CORRESPONDANCE DU PERE DEHON: ANNEE 1883
Autour du 23 janvier 1883. B 20/14 (inv. 335.02). P. FalleurAutour du 23 janvier 1883. B 20/14 (inv. 335.02). P. Falleur
Lettre non datée.
Neuvaine préparatoire à la fête de la Purification de Marie1.
- Tous les jours après le chapelet on lira une page du discours de St Liguori sur la Purification et la prière qui suit ce discours.
- Les Pères ajouteront au saint Office le petit office de la très sainte Vierge.
+ Jean du Cœur de Jésus, sup.r O.C.J.
124.01.1884 (vers le) 1 Le 2 février.
30. 01. 1883. B 22/4 (inv. 451. 01). Mgr Gay
Monseigneur,
A la vue du succès toujours croissant de la Circulaire aux évêques, je sens le besoin de renouveler à Votre Grandeur l'expression de ma vive gratitude.
Sept évêques au moins et plusieurs Supérieurs de Congrégations religieuses ont porté la Circulaire à la connaissance de leurs prêtres. Plusieurs évêques s'y décideront encore. Les autres prêtres recevront la Circulaire par d'autres moyens. Bientôt la prière sacerdotale sera vraiment devenue nationale.
Nous avons écrit, le P. Sacerdos et moi, à ceux de nos anciens condisciples de Rome qui appartiennent à des diocèses dont les évêques n'ont encore rien fait dans le sens de la Circulaire. Ils s'en feront les propagateurs parmi les prêtres de leurs diocèses respectifs. Bientôt donc tous les prêtres de France seront informés de ce mouvement de prières et ceux qui ont bonne volonté y seront unis.
Mr Pagès m'annonce aujourd'hui l'adhésion des Archevêques de Chambéry et d'Avignon. Mgr de Moulins fait une oeuvre équivalente. Il fait dire des messes réparatrices. Il a fait appel pour cela à tout son clergé. Votre Grandeur pourrait peut-être le prier de se laisser porter comme adhérent sur la prochaine édition de la Circulaire.
J'espère après le moment où Votre Grandeur viendra passer quelques jours avec nous. Une semaine ne sera pas de trop. La correspondance ne peut pas exprimer tout ce qu'on éprouve ici quotidiennement de l'action divine.
Notre première école apostolique est particulièrement bénie. Mgr de Soissons est venu la visiter ces jours-ci pour se rendre compte de l'action puissante de la grâce qu'on y constate. Une des meilleures familles de St Quentin y a mis son fils avec les petits enfants que nous avons adoptés.
C'est demain que nous prenons possession de la maison de Hollande. Le P. Sacerdos ira bientôt y passer quelques jours. Ce sera avantageux pour son âme. Pour un novice il est un peu trop en famille en ce moment.
Je sais, Monseigneur, que nous pouvons compter sur le concours constant de vos prières.
Daignez agréer l'hommage de mon respectueux et filial dévouement. L. Dehon.
17. 02. 1883 B 35/3. 4 (inv. 579. 04). Abbé Galley (texte dactylogr.)
… Premier plan: sanctification des âmes consacrées et réparations pour ces âmes.
Il me semble que votre présence au milieu de nous nous apportera l'appoint de tout ce que la pieuse Mère Véronique et son groupe ont fait et souffre dans ce but.
… Cette oeuvre que nous faisons ou plutôt que N. S. fait par nous est si grande, si urgente et si chère au Coeur de Jésus.
19. 02. 1883.B 109/2(inv. 1169. 52)Abbé Désaire (Lettre insérée en mai 2003)
+ 19 fév. 83.
Je vous écris de Liège, en route pour notre noviciat de Sittard.
Vous avez dû recevoir ce que nous avons fait autographier comme documents de l'OeuvreŒuvre du Sacré-Cœur.
Les bénédictions du Sacré Cœur sur son œuvre ne se sont pas ralenties depuis votre visite, au contraire.
Nous avons maintenant deux maisons qui ont leur cachet défintifdéfinitif, c'est le noviciat de Sittard et l'école angélique de Fayet. Cette dernière surtout est unique au monde. Ces petits privilégiés du Sacré Cœur surabondent de grâces. Tous ceux qui les visitent sont séduits par l'aimable ferveur qui règne dans cette maison. C'est un petit Nazareth, qui fait redire le traditionnel Eamus ad Suavitatem. Un de ces enfants a des grâces extraordinaires bien touchantes.
La commission de Reims a terminé son travail. Monseigneur de Soissons est en train d'en prendre connaissance. Nous savons déjà qu'il est favorable dans l'ensemble avec quelques réserves. On ne pouvait pas demander plus.
Il y a quelques nouvelles recrues et il s'en prépare d'autres.
Pour les deux enfants que vous me proposez, je les admettrai volontiers. Mais à Fayet le dortoir est au complet pour le moment. On en dispose un autre. Il y aura quelques places pour Pâques. Monseigneur fait aussi quelques difficultés pour laisser grandir cette œuvre à cause des charges qui pèsent déjà sur la charité des Saints-quentinois.
Pour votre aîné, il pourrait être essayé au Sacré-Cœur. Nous verrions si l'on peut encore espérer d'en faire un prêtre.
Pour la maison d'Albertville, nos Sœurs n'inclinent pas à faire de fondations à moins que ce ne soit pour nous suivre.
Le p. Vincent nous donne un bon carême.
Ne soyez pas trop longtemps à revenir un peu nous voir. C'est une condition de votre noviciat.
Croyez en mon bien affectueux dévouement.
L. Dehon
08. 03. 1883. B 109/2 (inv. 1169. 53). Abbé Désaire (Lettre insérée en mai 2003)
+ 8 mars 1883
Cher ami,
Vous aimez à recevoir de temps en temps des nouvelles de la patrie. Je vous envoie quelques lignes aujourd'hui.
Je vous ai expédié ceux de nos documents qui étaient imprimés. Vous avez dû les recevoir. Prochainement je vous enverrai les Constitutions.
Vous êtes toujours, n'est-ce pas, dans le statu quo pour la Savoie.
C'est, dit-on, l'évêque de Marseille qui va à Bordeaux et Monseigneur Ardin est nommé à Marseille. Il faut attendre l'heure de la Providence.
Nos Sœurs ne se sentent pas attirées, pour le moment, vers Albertville. Elles veulent avant tout fonder en Hollande à côté de nous.
Notre noviciat de Hollande est bien en train. Ce sera le pendant de Saint-Clément de Fayet. La ferveur y règne, avec le véritable esprit du Sacré Cœur. Ils sont là neuf. Après Pâques j'y enverrai encore deux ou trois jeunes gens.
Monseigneur de Soissons use toujours d'une extrême prudence. Il est beaucoup plus gagné qu'il ne veut le paraître. Sa décision prise d'accord avec Monseigneur l'archevêque de Reims est bien sommaire, c'est qu'il faut demander une direction à Rome.
C'est précisément ce que nous désirions. Monseigneur n'a pas encore décidé sous quelle forme et par quels moyens il demanderait cette direction. Je lui ai proposé d'envoyer le p. de Pascal pour commencer et d'y aller ensuite moi-même. J'attends sa réponse.
Nous nous laissons conduire par le Sacré Cœur qui veille sur son œuvre et dispose tout pour son accroissement.
Nous allons faire, la semaine prochaine, notre retraite de la Passion. Elle est fort belle, plus belle même que la première. Je tâcherai de vous en faire envoyer le plan.
Le p. Vincent a pris pour thème de son carême notre première retraite. Il réussit très bien.
Tâchez de bien entrer dans l'esprit de la dévotion au Sacré Cœur. C'est l'esprit d'amour et d'abandon.
Comptons plus sur Notre Seigneur que sur notre propre action personnelle.
Ecrivez-moi de temps en temps.
Votre tout dévoué in Corde Jesu,
L. Dehon
20. 03. 1883. B 19/1. 1 (inv. 229. 13). Mère Marie du SC (Servantes)
Chère et bonne Mère,
C'est le sacrifice dans le sacrifice! Je suis encore arrivé trop tard. Ma bonne mère a reçu l'absolution et l'extrême onction. Elle avait sa connaissance. Elle avait reçu son Jésus il y a un mois.
Sa mort a été calme comme celle d'une victime du CoeurCœur de Jésus. C'était bien une femme forte (Pr 31, 10). Sa vie a été toute remplie de prières et de bonnes oeuvresœuvres. Depuis des années elle ne faisait plus guère que prier. Les livres qu'elle avait toujours en mains étaient: le Manuel du S. CoeurCœur; l'Imitation; Allons au ciel; le mois de St Joseph; les prières de Ste Gertrude.
N. S. a tout fait pour la préparer lui-même. Les dernières marques de ses livres de piété l'indiquent. Elle avait dit ces derniers jours les trois salutations de Ste Gertrude à Marie pour que la très Ste Vierge vienne l'assister à sa mort: une prière pour s'exciter au désir du ciel; la prière à St Joseph pour la bonne mort…
La dernière feuille qu'elle avait cueillie à son calendrier portait le mot de Marguerite Marie: „Qu'il est doux de mourir quand on a aimé le S. CoeurCœur!”
Par une attention délicate du CoeurCœur de Jésus elle a laissé une marque au chapitre suivant: „Dieu fait le vide autour des coeurscœurs qu'il veut absorber complètement”. C'est l'adieu qu'elle me laisse!
J'ai pleuré et cependant je n'éprouve qu'une douleur mêlée d'une douce reconnaissance.
Puisse ce sacrifice être fécond pour le Règne du CoeurCœur de Jésus! C'est une grande semaine. Jésus me comble de grâces en me mettant un peu sur la croix avec lui. Vivat Cor Jesu!
Amour, abandon et confiance! Jean du CoeurCœur de J.
20. 03. 1883. B 22/11 (inv. 465. 13). P. Falleur
Cher fils in Corde Jesu,
Vous avez bien fait de m'écrire un bon petit mot. Cependant j'y trouve encore quelques jugements amers.
Que de grâces dans cette croix! Les conduites miséricordieuses du CoeurCœur de Jésus s'y touchent du doigt. Quels à-propos divins! Le jour choisi, les circonstances, la préparation de ma bonne mère, le sacrifice dans le sacrifice par mon absence. Et ses dernières prières et lectures toutes pleines d'esprit de sacrifice, d'amour de Jésus, Marie et Joseph, de désir du ciel, d'abandon et de confiance! Si j'avais été là je l'aurais certainement bien moins conseillée. Jésus n'a pas voulu qu'on gâtât son oeuvreœuvre.
Elle est morte à la même heure que St Joseph. Jésus et Marie seront venus la chercher. Elle disait tous les jours la prière de Ste Mechtilde (Gertrude?) qui oblige la très Ste Vierge à venir nous assister au moment de notre mort.
Personne n'a connu comme moi les richesses de cette âme. C'est la moitié de moi-même qui est déjà au ciel. Quelle confiance sa douce mort me donne!
J'ai été content de l'empressement de tous à m'écrire. Le pauvre P. Joseph n'a pas donné signe de vie. Usquequo gravi corde! (Ps 4, 3). Je vous bénis. + Jean du CoeurCœur de Jésus
20. 03. 1883. B 109/2 (inv. 1169. 54). Abbé Désaire (Lettre insérée en mai 2003)
+ 20 mars 1883
Bien cher ami,
Ma bonne mère qui vous aimait tant est allée hier présentée présenter au tribunal de la miséricorde divine sa vie remplie de bonnes œuvres et de prières. Un simple rhume a ramené la paralysie. Elle a reçu les sacrements. Je n'étais pas là. Notre Seigneur me demande toujours le sacrifice dans le sacrifice. Quelle mort douce et consolante ! C'est la mort d'une victime du Cœur de Jésus. Elle avait une si tendre piété. Les dernières marques de ses livres de prières indiquent que Notre Seigneur l'a préparée lui-même. Elle lisait une prière « Pour s'exciter au désir du ciel » ; les salutations efficaces de sainte Gertrude à Marie « pour obtenir que la Sainte Vierge vienne nous assister au moment de la mort » ; les prières à saint Joseph pour la bonne mort. Le bon saint Joseph a choisi le jour de sa douce mort pour venir la chercher. Une marque de ses livres me laisse comme testament le chapitre suivant : « Dieu fait le vide autour des cœurs qu'il veut absorber complètement ».
Sa mort sera féconde pour l'œuvre du Sacré Cœur. Elle avait fait notre vœu d'immolation.
Notre Seigneur me demande en ce moment beaucoup de sacrifices. C'est un consummatum est !
Puisse-t-il nous obtenir l'approbation tant désirée !
Priez avec nous. Vive le Cœur de Jésus !
Votre tout dévoué in Corde Jesu,
L. Dehon
21. 03. 1883 (de La Capelle) B 19/1. 1 (inv. 229. 14). M. Marie du SC (Servantes)
Chère Mère,
J'assiste à cette mort comme à un des mystères de la naissance de l'oeuvreœuvre du CoeurCœur de Jésus. C'est un mystère caché comme la mort de St Joseph mais il avancera l'OeuvreŒuvre.
Ma bonne mère a eu à cette OeuvreŒuvre une grande part, une vraie part de mère. Il y a quarante ans qu'elle me soutenait quotidiennement par ses prières, son exemple et ses sacrifices.
Jésus est si bon qu'il ne sait pas donner une croix sans l'entourer de consolations! Cette bonne mère ne doit pas avoir une longue purification à faire. N. S. l'a purifiée avant de la prendre. Quelle belle vie toute calme, pure, intérieure, et remplie de bonnes oeuvresœuvres.
Elle va bien nous aider. Il faut qu'elle nous donne bientôt les deux vocations promises en sa faveur: Etienne et Stéphanie. Je pense que votre bonne mère sera venue au-devant d'elle.
Cette mort avance pour moi le détachement et le consomme pour ainsi dire. Je sens ici tout ce chez moi qui m'échappe. Tout ce pays m'est douloureux à voir. Il y manque ma mère. C'est une douleur qui passera. J'aimerais à voir ici plus tard une école angélique.
Demandez cette grâce à N. S. La glorieuse martyre qui avait attiré autrefois ici tant de pèlerins nous aidera aussi à y faire venir des SoeursSœurs victimes du CoeurCœur de Jésus.
J'espère rentrer vendredi soir et vous dire la ste messe samedi, jour de l'Ecce venio (24 mars)..
Puissent tous ces sacrifices être féconds!
Amour, abandon, confiance! + Jean du C. de J.
26. 03. 1883 B 22/4 (inv. 451. 02). Mgr Gay
Monseigneur,
Le bon Mr Charles de Mantenon vous envoie les conclusions de sa retraite. Il me semble qu'elles portent le cachet de la simplicité et de la vérité.
Je l'ai laissé faire sa retraite dans le silence et à l'abri de toute influence autre que celle de la grâce. Cette question de vocation est certainement une des plus délicates que l'on puisse avoir à décider. Son attrait pour la vie religieuse n'est pas douteux. La question des aptitudes au contraire demande un sérieux examen. Il ne voit pas, lui, d'impossibilité. Il peut suivre les exercices. Il est généreux et s'adaptera de son mieux à la vie commune.
De mon côté je ne regarde pas non plus la chose comme impossible, bien qu'elle ne manque pas de difficultés. Il peut être suffisamment religieux. Il apporte quelque gêne dans la vie commune, mais cela me paraît devoir être compensé et même avec avantage, par l'édification que donnera son courage.
Sa générosité durera-t-elle? Il y a là une question que vous pouvez résoudre mieux que moi. Cela dépend en grande partie de son caractère que je n'ai pas pu assez apprécier en si peu de jours. Est-il ferme et persévérant dans ses idées? Selon les apparences, il doit l'être.
En somme, Monseigneur, comme Supérieur de communauté, j'incline à le recevoir et c'est aussi l'avis de mon conseil. Votre Grandeur décidera en tenant compte des conditions de famille que je ne puis pas connaître.
Monseigneur de Soissons doit nous donner très prochainement ses conclusions sur le rapport de la commission de Reims.
Votre Grandeur jugerait-elle à propos d'écrire à Mgr Mermillod qui doit être au Vatican pour lui parler de nous afin qu'il prépare autant qu'il est possible notre réception à Rome?
Daignez agréer, Monseigneur, l'hommage de mon respectueux et filial dévouement et veuillez offrir mes meilleurs sentiments à l'excellente famille qui vous entoure. L. Dehon.
02. 04. 1883. B 18/11bis. 1 (inv. 222. 12). Son frère Henri
Mon cher Henri,
Tu as sans cesse sous les yeux la maison paternelle qui te rappelle les pertes cruelles que nous avons faites. Tu dois souffrir plus que moi encore.
Il n'y a que les espérances de la foi qui puissent nous consoler. Que nous sommes heureux sous ce rapport! La mort pieuse de nos parents ne nous laisse pas place même pour un doute au sujet de leur salut.
Je ne puis pas résister au désir de te communiquer les lumières que j'ai reçues à ce sujet par une sainte personne qui a des révélations surnaturelles. Tu gardes cela secret. Notre bonne mère a été délivrée du purgatoire dès le Samedi Saint. Elle est maintenant auprès de Notre Seigneur et elle nous aide par ses prières. Quelle consolation pour nous!
Notre père est encore au purgatoire, bien qu'il ait déjà reçu de grands soulagements. Sa délivrance serait avancée si tu remplissais tes devoirs religieux. Les lumières sont certaines. J'en ai les preuves les plus péremptoires. J'espère que cela t'encouragera à remplir tes devoirs.
Nous ne devons pas cependant négliger de faire dire des messes même pour maman. Notre Seigneur a tenu compte d'avance de ce que nous avons promis.
Les jours passent vite. Je te laisse le soin de tout préparer pour le bout du mois. Pour le mobilier ne pourrais-tu pas préparer le partage? Fais deux lots à peu près égaux. Mets dans ton lot les meubles de salon et les meubles en palissandre qui sont trop beaux pour moi.
Embrasse pour moi Laure et les enfants. Ton frère dévoué qui t'embrasse. L. Dehon.
11. 04. 1883. B 20/2 (inv. 290. 01). Destinataire non connu
Monsieur,
Je crois que nous résistons à la volonté de Dieu en retardant l'accomplissement de la vocation de Melle Henri. Elle a depuis longtemps un désir ardent d'être au couvent. Si elle est souffrante aujourd'hui, c'est certainement à cause des impressions pénibles que lui ont fait éprouver les obstacles qui se sont élevés contre sa vocation. Je suis persuadé qu'elle retrouvera la joie et la santé quand ses désirs seront accomplis.
Je comprends votre épreuve et j'y compatis, mais la volonté de Dieu bien manifeste doit l'emporter sur les affections naturelles.
Faites généreusement votre sacrifice. Vous serez consolés quand elle vous écrira qu'elle a trouvé le bonheur; et ses prières vous aideront à supporter son absence.
Elle appartient à Notre Seigneur plus encore qu'à vous même. Ne doit-elle pas avant tout répondre à son appel? Sa présence chez vous contre le gré de N. S. ne serait une bénédiction ni pour vous ni pour elle.
J'espère que vous me remercierez plus tard du bon conseil que je vous donne. Je prie N. S. de vous éclairer et de vous fortifier. Agréez l'asurance de mon dévouement. L. Dehon.
03. 05. 1883. B 109/2 (inv. 1169. 55). Abbé Désaire (Lettre insérée en mai 2003)
+ fête de l'Ascension.
Cher ami,
J'ai bien regretté de ne pas vous voir à Paris. Je ne pouvais pas rester plus longtemps, mes occupations me rappelaient ici. Je pense que le p. de Pascal vous aura rencontré.
Notre court entretien avec don Bosco nous a fait du bien. La sainteté est vraiment un beau reflet de Notre Seigneur.
Le p. de Pascal doit être arrivé hier à Rome.
Redoublez de prières pour notre approbation.
Je compte aller lundi faire une visite à Sittard. Si votre jeune aspirant est prêt envoyez-le de suite, je l'emmènerai avec moi.
Ici on va assez bien, mais sentons que notre correspondance est trop faible pour tant de grâces.
Priez bien avec nous.
Votre tout dévoué,
L. Dehon
06. 05. 1883. B 109/2 (inv. 1169. 56). Abbé Désaire (Lettre insérée en mai 2003)
+ 6 mai 1883
Cher ami,
J'attends ce soir votre jeune novice et je le conduirai demain en Hollande.
Je voudrais que vous vissiez M. l'abbé Daurelle rue de Madame 71. Ce bon prêtre va se rendre à Rome. Il y a quelque influence et pourrait nous rendre service. Il est lui-même mêlé à des manifestations surnaturelles analogues à ce que nous avons ici. Parlez-lui de l'Oeuvre.
Le p. Sacerdos est arrivé à Rome. Il est satisfait de ses premières démarches. Prions bien.
Je prie le Cœur de Jésus de vous bénir,
L. Dehon
08. 05. 1883. B 20/7. 2 (inv. 298. 00). P. Captier
NHV XIV, 150-151NHV XIV, 150-151
Bon Père,
Je n'ai pas eu hier de courrier pour vous répondre. Votre billet était bon et je désire que vos dispositions soient un peu stables.
Ne nous donnez plus le ridicule de croire que nous prenons la Mère Véronique ou le P. Jean ou quelque autre pour juge de la dévotion au S. CoeurCœur. Nous en prenons le sens dans les paroles de N. S.
Défiez-vous de votre jugement et obéissez. Comment pouvez-vous avoir encore tant de confiance en votre jugement après toutes les influences imaginaires et diaboliques que vous avez subies depuis un an?
Soyez simple et humble, et surtout obéissant. Comme cela tout ira bien. N. S. vous éclairera lui-même si vous avez l'esprit de docilité envers vos supérieurs.
Je prie le CoeurCœur de Jésus de mettre dans votre coeurcœur le véritable amour de lui-même et des âmes, qui ne va pas sans l'humilité, l'obéissance et le sacrifice.
Vivat Cor Jesu! Jean du C. de J.
24. 07. 1883. B 109/2 (inv. 1169. 57). Abbé Désaire (Lettre insérée en mai 2003)
+ 24 juillet 1883
Cher ami,
Il y a longtemps que je n'ai eu de vos nouvelles. Je vous ai écrit à Paris et je suppose que ma lettre vous suivra en Savoie.
Quand viendrez-vous passer quelques jours avec nous ? Un petit séjour à Sittard vous eût fait beaucoup de bien. Y avez-vous renoncé ?
A Rome nous suivons tout doucement la voie commune jusqu'à présent. Cependant le Saint Père a commencé à s'intéresser à l'Oeuvre. Il a fait écrire à Monseigneur de Soissons. Je ne sais pas encore quel est l'objet de la lettre. Je suppose qu'il s'agit de mon voyage à Rome.
Le p. de Pascal a dû avoir audience hier soir.
Nous nous efforçons de bien prier le jour et la nuit dans toutes nos maisons. Puissions-nous ne pas trop retarder l'accomplissement des desseins de Notre-Seigneur par nos infidélités.
Priez bien avec nous, et ne tardez pas trop à venir nous voir.
On n'a pas pu garder le petit Goffinet à Sittard. Il a trop fait d'enfantillages. Ce n'est pas cependant une vocation perdue. Il pourra rentrer quand il aura mûri un peu.
Croyez à mon bien affectueux dévouement,
L. Dehon
10. 08. 1883 (fête de St Laurent) B 22/11 (inv. 465. 14). P. Falleur
Cher fils,
Nous avons eu ce matin une belle et bonne cérémonie mais avec de vieux scapulaires. Votre envoi n'est pas encore arrivé.
Je suis content de mon séjour. Je laisse la petite communauté dans la grâce et dans la joie du Coeur de Jésus.
J'ai relancé Watersley pour 5 ans. On va y faire quelque arrangement. Ce petit nid est ainsi assuré pour quelques années.
Vivez de règle, de silence, de travail et de prière. Ne prenez pas plus de récréation qu'on n'en a au S. Coeur. Je ne veux pas de causeries inutiles. N. S. a signalé ce danger-là pour les professeurs de St Jean en vacances. Une bénédiction à tous. + Jean du C. de J.
24. 08. 1883. B 109/2 (inv. 1169. 58). Abbé Désaire (Lettre insérée en mai 2003)
+ 24 août 1883
Mon cher ami,
Le p. Vincent m'a donné de vos nouvelles.
Vous êtes bien silencieux. Votre maladie récente vous excuse un peu. Il faudrait cependant vous tenir plus uni avec votre famille religieuse. Vous devriez m'écrire de temps en temps et passer avec nous une partie de vos vacances.
Si vous vous tenez trop à l'écart, le démon en profitera et des doutes vous viendront sur l'Oeuvre et sur votre vocation.
Priez-vous bien en union avec nous ? Dites-vous tous les jours quelquechose de nos prières ? Dites-vous de temps en temps une messe réparatrice ?
Si vous voulez avoir déjà part à l'Oeuvre autant que votre situation le permet, il faut vous donner quelque peine pour cela et bien vous tenir en rapport avec nous.
Si vous avez encore droit à quelques jours de vacances, ne manquez pas de venir nous voir.
Ecrivez-moi d'avance. Je serai absent du 1er au 8 Septembre pour ma retraite annuelle.
Croyez à mon bien affectueux dévouement,
L. Dehon
03. 09. 1883 (Mont des Cats) B 19/1. 1 (inv. 229. 15). Mère Marie du SC (Serv.)
Bonne mère,
Je vous envoie encore un mot aujourd'hui. Je n'ai encore rien reçu de vous, ce sera sans doute pour cette après-midi.
Ma retraite se continue tout doucement. Elle est bien calme. Je reconnais tout ce qui me manque, je prends de bonnes résolutions, mais je n'ai pas de grâces sensibles, sans doute parce que je n'ai pas assez de ferveur.
Le bon P. Abbé nous est très uni. Je crois que le Coeur de Jésus veut donner des grâces spéciales à ce monastère.
J'ai reçu hier une lettre de Mr Genty qui m'a un peu troublé. Il m'annonce qu'il y aura jeudi réunion à la Croix pour le cinquantième anniversaire de prêtrise de Mr Guyart et qu'on m'y attend. J'ai d'abord pensé qu'il fallait y aller. Je serais parti d'ici mercredi matin en abrégeant ma retraite d'une journée, mais finalement j'écris qu'on ne m'attende pas. Il y aura des mécontents, fiat. Je ne rentrerai que jeudi soir.
Ce matin le bon P. Abbé m'a fait parler du S. Coeur de Jésus au Chapitre des moines. J'en étais assez impressionné. Il désire que je le fasse encore demain. Je ne crois pas que N. S. en soit mécontent.
Mon estomac se plaint un peu du maigre régime de la Trappe, mais ces petites misères sont des grâces! Je voudrais bien sortir d'ici tout embrasé d'amour pour le Coeur de Jésus et que ce feu ne s'éteigne plus jamais.
A vendredi! Un bon vivat à notre chère Soeur. Vivat Cor Jesu in corde nostro unice
+ Jean du Coeur de Jésus
12. 09. 1883 (Octave de la Nativité de ND, de Rome) B 22/11 (inv. 465. 15). P. Falleur
Cher fils,
Confortare et esto vir!(1 R 2, 2). Soyez bien généreux. Cessez d'enfoncer des épines dans le Coeur de notre Jésus. Méditez ces jours-ci sur les attitudes des trois saints Coeurs. La branche de lys du Coeur de St Joseph vous dira qu'il faut commencer votre ascension par la pureté. Les roses du St Coeur de Marie vous prêcheront la charité qui comprend la ferveur dans l'oraison et la douceur envers le prochain. Les épines du Coeur de Jésus vous feront comprendre que l'immolation est le couronnement de toutes les vertus.
Je ne puis rien vous dire encore de nos affaires. Ce n'est que demain ou après-demain que j'aurai un entretien avec le commissaire du St Office. Le résultat dépend beaucoup de vos dispositions à tous.
Je réponds maintenant à toutes vos questions.
Je suppose que vous avez envoyé à Mr Tassigny-Millet à Hirson pour une veste et un gilet les boutons nécessaires. Il en demande en plus pour une capote. Dites-lui que les pardessus chez nous n'ont pas de boutons d'uniforme. C'est pour l'élève Hardet.
J'ai reçu votre première lettre hier. Je reçois la 2è aujourd'hui en même temps que celle du P. Jacques.
Faites blanchir la façade de votre dortoir et donner une couche au bois. Faites plafonner, plâtrer et paver lea carré d'entrée. Commandez de suite la barrière en bois. Il faut (deux portes en bois découpé à jour, comme on en met aux portes des cafés l'été: texte barré) une cloison vitrée complète avec un peu de verre de couleur, comme il y a, je crois, à la maison du S. CoeurCœur sur la cour.
Jean peut travailler rue Richelieu. Ecrivez au Mr de Mons en Chaussée que la plus grande réduction que je puisse faire est de prendre ses enfants à 550 francs.
Je prendrai le protégé de Mr Labitte.
Vous pouvez envoyer des pots vides pour le beurre à La Capelle. J'écrirai pour l'eau-de-vie.
Dites à Mr Legrand (confidentiellement) que Mgr pense à lui demander de faire la seconde à St Jean pour un an ou deux.
Tâchez de faire sans mes clefs. P. Paul est-il arrivé? Je compte célébrer demain à St Augustin, vendredi à la chambre de St Ignace, samedi sur le tombeau de St Louis de Gonzague et dimanche à Ste Marie Majeure. Une bénédiction et un vivat à tous. + Jean du CoeurCœur de Jésus
14. 09. 1883 (Exaltation de la Croix) B 20/12 (inv. 326. 09). P. Falleur
Cher fils,
Je reçois cette après-midi votre lettre du 12 qui en contient plusieurs autres. Je n'ai qu'un instant pour vous répondre. J'aurai encore pendant plusieurs jours de longues conférences avec qui de droit pour nos affaires. J'espère toujours être libre vers le 25.
Je suis très pressé d'avoir le Cahier des Constitutions, qui est dans la malle du P. Sacerdos. Cette malle doit vous être arrivée. Il l'a expédiée de Rome par petite vitesse il y a un mois. Envoyez-moi de suite ce cahier.
Dites au P. Paul qu'il n'y a pas de retraite de professeur.
Continuons à bien prier, à bien aimer le S. CoeurCœur de Jésus, à bien nous sacrifier. In te, Cor Jesu, speravi (cf. Ps 31, 2). Une bénédiction à tous.
Lundi je célébrerai à la chambre de St Paul de la Croix, mardi sans doute à la chambre de St Benoit Labre. + Jean du C. de J.
17. 09. 1883. (Copie manuscrite, Archives des Sœurs « Victimes », La Roche-sur-Yon, qui n'ont conservé que cette lettre que dans cet extrait)
… Il me semble que votre présence au milieu de nous vous apportera l'appoint de tout ce que la pieuse Mère Véronique et son groupe ont fait et souffert dans ce but…
Cette Œuvre que nous faisons ou plutôt que Notre-Seigneur fait par nous est si grande, si urgente et si chère au Cœur de Jésus.
(inséré le 29 janvier 2003)
18. 09. 1883. B 22/11 (inv. 465. 11). P. Falleur
Cher ami,
Je ne vois rien de bien important dans vos demandes d'aujourd'hui. Faites repeindre comme c'est convenu la façade de votre dortoir. Entre la cloison à faire et la galerie vitrée, laissez les pavés de grès.
Si la Providence vous aide, envoyez un peu d'argent à Sittard.
Soyons toujours confiants et généreux. Que nous avons été enfants jusqu'à présent! Comment N. S. ne nous a-t-il pas rejetés mille fois?
Je ne puis pas encore vous préciser mon retour. J'ai eu séance aujourd'hui. Je l'aurai probablement encore jeudi, vendredi et samedi. Que chacun prie et soit fidèle.
J'envoie une bénédiction à tous. + Jean du C. de J.
P.S.: Avez-vous eu soin de répondre à Melle Frévet que j'étais en voyage?
20. 09. 1883; B 20/12 (inv. 326. 12). P. Falleur
Cher fils,
C'est aujourd'hui l'anniversaire d'un jour sinistre, le 20 7bre, jour de l'entrée des Italiens dans Rome par la brêchebrèche en 1870. Les italianissimes ont mis quelques drapeaux. J'espère que cette journée ne sera pas aussi fâcheuse pour nous.
Je suis content de ma conférence de ce matin avec Mgr Sallua. J'aurai congé demain et j'aurai une autre conférence samedi.
J'espère toujours vous rentrer le 29 ou le 30, mais après tout, si j'étais retardé jusque dans les premiers jours d'octobre, vous feriez bien sans moi jusque là.
Préparez tout avec le P. Paul. Ne négligez rien pour la réunion des anciens. Dites à l'excellent P. Ignace d'écrire de suite à Gustave Lamour pour le prier d'envoyer une pièce de vers pour cette fête. Prévenez Mr Rigaut qu'il pourrait être appelé à présider si je n'arrive pas.
Un séminariste de Mende me manquera. Qui mettrai-je en 1è cours de français? Cherchez une combinaison avec le P. Paul. A-t-il trouvé une solution pour la 3è?
Traitez avec Bédier. J'arrangerai le reste à mon retour. Si Mr Kopff est arrivé, dites-lui que je le bénis de tout mon coeurcœur. Une bénédiction à tous. + Jean du C. de J.
J'ai reçu le Cahier des Constitutions.
Imitez bien les trois Saints Coeurs.
Le petit Jofles est-il venu? Le P. Thaddée lui a-t-il envoyé l'argent pour le voyage?
21. 09. 1883 (Fête de St Mathieu) B 22/11 (inv. 465. 17). P. Paul Philippot (St Jean)
Cher fils,
Vos dispositions sont bonnes. Vigilate et orate (Mt 26, 41). Vous avez pu croire un moment parmi les douceurs du noviciat qu'il n'y aurait plus à combattre. Détrompez-vous. „Numquam securus es in hac vita; sed quoad vixeris semper arma spiritalia tibi sunt necessaria” (Imit.)
Laissez-vous bien immoler. „Si quaeris in hac vita requiem quomodo tunc pervenies ad aeternam requiem?” Soyez prêt à tout par amour pour Jésus. „Si non ponis cor tuum fixe in me, cum vera voluntate cuncta patiendi propter me, non poteris ardorem istum sustinere, nec ad palmam pertingere beatum”.
Votre étude sur N. D. du S. Coeur a de bonnes choses. Nous en reparlerons, mais le titre de Souveraine du C. de J. est réprouvé à Rome.
Préparez tout à St Jean, j'espère rentrer le 30. Pour les chambres, je crois que nous en manquerions si vous ne repreniez pas celle que vous aviez. Comptez bien. Pour les classes, voici la meilleure solution. Donnons la 3è pour six semaines au P. Remy. Faites appel à sa générosité. Le P. Augustin s'occupera en fraude de l'Inspecteur des deux ou trois volontaires pendant ce temps-là. Je demande à Soissons un séminariste de plus pour le premier cours.
La lettre du P.Stanislas ne me paraît pas demander de réponse.
Un bon vivat et une bénédiction à tous. Prions, soyons humbles et confiants.
+ Jean du C. de J.
22. 09. 1883. B 20/12 (inv. 326. 13). P. Falleur
Cher fils,
Je suis bien étonné que vous soyez jaloux, vous à qui j'ai écrit plus qu'à tout autre. Vous vous laissez donc encore aller à vos impressions naturelles.
J'ai déjà répondu à plusieurs de vos questions. Faites peindre la façade de votre dortoir.
Il faut compter avec M. Mennesson qui est un professeur exceptionnel. S'il désire faire encore l'étude, je le laisserai faire. Ecrivez-lui. Il doit être à Urcel auprès des Ligonnès.
Je crois qu'il faut un moyen de communication entre les deux loges. La seconde loge a-t-elle sa porte vers l'entrée (sur l'entrée de cave), comme c'était convenu? Avez-vous un portier? Il en faut un absolument. Cherchez quelque brave homme qui n'aurait, outre la porte, que le nettoyage des parloirs et de l'entrée.
Faites tout le possible pour expulser Pilloy et Bédier. Si Pilloy seul quitte, il reste à Bédier une chambre dans l'escalier qui gênera tout.
Qu'on redouble de prières à la très sainte Vierge. La commission nommée par le St Père jugera notre cause mercredi. Je recevrai sans doute vendredi les termes du Modus vivendi qu'on nous donnera. Je compte partir vendredi soir et arriver dimanche dans la journée.
Invitez Gamard à la réunion, il le désire.
Je dirai toutes mes dernières messes à des sanctuaires de la Ste Vierge. Une bénédiction à tous.
+ Jean du C. de J.
24. 09. 1883. Dossier du S. Office. Mgr SALLUA (Assesseur du Saint-Office)
(ACDF, S.O., Rerum Variarum, 1884, n. 5, I)5, I)
[AD B 119/1 ; inv. 1184.01]]
+ Rome, 24 septembre 1883
Monseigneur,
Ma conscience m'oblige à ajouter quelques observations à ce que nous avons dit samedi .
1° Pour la SoeurSœur.
Ce qu'on oppose à ses prophéties n'est pas sérieux. Par exemple, pour la soeursœur de l'Hôtel-Dieu, Notre-Seigneur n'a pas dit qu'elle ferait encore de grandes choses, mais seulement qu'il lui serait accordé quelque temps pour devenir plus dévote au Sacré-CoeurSacré-Cœur. On pensait qu'elle mourrait le lundi, Notre-Seigneur lui a accordé encore quinze jours. Je pourrais compter plus de soixante prophéties de la SoeurSœur avérées, si je comptais les vocations indiquées par elle, qui se réalisent une à une depuis 5 ans et souvent par des événements providentiels extraordinaires.
2° pour le père.
Quoiqu'il en soit du passé, depuis trois ans que je le connais, il a toujours été un prêtre sage, sérieux, pieux et souvent même héroïque. Ses premières révélations avaient tous les caractères du surnaturel divin.
3° Pour moi
La Providence m'a conduit sensiblement à cette fondation depuis mon enfance. Les lumières que j'ai reçues pour cela sans avoir le caractère de révélations, ne me laissent aucun doute.
4° Pour l'Ordre en général.
Les épreuves qui sont un signe ordinaire des fondations divines n'ont pas manqué. Je puis citer la mort des parents et les épreuves de fortune pour moi et les premiers membres ; l'incendie du collège ; les trahisons ; les soulèvements de l'opinion, etc.
Il y a actuellement 70 membres sérieux, dont 16 prêtres et autant de clercs ; les autres sont des novices de 18 à 30 ans et même 40. Beaucoup d'autres âmes inclinent vers cette vocation, comme le prouvent les lettres que je reçois. J'en communique une d'aujourd'hui même à Votre Excellence. Empêcher le développement de l'OeuvreŒuvre serait jeter toutes ces âmes dans le trouble et causer un grand scandale. La maison de Hollande compte 30 membres. Les faire revenir à Saint-Quentin est impossible. Les renvoyer chez eux serait donner un immense scandale.
Voilà la vérité.
Daignez agréer, Monseigneur, l'hommage du profond respect avec lequel je suis de Votre Excellence le très humble serviteur. L. Dehon ».
24. 09. 1883 B 35/3. 4 (inv. 579. 04). Abbé Galley (texte dactylographié)
… Notre OeuvreŒuvre n'est qu'une réponse à la demande spéciale d'un culte d'amour et de réparation au Sacré-CoeurSacré-Cœur adressée par N. S. aux âmes consacrées par l'intermédiaire de la B. Marguerite Marie…
… L'esprit de sacrifice, d'abandon, de réparation est bien celui que nous inspire le Sacré-CoeurSacré-Cœur de Jésus.
Nous n'avons pas dans la Règle de mortifications corporelles, c'est l'immolation de coeurcœur et l'abandon qui constituent chez nous le principal sacrifice…
Juin ou juillet 1883 B 20/12 (inv. 326. 11). P. Falleur
Cher ami,
Vous n'êtes qu'un bien mauvais enfant, tout pétri de passions. Quand est-ce que vous commencerez à mourir un peu à vous-même?
Tous vos agissements relativement à S. M. O. sont de vrais actes de folie. Est-ce ainsi que vous m'aidez dans des jours si graves? Je sais bien que vous avez en ce moment beaucoup de préoccupations matérielles, mais est-ce que la mauvaise humeur avancera les choses?
Faites tout bien doucement, comme ferait le bon St Joseph. Pensez-vous qu'il se fâcherait? C'est une grâce pour vous d'avoir un petit surcroît en ce moment. Ne gaspillez pas cette grâce pour vous et pour l'Ordre.
A dimanche. Que le CoeurCœur de Jésus vous pardonne et vous bénisse! + Jean du C. de J.
Début octobre 1883. Mgr Sallua octobre 1883. Mgr Sallua
[Début octobre 1883]. Mgr Sallua
AD B 119/1 Inv. 1184.02
Monseigneur,
À mon retour en France, je me fais un devoir d’exprimer à Votre Excellence toute ma reconnaissance pour la bonté qu’elle m’a témoigné pendant l’examen de ma cause au Saint-Office. Je vous renouvelle l’assurance de mon entière soumission à la sainte Église et de celle de tous mes religieux et novices. Nous n’avons pas d’autre désir que le bien de la sainte Église et nous avons la confiance que la sainte Église bénira et encouragera nos efforts pour pratiquer et répandre la dévotion au Sacré Cœur de Jésus. Nous suivrons toutes les prescriptions du Saint-Office et de notre saint évêque. Je n’ai pas eu le loisir de demander à Votre Excellence beaucoup de renseignements sur le décret du Saint-Office. Le statu quo pour l’Institut s’applique-t-il aux élèves de l’école apostolique ? Quelques enfants comptaient entrer à cette école pour la rentrée des classes. Faut-il les faire attendre ? Je vous serais bien reconnaissant si vous vouliez bien me donner une décision sur ce point.
Daignez agréer, Monseigneur, l’hommage du profond respect avec lequel je suis de votre Excellence le très humble serviteur, L. Dehon Supérieur de l’Institut Saint-Jean à Saint-Quentin (Aisne)
(ACDF, S.O., Rerum Variarum, 1884, n. 5, I)
(ACDF, S.O., Rerum Variarum, 1884, n. 5, I)
[AD B 119/1 ;inv. 1184.02]]
12. 10. 1883. B 109/2(inv. 1169. 59).Abbé Désaire (Lettre insérée en mai 2003)
+ 12 Oct. 1883.
Cher ami,
Il est bien juste que je vous donne quelques nouvelles de mon voyage à Rome.
Notre cause y est bien étudiée. On y attache une sérieuse importance. Le Saint Père lui-même a choisi les Consulteurs et s'est fait rendre compte.
Le jugement sera rendu après les vacances des Congrégations. J'ai l'entière confiance qu'on nous accordera un commencement de vie, avec quelques modifications à nos Constitutions.
Il faut donc redoubler jusque là de confiance et de prières.
Vous pouvez bien penser combien j'ai été heureux de passer quelques jours à Rome. Dans les graves circonstances où je me trouvais, c'était bien bon de pouvoir prier auprès des tombeaux des Apôtres et des grands fondateurs d'Ordres, pour demander leur protection.
J'ai bien pensé à vous. Je vous dois une grande reconnaissance pour tout le bien que vous avez fait à mes parents pendant leur séjour à Rome.
Leur souvenir s'est présenté à moi bien vivement dans les divers sanctuaires où ils avaient prié avec moi.
Et vous, que devenez-vous ? Viendrez-vous encore nous voir cet automne ?
Donnez-moi bientôt de vos nouvelles.
Croyez à mon affectueux dévouement in Corde Jesu,
L. Dehon
16. 10. 1883 (Veille de Bse M. M., de St Clément) B 19/1.1 (inv. 229.16) M. Marie du SC
Chère Mère,
Merci de tout ce que vous faites pour nous. Je pensais bien que je ne ferais pas appel en vain à votre charité maternelle. Nous marquerons les 250f envoyés à Sittard sur ce que vous devez aux apostoliques.
Monseigneur est très bon pour nous. Il m'a écrit qu'il avait été édifié et réjoui de la cérémonie du 21 septembre. Il vient de m'envoyer 600 francs pour la pension d'un étudiant à Lille.
Nous avons eu tous ces jours-ci de grands besoins d'argent et des moments d'angoisses, mais j'ai bien senti que nos actes de confiance étaient entendus. Les besoins sont encore très grands. Continuez à prier St Joseph. L'oeuvreœuvre du Patronage est aussi dans la misère. Comment d'ici un an payer les dettes de Sittard? Mgr m'a dit qu'il aurait dans un an quelque chose à nous offrir pour le noviciat. Je ne serais pas étonné qu'il nous confie en même temps un séminaire à Soissons, mais il ne le dit pas.
Le P. Félix est arrivé à bon port. Nos SoeursSœurs de St Jean étaient tristes de n'avoir pas de vos nouvelles. Ne reviendrez-vous pas bientôt? Mgr vient dans huit jours. Il pourrait aller vous voir. Un bon vivat pour vous et pour nos SoeursSœurs. Je prie le S. CoeurCœur de Jésus de vous bénir, spécialement vous et notre chère SoeurSœur. + Jean du C. de J.
31. 10. 1883. Mgr Sallua
AD B 119/1 Inv. 1184.03
Excellence,
Les vacances se terminent. Je me mets humblement à votre disposition soit par correspondance, soit même par un nouveau voyage à Rome, pour les renseignements dont vous auriez besoin sur notre fondation. Je me suis appliqué à accomplir toutes les prescriptions du Saint-Office. Permettez-moi deux observations. L’objection qui m’a paru la plus sérieuse relativement aux écrits de la Sœur Marie Ignace, c’est celle qui concerne une prétendue prophétie de la Sœur au sujet de la mort d’une autre sœur… Je n’ai pas répondu complètement à cette objection parce que je n’avais pas tous les renseignements, mais maintenant il m’est facile d’y répondre. La Sœur Marie Ignace n’avait prédit que cette sœur mourrait tel jour. Vous ne trouverez pas cette prophétie dans ses écrits. Elle avait seulement eu la lumière que celles qui seraient agrées par Notre Seigneur comme victimes auraient la grâce d’être appelées à Lui un des trois jours consacrés à la Sainte Famille, les mercredi, vendredi ou samedi. Comme la Sœur Marie des Cinq Plaies était morte un autre jour, la Supérieure craignait qu’elle ne fût pas agrée complètement comme victime. C’est là tout le sens de ce qui est écrit au cahier. J’y attache une grande importance, parce qu’une seule prophétie non réalisée serait une chose grave. Pour moi, après l’examen comme avant, la vérité des écrits de la Sœur s’impose à ma conscience. J’en ai trop de preuves pour pouvoir hésiter. Je reste cependant absolument soumis à la sainte Église et j’accepterai tout ce qu’elle décidera avec la plus humble obéissance. J’inclinerai mon jugement et ma volonté selon le décret qui sera rendu.
Je crois encore devoir prier Votre Excellence de ne pas attacher grande importance aux notes envoyées en dernier lieu par Monseigneur l’évêque de Soissons sur notre Notice. Monseigneur m’a dit qu’il n’avait pas écrit ces notes avec l’intention de les envoyer et il a reconnu qu’elles sont erronées. Par exemple, pour le nombre des religieux Oblats, Monseigneur a mis en note que parmi les 60 il y avait des enfants, c’est qu’il a cru par erreur que nous comptions dans ce nombre les enfants de l’école apostolique, il se trompait.
Nous demeurons pleins de confiance. Nous avons cherché uniquement la gloire de Notre Seigneur en fondant cette œuvre et, si nous nous sommes trompés en quelques points, nous espérons que la sainte Église après avoir rectifié nos erreurs nous bénira et nous encouragera.
Daignez agréer, Monseigneur, l’hommage du profond respect avec lequel je suis de Votre Excellence le très humble serviteur,
L. Dehon
Saint-Quentin – 31 octobre 1883
(ACDF, S.O., Rerum Variarum, 1884, n. 5, I)
08. 11. 1883. Mgr Sallua
AD B 119/1 Inv. 1184.04
Monseigneur,
Je prends la liberté d’envoyer à Votre Excellence un exemplaire de la Vie et des Œuvres de la bienheureuse Marguerite Marie. Les écrits de la Sœur Marie Ignace me paraissent correspondre bien parfaitement à ceux de la bienheureuse et ils en reçoivent une grande lumière. Nous prions et nous attendons avec confiance le jugement de l’Église.
Daignez agréer, Monseigneur, l’hommage du profond respect avec lequel je suis de Votre Excellence le très humble serviteur,
L. Dehon Saint-Quentin – 8 novembre 1883
[ACDF, S.O., Rerum Variarum, 1884, n. 5, I]
[AD B 119/1 ;inv. 1184.04]
24. 11.1883.B 109/2(inv. 1169. 60). Abbé Désaire (Lettre insérée en mai 2003)
+ 24 nov. 1883
Bien cher ami,
Le p. de Pascal m'écrit que vous avez le projet de venir faire la retraite avec nous. Nous la commencerons demain matin dimanche. Venez aussitôt que vous pourrez, pour en perdre le moins possible. Ne l'attendez pas, il sera en retard.
Nous terminerons vendredi matin.
A bientôt.
Je vous embrasse fraternellement,
Votre tout dévoué
L. Dehon
Novembre 1883 B 19/1. 1 (inv. 229. 35). Mère Marie du SC (Servantes)
Bonne Mère,
J'ai reçu ce matin une lettre du Commissaire du St Office. Je l'ai ouverte avec émotion…mais ce n'est pas encore une décision. Il me remercie seulement de la Vie de la b.se Marguerite Marie que je lui ai envoyée. Il ajoute quelques mots de piété et ne parle pas de notre cause. Sa lettre est du 18. En voici du reste la traduction (de l'italien):
„J'ai reçu hier soir les deux volumes de la Vie et des Révélations de l'admirable B. Marg. Marie. Je vous en remercie vivement et je prie la Sainte de vous en récompenser par toutes sortes de grâces et de faveurs. J'ai de suite commencé à en lire quelques traits. J'ai aussi reçu vos autres lettres. Je garde bien tout ce que vous me communiquez.
En attendant priez et faites prier pour ce seul but: qu'en tout cela Dieu soit glorifié. Pour nous, nous sommes de pauvres serviteurs inutiles (cf. Lc 17, 10). Jésus a dit: ne cherchez pas d'autres maîtres et directeurs. Je suis envoyé par mon père: votre maître, votre rédempteur, votre voie, votre vie. Soyez donc humbles et dites de coeur: ama nesciri! C'est là l'antique et unique voie pour se sauver. Je me recommande à vos prières”.
Au fond, c'est une bonne lettre et qui n'indique pas trop ce que pense Mgr Sallua. Prions.
Je vous communique une lettre de Mr Vincent. Un prêtre d'Avignon m'écrit. Priez pour lui. Soyons fidèles à Jésus et à notre bonne Mère. + Jean du C. de J.
11. 12. 1883. B 18/6. 12. 2 (inv. 214. 02). Abbé Galley
Bien cher confrère,
Je n'ai pas encore le mot de Rome. En attendant, prions et affermissons-nous dans notre vocation.
Ceux de nos profès dont les vœux étaient expirés le 8 les ont renouvelés avec l'autorisation de Mgr de Soissons, qui pense que les observations de Rome ne porteront que sur des détails.
Un bon prêtre de Poitiers doit nous venir en même temps que vous. Il a déjà l'autorisation de son évêque.
Mr l'abbé Prévot est aussi à peu près décidé à se donner à l'Œuvre du Cœur de Jésus. Il n'est pas incorporé à Nîmes. Il peut disposer de lui-même quand il voudra. Pour vous, il me semble que vous devriez tâcher d'obtenir dès maintenant de Mgr de Belley l'autorisation d'entrer en religion, in tempore opportuno (Ps 145, 15), sans lui désigner la Congrégation. Vous éviterez ainsi les objections et oppositions ordinaires contre les œuvres naissantes.
Priez bien avec nous. Tâchons de hâter par nos pauvres prières le développement de l'Œuvre que le Cœur de Jésus désire si vivement.
Recevez l'assurance de mon affectueux dévouement in Corde Jesu. L. Dehon.
Novembre - Décembre 1883 B 20/12. 1 (inv. 327.01, 02 et 03). P. Falleur
(Trois billets)
327.01
Cher fils, Venez chaque semaine passer quelques heures avec le P. Barthélemy. Il en a tout à fait besoin. Faites bien observer le Règlement des enfants sous la direction du bon P. Thaddée. Pour le reste, nous verrons pendant la retraite. Courage. Prions. + Jean du C. de J.
327.02
Cher fils, J'accepte vos propositions. Il faut que vous soyez saint. La Chère Mère souffre beaucoup. Vous en connaissez une des causes. Plus de naturel! Je vous bénis in Corde Jesu. J'irai probablement demain + Jean du C. de J.
327.03
Cher fils, Ne venez plus cette semaine à moins que vous ne puissiez être ici demain pour 11 heures. Je ne serais pas fâché de vous voir à ce moment-là. Pour le dortoir, ne faudrait-il pas mettre tous les casiers par les bouts avec un lavabo au milieu? On aurait ainsi 4 rangs de lits en long. Nous en parlerons demain. Laissez le Fr. Irénée plisser son surplis. Soyez confiant, bon et vigilant. + Jean du C. de J.
20. 12. 1883 B 36/3 (inv. 630. 56) Mgr Thibaudier (copie, par le P. Dehon. L'original se trouve dans le dossier du Saint-Office, avec une annotation en marge par Mgr Thibaudier. Le texte qui suit a été vérifié sur cet original).
„Ma lettre à Mgr Thibaudier après le Consummatum est”
Monseigneur,
Votre Grandeur sait que j'ai fondé l'Institut des Oblats du Coeur de Jésus dans la seule vue de faire la volonté de Dieu et de procurer sa gloire.
Le seul désir d'étendre le règne de Notre-Seigneur, en propageant la dévotion à son Coeur sacré, et en offrant à ce divin Coeur les réparations qu'Il demandait à sa servante Marguerite Marie, m'inspira le dessein de fonder cette oeuvre. Je le mûris dans la prière. Des circonstances providentielles qu'il serait trop long de rappeler, me confirmèrent dans la conviction que cette pensée venait de Dieu. Vous savez quels encouragements je trouvais chez des hommes de Dieu auprès desquels je prenais conseil.
Je soumis mon projet à Votre Grandeur. Vous m'écrivîtes le 13 juillet 1877: „ Ce projet a toutes mes sympathies; j'y prêterai les mains dans toute la mesure où Dieu me paraîtra le vouloir; je souhaite que vous présidiez à sa réalisation ”.
(Note de Mgr Thibaudier, sur le texte original conservé au S.O. : „ Mon but principal, et de beaucoup, a toujours été le Collège catholique de Saint-Jean. Il est vrai que j'étais en même temps disposé à la préparation d'une Congrégation d'hommes que M. Dehon, fondateur du Collège, désirait vivement commencer. J'y mettais toutefois, temporairement, des conditions précises, qui n'ont pas été observées. + Odon, év. de S. et L. ”)
C'était pour moi le mot de Dieu. Je commençai. Vous savez comment je me donnai à cette oeuvre. La divine Providence m'envoya peu à peu une quinzaine de prêtres, autant de clercs et un plus grand nombre de jeunes gens qui se préparent aux saints Ordres. Plusieurs n'ont correspondu à l'attrait divin qu'au prix des plus grands sacrifices. Tous ont une vocation religieuse éprouvée.
Je crus reconnaître cent fois la confirmation de la volonté divine, tant dans les épreuves répétées par lesquelles je passai ainsi que l'Oeuvre et plusieurs de ses membres, que dans les grâces dont je fus témoin et dans les encouragements que je recevais des personnes les plus autorisées par leur science et leur piété.
Notre-Seigneur me demande maintenant de détruire ce qu'Il m'a demandé d'édifier. Je ne puis avoir un instant la pensée de résister, ce serait mille fois insensé.
Je ne puis que dire mon Fiat! Vous savez déjà combien il est douloureux. La mort le serait cent fois moins. Tout y est brisé et détruit: l'honneur, les ressources engagées, les espérances conçues ; tout l'esprit et tout le coeur qui s'étaient identifiés avec cette Oeuvre.
Mais qu'est-ce que tout cela? Ce qui me torture plus que tout le reste, c'est cette pensée à laquelle je ne puis me soustraire: Notre-seigneur a voulu cette oeuvre, je l'ai fait échouer par mes infidélités. Et je ne vois pas là seulement la perte des plus grandes grâces, mais plutôt les desseins de Dieu contrariés et la gloire qu'il attendait ravie par mes fautes. Voilà la souffrance que rien ne peut apaiser.
Maintenant, Monseigneur, je remets le tout entre vos mains, en vous demandant pardon de l'imperfection de mon obéissance dans le passé.
Votre sagesse et votre bonté sauront sauvegarder tant de vocations sacerdotales et religieuses qu'on ne peut pas briser violemment sans méconnaître le prix des âmes et de la grâce.
Nos oeuvres et particulièrement l'Institution St Jean sont engagées dans cette crise. Le discrédit qui résulterait de certaines mesures les ruinerait. Votre prudence tiendra compte de tout cela.
Pour moi, Monseigneur, je vous prie de ne pas compter avec ma personne. Je serai trop heureux si je puis par toutes les humiliations et les destructions réparer toutes mes fautes passées et en offrir à Notre-Seigneur quelque compensation.
Je ferai tout ce que Votre Grandeur m'ordonnera au nom de la Ste Eglise et à l'heure où elle le voudra.
Vous me témoignez, Monseigneur, plus de bonté et de compassion que je n'en mérite. Je vous prie seulement de m'obtenir la grâce d'être fidèle dans ces souffrances expiatrices, plus que ne l'ai été dans l'action.
Daignez agréer, Monseigneur, l'hommage de ma respectueuse et filiale obéissance,
L. Dehon. 20 décembre 1883.
(texte corrigé sur l'original conservé aux Archives du SO. Dossier „ Rer. Var. 1884/5).
Monseigneur porta cette déclaration au St Siège, qui répondit par le décret de résurrection du 29 mars 1884.