'ap­porter tous les ménagements possibles pour la conservation de cette précieuse santé. Ménagez-vous donc, je vous prie en son nom et au mien.

Votre ami

Boute Ptre

1 Cf LD 135 (note 1).

2 Cf LD 35, 43, 44, 46, 47.

158.13

AD B.17/6.12.13

Ms autogr. 2 p. (21 x 13)

De Mr Demiselle

Soissons 9 novembre 1869

Bien cher Abbé,

Je vous suis bien reconnaissant de la peine que vous avez prise pour me procurer un logement. Je compte arriver à Rome le 18 ou le 19 courant. Ne pourriez-vous pas mettre à la gare un mot pour me faire connaître la rue et le N° de mon logement. Je réclamerais ce mot au chef de gare. Si je ne trouve rien j'irai droit au Séminaire pour le savoir.

Le logement arrêté est pour moi, l'abbé Menus et Mr le chanoine Baratt. L'abbé Péronne, qui ne part pas avant le 22 courant, avait cru pouvoir compter sur un loge­ment qu'il devait partager avec un prêtre de Paris. Voici qu'aujourd'hui il vient me prier de vous écrire pour que vous lui en procuriez un dans les environs, ou mieux dans la même maison, s'il y avait place. Si vous ne trouviez rien, ne serait-il pas possi­ble de placer deux lits dans la plus grande des trois chambres, comme extrême expé­dient?

Si vous arriviez à lui trouver quelque chose assez à temps pour lui répondre avant leur départ, il vous en serait reconnaissant.

Voici mon itinéraire: lundi 15, parti de Paris, je serai mardi soir à Turin; mercredi à Florence et jeudi près de Rome, où nous ne voulons pas arriver de nuit. Il faudrait coucher à Viterbe polir arriver le lendemain vers le milieu du jour.

A bientôt. Mr Peronne vous envoie ses meilleurs compliments, ainsi que ma sœur. Je suis bien à vous de cœur.

Demiselle

Mgr arrivera quelques jours après nous avec l'abbé Guyart.

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