CORRESPONDANCE DU PERE DEHON: ANNEE 1893
04. 01. 1893. B 106/1 (inv. 0115 300). Aux scolastiques de Lille
(Lettre citée par le P. Dorrestein, « De spiritualitate P. Leonis Dehon » (Rome 1947, p. 137)
« Saint-Quentin, le 4 janvier 1893.
Mes chers fils,
Vous m'avez tous écrit de bonnes et affectueuses lettres pour la fête de S. Jean et pour la nouvelle année. Je réponds à tous en même temps et j'en prends occasion pour vous donner quelques conseils paternels.
Je pense bien souvent à votre petit groupe.
Vous allez commencer bientôt à nous donner quelques prêtres chaque année. Ces prêtres réaliseront-ils l'idéal que je me suis proposé ?
Notre but est bien beau, bien élevé, je vais vous le redire, comme je le redis aux enfants de l'Ecole Apostolique.
'La fin de l'Institut est de rendre au divin Coeur de Jésus, sous les auspices de la Vierge immaculée, les adorations, les louanges, l'amour désintéressé et surtout les réparations spéciales qu'il a demandées lui-même à la Bienheureuse Marguerite-Marie, dans les grandes révélations de Paray-le-Monial ; de lui dire notre amour et notre compassion dans les épanchements de l'oraison et dans nos adorations au Saint Sacrement exposé sur nos autels ; et de lui offrir nos coeurs immolés dans les travaux, les peines et les sacrifices de chaque jour et dans les ministères qui exigent le plus de dévouement et d'abnégation comme sont le soin des ouvriers et des pauvres et les missions lointaines'.
Vous êtes philosophes et vous devez comprendre que les moyens doivent être proportionnés au but. Pour atteindre une fin si noble, il faut une préparation forte et délicate à la fois. Il faut des esprits éclairés par de bonnes études, des volontés affermies par une discipline sévère et des coeurs échauffés par une oraison ardente.
Tous nos devoirs sont tracés dans ces quelques mots.
Vous devez étudier avec zèle. Comment serez-vous de bons prêtres, capables de consoler Notre-Seigneur, si votre ignorance vous fait commettre mille sottises à son service ?
Vous devez fortifier votre volonté par la discipline, par la mortification des passions, par l'obéissance et la régularité. Comment serons-nous des réparateurs, si nous restons esclaves de toutes les convoitises et de toutes les faiblesses de la nature ?
Vous devez être des hommes d'oraison, et la vie d'oraison a de grandes exigences. Elle demande d'abord la préparation éloignée qui consiste dans l'habitude de la modestie, de la mortification. Elle exige le recueillement habituel, l'union avec Notre-Seigneur vivant en nous.
L'oraison produit des fruits qui font reconnaître son état d'avancement. L'âme qui vit dans l'habitude de l'oraison conserve la douce impression de la grâce toute la journée. Elle travaille sans perdre la présence de Dieu, sans sortir de son recueillement. Elle est remplie du désir de plaire à Notre-Seigneur et de le faire aimer. Elle rapporte tout à Dieu et méprise le monde. Elle obéit facilement à son directeur et à ses supérieurs. Elle a de grands désirs de mortification. Elle aime à accomplir en toutes choses la volonté divine. Elle pratique avec perfection la charité envers le prochain. Vous reconnaissez-vous dans ce tableau ? C'est le portrait des vrais disciples du Coeur de Jésus et il faut que vous le soyez tous.
Courage donc. Mettez-vous à l'oeuvre et ne perdez plus de temps.
Je vous bénis affectueusement. Votre dévoué père, P. Jean du Coeur de Jésus ».
3. 01. 1893. B 48/4 - A (inv. 787. 17). Vicaire général de Soissons (copie dactyl.)
Monsieur le Vicaire général,
M. l'abbé Paul Boulanger s'inquiète au sujet de son autorisation de séjour hors du diocèse.
Les deux Messieurs Boulanger nous ont quittés en 1888 après la mort de leur père, pour gagner de quoi pourvoir à l'établissement de leurs jeunes frères et de leur plus jeune soeur. Ils se sont placés à Paris dans l'enseignement avec l'autorisation de Mgr Thibaudier. Cette autorisation a été renouvelée l'année suivante par Mgr Mignot, alors Vicaire général. Depuis lors, M. Paul a continué à se dévouer à sa famille, dont il a seul désormais la charge.
Il a une santé pitoyable. Il a maintenant une petite fonction bien rétribuée. Il est lecteur et commensal d'un bon vieillard de 78 ans, M. de Chabert à Saint Bonnet de Jeux (Saône-et-Loire).
Il a besoin de ses ressources. Il a encore à sa charge sa plus jeune soeur, atteinte d'aliénation mentale et pour laquelle il paie une pension mensuelle à Prémontré. Il désire un renouvellement de sa permission de séjour au dehors.
Je pense que Mgr n'y verra pas de difficulté.
Vous pourriez d'ailleurs vous renseigner auprès de ses derniers supérieurs, M. l'abbé Dalland, Ecole Bossuet et M. l'abbé Génevet, Ecole Ozanam à Lyon. Ils vous diront qu'il a une santé perdue, qu'il ne pourrait plus supporter les fatigues du ministère ou de l'enseignement, et qu'il a vraiment le poste qui lui convient, celui d'un malade qui en garde un autre.
Je vous prie d'agréer mes humbles et dévoués respects. L. Dehon.
13. 01. 1893. B 18/6. 7. 1 (inv. 209. 01). Novice Louis Weiskopf
Cher enfant,
Je suis content de la confiance que vous me témoignez. Vous avez sans doute déjà répondu vous-même à vos petites objections. Si le Père-Maître a plus d'ouverture pour d'autres, c'est qu'ils ont des peines à consoler ou qu'ils ont une nature plus expansive qui a besoin de réciprocité. Montrez-vous plus confiant et plus ouvert.
Avant tout, soyez bien intérieur. Jésus vous enseignera l'abnégation, le mépris des satisfactions naturelles, l'amour du sacrifice. Méditez bien sur les mystères de la crèche et de la Passion. C'est une grande grâce de passer là quelques mois tout occupé à étudier le Coeur de Jésus et à vous sanctifier.
Ecrivez-moi encore au besoin. Je vous suis très attaché et je serai toujours disposé à vous consoler et à vous encourager. Je vous bénis affectueusement. + Jean du Coeur de Jésus.
18. 01. 1893. B 48/4- A (inv. 787. 18). A un confrère (copie dactylogr.)
Mon cher Confrère,
Je ne puis vous refuser ce service. Vous êtes malheureux. Vous avez droit à la miséricorde de tous vos confrères.
Il n'y a pas à hésiter. Faites la petite pénitence qu'exigera l'Evêché. Ce sera sans doute un séjour de deux ou trois mois dans une communauté, puis on vous réhabilitera. Vous pourriez aller à notre maison de Hollande à Sittard.
Le chemin est par Erquelines, Charleroi, Namur, Liège, Maastricht. C'est la quatrième station après Maastricht. A Sittard vous demanderez la maison des Prêtres du Sacré-Coeur (la maison s'appelle Leyenbrock). En prenant l'express de 10h 1/2 (seconde jusqu'à Liège), on est à Sittard à 5h 1/2. Le voyage coûte une vingtaine de francs.
Ecrivez à M. Cardon pour que Mgr donne pouvoir à notre Supérieur de Sittard, le P. Prévot, de vous relever des censures afin que vous ayez le bonheur de célébrer la Messe.
Ayez courage. Priez N. D. du Sacré-Coeur qui a un beau sanctuaire à Sittard.
Votre tout dévoué L. Dehon.
19. 01. 1893. B 48/4 - A. (inv. 787. 19). Vicaire gén. de Soissons (copie dactylogr.)
Monsieur le Vicaire général,
D'après votre lettre, il me semble qu'il faut envoyer ce pauvre abbé à Sittard. Voudriez-vous régler avec Monseigneur les conditions de sa pénitence et de sa réhabilitation.
Pour qu'il ne malédifie pas nos jeunes gens à Sittard, je désire qu'il puisse y dire la sainte Messe. Voudriez-vous demander à Monseigneur pour notre supérieur de Sittard, le P. André Prévot, la faculté de le relever de l'interdit. Cela aura aussi l'avantage secondaire qu'il pourra, par ses intentions de messes, indemniser un peu son séjour.
M. Hochet est rentré à Leschelles. M. Drugbert est à Paris. Il cherche à se caser comme surveillant chez les Jésuites de la rue Lhomond.
Je vous prie d'agréer mes humbles et dévoués respects. L. Dehon.
20. 01. 1893. B 24/8 (inv. 500. 13). P. Grison
Chers fils,
J'ai vu dernièrement le jeune ménage de Fourdrain. Ils sont heureux, ils sont bien logés, ils travaillent. Je crois que M. Grison est bien là pour le salut de son âme.
Nous avons perdu une de nos vieilles Soeurs, Sr Mie de la Nativité. Priez pour elle.
Le P. Sébastien s'embarque aujourd'hui à Bordeaux. Pendant quelques mois il s'occupera de l'éducation des enfants de M. de Menezes. Les oeuvres ne sont pas prêtes.
Ménagez bien votre santé! Prenez l'exercice nécessaire et ne vous tourmentez de rien.
N'allez pas trop vite pour une école apostolique. Affermissez bien d'abord votre collège.
Vous avez dû recevoir, il y a quinze jours, l'indult pour les ordinations à Portoviejo. Je pense que tout s'arrangera maintenant facilement.
Je vous ai envoyé aussi des dimissoires pour les FF. Sigisbert et Bonifacius.
Nous serons heureux de recevoir Mgr Schumacher, s'il vient le mois prochain.
Quelqu'un de nous ira sans doute au pèlerinage et congrès eucharistique de Jérusalem.
Il y a peut-être quelque chose à faire pour une colonie agricole, mais peut-on compter sur les Manabites?
Tout notre monde travaille. Les scolastiques de Rome, de Lille et de Clairefontaine sont bien en train. Ceux qui sont dans les oeuvres consacrent leurs loisirs à la théologie et la récitent régulièrement à leurs supérieurs.
Nous avons des étudiants de licence à Rennes: les FF. Jérôme et Paul; et cinq étudiants de baccalauréat: les FF. Eugène, Ambroise, Lazare, Bernard et François d'Assise.
Faites une neuvaine en communauté à mes intentions. Gardez bien tous la paix de l'âme, la pureté d'intentions, l'union avec N. S. Ne vous agitez pas. Nous devons être des hommes d'oraison pour répondre à notre vocation. Expliquez souvent la méthode d'oraison: préparation éloignée, préparation prochaine, actes à faire.
Donnez au F. Perboyre de petits traités clairs et résumés à apprendre, pour qu'il arrive aux ordinations. Qu'il récite quelques pages trois fois par semaine à vous ou au F. Sigisbert.
Le F. Sigisbert doit vous réciter à vous un peu de théologie trois fois par semaine. C'est de rigueur pour les ordinations.
Soyez ferme en même temps que charitable et paternel. Je vous suis très attaché. Soignez-vous. Je vous reverrais bien volontiers, mais c'est bien loin! Soyons bien unis de coeur.
Je vous bénis très affectueusement. + Jean du Coeur de Jésus.
5 messes ad intentionem.
20. 01. 1893. B 19/3. C (inv. 235. 04). Baron de Sarachaga
Monsieur le Baron,
Je vous remercie des 50f que vous m'envoyez.
Merci aussi pour votre vaillante revendication des droits du Christ sur les nations. Personne n'a mieux que vous établi la thèse historique des Pactes. C'était nécessaire. Les nations chrétiennes ont oublié leur véritable naissance spirituelle.
Nous revendiquons sans cesse les droits du Christ dans la Revue, et nous rappelons sans cesse la nécessité du culte social et de l'hommage des nations au Christ. Vos encouragements nous porteront à le faire plus fermement encore. Nous allons donner un second article de M. le Comte d'Alcantara.
Agréez mes bien dévoués respects. L. Dehon.
06. 02. 1893. B 24/8 (inv. 500. 14). P. Grison
Chers fils,
J'ai reçu vos bonnes lettres et vos chères photographies, qui m'ont fait un immense plaisir. J'étais bien ému en vous revoyant tous. Tout le monde ici, à Fayet et à Fourdrain, a voulu vous voir et vous revoir. M. Grison a trouvé son fils maigri et vieilli. Le P. Topin était ému jusqu'aux larmes de revoir „son fiú, le pu vieux”.
Je pense que vous n'aurez plus de difficultés pour les ordinations avec le nouvel indult que je vous ai envoyé.
Nous pensons à remettre le noviciat ici au S. Coeur pour avoir une maison d'adoration bien organisée. Nous laisserons à Fourdrain un noviciat de Frères. Les novices d'ici iraient pour y passer les vacances. Ce n'est encore qu'un projet.
Mgr Duval nous offre l'oeuvre des Sourds-muets de S. Médard. Cela nous permettrait d'avoir à Soissons un groupe d'étudiants qui suivraient les cours du séminaire. C'est nécessaire pour ceux qui tombent sous la loi militaire.
Je suis heureux que le F. Anschaire ait passé 15 jours avec vous. Il vous reviendra un jour.
Nous recevrons bien Mgr Schumacher s'il vient nous voir. Nous lui ferons fête.
Cher F. Sigisbert: secondez bien le P. Gabriel. Il faut que vous soyez son bras droit. Vous avez maintenant les pièces nécessaires pour vos ordinations. J'espère que vous aurez dans quelques mois le bonheur d'offrir le St Sacrifice. Apprenez vos traités de théologie et récitez-les au P. Gabriel. Vous serez heureux quand vous pourrez distribuer les sacrements et sanctifier les âmes.
Cher F. Perboyre, ne vous découragez jamais. Récitez tous les jours ou tous les deux jours quelques pages de théologie. C'est peu à peu que vous arriverez, après un travail persévérant. J'ai pour vous beaucoup d'affection et je compte sur votre fidélité.
Cher F. Christophe, vous êtes le benjamin de la petite colonie. Appliquez-vous à faire la consolation de vos supérieurs. Montrez-vous toujours humble, modeste et obéissant. Apprenez chaque jour un peu de philosophie et de théologie et récitez-la régulièrement. Je m'occupe de votre Exeat pour l'ordination.
Cher F. Raphaël, vous avez comme S. Joseph à Nazareth de modestes fonctions temporelles, remplissez-les avec foi et avec dévouement. Employez tout votre temps sous le regard de Dieu. Vos parents paraissent heureux. Le F. Jérôme sera, j'espère, licencié dans un mois.
Cher F. Bonaventure, soyez bien fidèle et persévérant, vous l'avez promis au Bon Dieu. Faites voir aux Equatoriens qu'on sait faire de belles chaussures en Hollande. Faites la joie du P. Gabriel par votre docilité, votre bon esprit et votre caractère aimable et enjoué.
Je vous bénis tous bien cordialement. Soyons tous unis dans un même esprit d'amour et d'immolation au S. Coeur de Jésus. + Jean du Coeur de Jésus.
18. 02. 1893. B 48/4 (inv. 787. 20). Vicaire gén. de Soissons (copie dactylogr.)
Monsieur le Vicaire général,
Monsieur Paul Boulanger a toujours été un prêtre correct. Il n'a pas les faiblesses de son frère. Depuis qu'il a quitté St Jean, il a été professeur à l'Ecole Bossuet à Paris et dans un établissement similaire à Lyon. Je ne vois, pour ma part, aucun obstacle à ce qu'il ait ce pouvoir. Je vous prie d'agréer mes dévoués respects. L. Dehon.
Je prends la liberté de vous demander une dimissoire pour la tonsure pour un de nos étudiants de Rome. Il est de Saint-Quentin. C'est nous qui l'avons élevé. Il était licencié-es-lettres à 18 ans. C'est un de nos meilleurs sujets. Il a fait ses humanités à Saint-Clément. Il est à Rome et je désire qu'il y reçoive la tonsure à la fin du carême. Ci-joint son acte de baptême.
03. 03. 1893. B 24/0 (inv. 487. 17). Mgr Duval
Monseigneur,
Votre Grandeur va bientôt tracer probablement son itinéraire de confirmation. Je viens vous rappeler que nous comptons sur votre visite cette année. Nous avons la confirmation tous les deux ans, c'est de tradition, et nous ne l'avons pas eue l'an passé. Il paraît que vous devez être à St Quentin les premiers jours du mois de juin, nous serions heureux de vous avoir le mercredi 7 juin. Je sais que M. le curé de St Eloi ne compte pas sur votre visite cette année parce que son église est en retaurationrestauration. J'espère que vous serez libre le mercredi.
Daignez agréer, Monseigneur, l'hommage du profond respect avec lequel je suis, de Votre Grandeur, le très humble et dévoué fils L. Dehon.
10. 03. 1893. B 24/2 (inv. 429. 13489.13). Mgr Fleck, évêque de Metz (Texte imprimé)
Votre Grandeur voudra bien excuser la liberté que je prends de venir lui parler de Catherine Filljung. Je suis un peu en relations avec cette pieuse fille, parce que j'ai élevé ses neveux. Il me semble que si elle était admise à vos pieds elle obéirait humblement.
Cette pauvre fille passe par de bien grandes épreuves. Je voudrais l'aider à se tirer d'affaire en l'amenant à une soumission parfaite envers vous. Je n'interviendrai toutefois que si Votre Grandeur le juge bon et dans la mesure où Elle me le dira.
Mars 1893. B 107/3 (inv. 0116375). Léon XIII
Dans Le Règne, mars 1893, pp. 105 - 107.
Le Règne du Cœur de Jésus dans les âmes et dans les sociétés.
A LEON XIII, Pontife suprême, Docteur infaillible et Roi souverain.
Très Saint Père,
Au milieu de l'élan qui, pour le Jubilé épiscopal de Votre Sainteté, attire à vos pieds tous vos enfants, les rédacteurs de la Revue Le Règne du Cœur de Jésus revendiquent l'honneur d'avoir à ce concert d'hommages une modeste part.
Ils ne peuvent oublier que, dès le début de cette publication, Vous avez daigné la bénir ; et, dans la direction qu'ils s'efforcent de lui donner, ils n'ont rien tant à cœur que de se faire les échos de vos salutaires enseignements et les prédicateurs du dévouement absolu envers votre Personne et le Siège Apostolique.
Prosternés à vos pieds, ils viennent donc, Très Saint Père, en leur nom ainsi qu'au nom de leurs lecteurs, unir humblement leurs vœux à ceux qui, de tous les points de l'univers, arrivent à votre trône. Ils saluent en Vous le glorieux Chef que le Pasteur invisible a choisi, dans ces temps si difficiles, pour être à son Eglise un appui proportionné à la grandeur des périls ;
Le Pontife qui, par sa sagesse suréminente, a fait resplendir aux yeux des fidèles, l'autorité spirituelle qu'il représente, avec un éclat pour ainsi dire nouveau, et obtenir pour elle une plénitude de soumission plus grande peut-être qu'elle avait jamais été ; qui a forcé l'admiration des hommes même indifférents ou hostiles, et qui a reçu de leur part une unanimité de louanges qui ne s'était produite pour aucun autre Pape ;
Le Pasteur dont le regard saisit avec une perspicacité surprenante tous les maux de notre temps, avec le remède le plus apte à les guérir, dont la sollicitude embrasse d'une manière non moins merveilleuse les besoins de l'Eglise et des âmes, sous tous les cieux et dans toutes les nations, et qui unit, dans le gouvernement de l'Eglise, la surabondance des lumières avec l'onction d'une tendresse dont les effusions semblent de plus en plus touchantes ;
Le Docteur qui, en indiquant avec autorité la solution des grandes questions par lesquelles sont agités les hommes, nous rappelle sans cesse aussi que le salut, devant venir de Dieu, ne peut être obtenu sans les moyens surnaturels, et qui, pour ce motif, sans cesse convie à un humble recours à la prière et à la pénitence ;
Le Pontife enfin qui fait briller en sa propre Personne cette très profonde et très intime piété qu'il enseigne, à un point qui frappe d'une douce admiration tous ceux qui ont le bonheur d'approcher de Lui.
En saluant en Vous, Très Saint Père, tous ces titres de gloire, nous élevons nos plus vives actions de grâces vers Celui dont vous êtes le représentant et qui par là a voulu donner à l'Eglise son épouse, un secours si nécessaire ; et nous le conjurons ardemment de couronner vos efforts, en vous accordant de voir enfin la religion et la justice triompher sur la terre.
Daignez, Très Saint Père, agréer ces humbles vœux et accorder en retour une bénédiction nouvelle à cette Revue, à ceux qui la rédigent, à ceux qui l'éditent et à ceux qui la lisent, afin que, de plus en plus, sous votre haute direction, elle puisse contribuer, pour la part qui lui revient, à préparer à l'encontre de tant d'obstacles, le règne béni du Sacré-Cœur, auquel vous avez la mission de conduire le monde.
Les Rédacteurs et Collaborateurs de la Revue //Le Règne du Cœur de Jésus//.
09. 04. 1893. B 20/3. 1 (inv. 292. 18). P. Falleur
Cher fils,
Je vais à Lille mercredi, j'arriverai seulement jeudi à 4h05 à St Quentin.
Le Fr. Maximin ne doit pas partir. Il n'y a pas de place à Paillé. Le Fr. Martial y reste jusqu'au mois d'août. D'ailleurs j'ai besoin d'un professeur d'anglais à St Jean.
Contentez le Fr. Quintilien. Les bons Frères nous ont donné un autel (celui de l'oratoire) en 1877.
Je compatis à vos sollicitudes et je pense souvent à vous. Tout va bien ici et à Clairefontaine. Soyez tous bénis. + Jean du Coeur de Jésus.
17. 05. 1893. B 24/0 (inv. 487. 18). Vicaire gén. de Soissons
Monsieur le Vicaire général,
M. Lecompte [Lecomte] a été un de nos meilleurs élèves. Il a eu trois années de suite le prix d'honneur. C'est le neveu de M. l'abbé Lecompte [Lecomte], ancien doyen de Moy. Son père est un pieux tertiaire et le meilleur paroissien de Rouvroy. Je ne connais pas de jeune homme plus recommandable.
Agréez mes respectueux hommages. L. Dehon.
18. 07. 1893. B 48/4 - A (inv. 787. 21). Vicaire gén. de Soissons (copie dactylogr.)
Monsieur le Vicaire général,
J'ai bien reçu les 40 francs. Merci.
M. Bachelet est une âme faible. Il a été très convenable à Sittard parce qu'il était bien entouré. S'il retombe dans l'isolement, je crains beaucoup pour lui. Il serait mieux vicaire que curé. Il quitte Sittard en bonnes dispositions.
Je vous prie d'agréer mes respectueux hommages. L. Dehon.
22. 09. 1893. B 22/5 (inv. 453. 02). L. Delancourt
Mon cher Léon,
Je ne doute pas de ton bon coeur. Il y a longtemps que je le connais. Je sais bien que ton affection sera durable. De mon côté je te promets de ne jamais être indifférent à ton égard. Ce sera toujours pour moi une fête de te revoir, de te lire, de te savoir heureux. J'espère que tu reviendras encore quelquefois par ici. Et moi, quoique je n'aime pas le séjour de Paris, j'y passerai quelquefois.
Je n'ai guère revu ces vacances tes condisciples de philosophie, sauf les abbés. Les rhétoriciens malheureux, Poette, Ponchelet et Damage, sont ici à piocher avec M. Paris. Ils cultivent le cricket avec un grand zèle pendant les récréations. M. l'économe leur reproche de mettre la maison au pillage. C'est sans doute une calomnie, car ils ne sont pas capables de pareils méfaits.
De sombres pronostics annoncent la fin des vacances: les nuages, la pluie, la chute des feuilles et des marrons, et la rentrée de M. le préfet de discipline.
Le bon F. Nicolas, ton ami, est encore à la campagne. M. Vaillant est dans sa famille, à St Just en Chaussée (Oise). Il prend un repos bien mérité après ses succès de l'année.
Je ne suis pas au courant des exploits cynégétiques de M. Séverin. Je suppose qu'il a mieux réussi là qu'à la Sorbonne.
Je dois déjeuner lundi prochain avec ton ami Georges Demont, qui renonce au commerce des muses pour suivre les leçons de Pan et de Cérès. Il a sans doute été séduit par ce conseil de Virgile: O fortunatas nimium, sua si bona norint agricolas!…
Et toi, ne vas-tu pas te passionner pour le Digeste et pour les in-folios de Cujas et de Pothier? Je doute cependant que tu renonces entièrement à la fontaine de Castalie et aux vierges de Parnasse.
Au revoir.. Prie quelquefois pour moi le Sacré-Coeur puisque tu habites à l'ombre de la montagne sacrée. Ton ami dévoué L. Dehon.
17. 10. 1893. B 20/3. 1 (inv. 292.? 19). P. Falleur
Cher ami,
Je ne crois pas avoir rien oublié d'urgent. J'ai écrit à M. Vandenbussche.
Soyez prudent, soyez vertueux. Priez le P. Joseph de se surveiller pour ne jamais dire une parole désagréable relativement à M. Mercier. Tout se répète.
Le P. Rasset est revenu de son impression sur H. Cordonnier. Il pense qu'on peut en faire un novice. Voyez à cela, s'il y a lieu.
Pressez l'Ordo. Il est temps pour l'envoyer en Amérique.
Tout s'est bien passé à Liesse. Au revoir dans un mois. Dites le Souvenez-vous à N. D. du S. Coeur tous les jours pour moi et demandez qu'on le dise dans les maisons. Soyez bénis.
+ Jean du Coeur de Jésus.
19. 10. 1893. B 20/2 (inv. 290. 20). P. Falleur
Cher fils,
Quelques mots pressés. J'ai oublié de pourvoir à la direction des enfants de choeur. Dites à M. Mercier d'en charger le P. Henri ou un autre.
Payez le percepteur. Empruntez, s'il le faut, à la caisse de Mr Echaubard.
Rappelez au P. Paulin qu'il doit veiller à l'observation de la règle, surveiller, avertir, exiger qu'on l'avertisse et qu'on s'excuse, s'il y a lieu.
Si vous ne trouvez pas le „Jésus bénissant les enfants”, il y a un autre tableau que je désire, c'est „St Pierre pénitent”. Il y en a un beau au musée de Valenciennes. Ecrivez au directeur de ce musée pour lui demander s'il pourrait vous en faire faire une bonne copie et à quel prix.
Les PP. Jésuites me disent qu'ils ont introduit dans leurs collèges le café Kneip au lieu de l'autre le matin. C'est une économie de 75 %. Les élèves ne s'en sont pas plaints et ne l'ont même pas remarqué, et c'est plus hygiénique.
Je préfère que vous ne disiez pas la messe à l'oratoire s'il y a moyen.
Soyez toujours charitable, modeste et zélé. Tout vôtre in Corde Jésus + Jean du C. de J.
25. 10. 1893. B 20/3. 1 (inv. 292. 20). P. Falleur
Cher ami,
Quelques mots seulement. J'ai fini la première semaine des Exercices. Je suis ici très heureux et je trouve le temps très court, trop court. Ce mois passera comme une heure.
Je pense que vous allez avoir le P. Jeanroy pour prêcher la retraite. Priez-le de dire aux enfants dès l'ouverture de la retraite que je pense à eux, que je prie beaucoup pour eux, que je fais la retraite en union avec eux et que je les reverrai dans quelques jours.
Priez-le bien charitablement de vous donner les 10.000f. Donnez-lui un reçu provisoire. Je lui donnerai un reçu de ma main après la retraite. Donnez la somme à M. Lesueur.
Envoyez à Paris ce que vous recevrez de Sittard pour les messes. „Quaerite primum regnun Dei” (Mt 6, 33).
Dans vos difficultés ayez confiance. Soyez prudent, réservé, vertueux. Combattez énergiquement vos inclinations.
Sauf imprévu, je compte vous rentrer le 16 à 2h20. Cela viendra bientôt.
Un vivat à nos Pères, à Chère Mère et à nos Soeurs. Tout vôtre in Corde Jesu.
+ Jean du Coeur de Jésus.
Affectueuse condoléance à M. Poindron et sa famille.
28. 10. 1893. B 20/3. 1 (inv. 292. 21). P. Falleur
Cher ami,
Malgré mon désir de la solitude et du silence, je dois vous mettre en garde contre le trop grand zèle et la trop grande bonté de M. Arrachart. Je ne veux pas qu'il fasse faire de grands frais au Patronage pour m'offrir un cadeau. Cela me ferait de la peine. Ne le laissez pas acheter rien de fort cher. On vous demande trop. Valenciennes, n'y pensez plus. Il y a chez Schulgen, rue St Sulpice, de belles grandes gravures sur toutes sortes de sujets. Demandez-en le catalogue.
Une ou deux gravures encadrées suffisent pour le cadeau du Patronage.
Je vous dirai tout le reste le 16 nov. Un vivat à tous. Des amitiés à M. Mercier. Redoublez de confiance. N. S. ne vous laissera pas dans l'embarras. Si Mme Malézieux vous donne les 1.800f ou un acompte, cela vous aidera, vous ferez attendre le libraire. Vigilate et orate (Mt 26, 41).
+ Jean du Coeur de Jésus.
31. 10. 1893. B 20/3. 1 (inv. 292. 22). P. Falleur
Cher ami,
Le P. Gardien des Franciscains d'Amiens a dû vous voir. Il est venu me trouver. Il est venu de la part de Mgr l'évêque d'Amiens nous prier de prendre pour quelques mois dans une de nos maisons un prêtre d'Amiens, M. Caron, qui a commis quelques fautes d'intempérance. Je crois qu'on peut l'accueillir au S. Coeur. Il s'y présentera jeudi ou samedi.
Si le P. Blancal était là, je lui en écrirais, mais il doit être à Hautmond. Accueillez ce prêtre. Confiez-le au P. Augustin. Soyez discret sur ses faiblesses. Il fera les classes à nos scolastiques à la place du F. Bertrand qui doit partir pour Lille. Il paiera une petite pension par lui-même ou par son évêque.
Vous connaissez le P. Jeanroy. Il est toujours hésitant. Pressez-le doucement, charitablement de ne pas retarder ce qu'il m'a promis, et de faire cet acte de détachement. Ne le laissez pas partir sans avoir donné à M. Guérin un pouvoir régulier pour vendre ses titres, dût-il retarder son départ d'une journée.
Faites de suite un registre des professeurs bien conditionné. Mettez bien la date d'entrée pour tous, spécialement pour le P. Delloue. Vous aurez la visite de l'Inspecteur ces jours-ci. Dites-lui que je suis en voyage pour quelques jours.
Soyez mille fois béni. + Jean du Coeur de Jésus.
15. 11. 1893 (Fête de Ste Gertrude) B 20/2 (inv. 290. 21). P. Falleur
Cher ami,
Je ne vous ai pas oublié auprès de votre aimable patron lundi. Ce cher petit saint est souvent présent à ma pensée, il est représenté ici sur les vitraux.
Je sais quelle charge je vous ai laissée et je prie souvent pour vous. Ayez toujours confiance et soyez généreux. A demain. Je compte toujours arriver à 2h20. Ne préparez rien, je mangerai probablement au buffet de Laon.
Soyez mille fois béni. Un vivat à tous. + Jean du Coeur de Jésus.
15. 11. 1893. B 20/2 (inv. 290. 22). P. Falleur
Cher ami,
Je vous ai écrit ce matin pour vous annoncer mon arrivée pour demain jeudi. Mais voici un contretemps qui me retarde d'une journée. Fiat! Je comptais voir Mgr demain matin en passant à Soissons. Il m'écrit qu'il est appelé au Havre près d'un malade et qu'il remet mon audience à vendredi matin à 9 h. Je reste donc ici une journée de plus. Prenez patience comme moi. A vendredi à 2h.
Ne nous laissons émouvoir de rien (cf. Ph 4, 6). Tout ce que Dieu fait est bien fait (cf. Gn 1, 31). Tout à vous de coeur.
+ Jean du Coeur de Jésus.
14. 12. 1893. B 19/3 C (inv. 235. 06). Baron de Sarachaga
Monsieur le Baron,
Vous avez bien voulu répondre l'an dernier à un appel que je vous adressais pour notre maison de Rome. Les premières années d'une fondation sont difficiles. Je m'adresse encore à votre charité sans vouloir y mettre d'indication. Si vous pouvez m'aider, je vous serai reconnaissant. Si vous ne pouvez pas, la Providence y pourvoiera autrement.
L'oeuvre de Paray produira ses effets au temps marqué par le Bon Dieu. Les principes du règne social de Jésus Eucharistie se répandent. Ils se traduiront plus tard dans la pratique. Il faut d'abord convaincre les intelligences. Vous avez pris le bon moyen. Notre petite Revue se soutient. Agréez mes dévouyés dévoués hommages. L. Dehon.
14. 12. 1893. B 105/1 (inv. 1153.09).2 Une amie proche de la famille (Mme Maléeyzieux?)
Madame,
Vous nous manqueriez bien si vous n'étiez pas là pour la petite fête du 19. Ne devez-vous pas venir avec Marthe pour les affaires de succession? Ce serait une bonne occasion. Vous arriveriez ici le 18 pour être à la messe à Fayet le 19 à 9h.
On déjeunera à Fayet à midi. J'y invite mon frère, ma belle-soeur et mes nièces et je serais heureux si vous y étiez aussi.
Je désire avoir aussi M. Georges, puisqu'il vient à St Quentin. Ayez l'obligeance de lui transmettre mon invitation.
A bientôt, j'espère. Prenez mille précautions pour ne pas vous enrhumer. Mes respects à Madame votre soeur. Agréez mes sentiments dévoués. L. Dehon.
26. 12. 1893. B 22/3 b (inv. 456. 01). La même correspondante
Madame,
Je viens vous remercier d'être venue à notre petite fête du 19 et vous offrir en même temps mes voeux de nouvel an.
Cette année vous a apporté une grande épreuve, mais l'épreuve n'a pas été sans consolation. Quand une âme quitte la vie dans des dispositions chrétiennes, les regrets sont bien adoucis. Ce n'est qu'une séparation de quelques années et puis ce sera la réunion pour toujours.
Je me réjouis pour vous de ce séjour de Paris, quoique nous soyons privés de votre présence. Vous trouvez là bien des satisfactions religieuses et les joies de la famille. Vous pouvez voir souvent ces chers petits enfants que nous aimons tous.
Soyez mon interprète auprès de votre famille. Offez mes voeux à Mme votre soeur et à ses enfants et à la petite famille de la rue de l'Université. Je prierai tout particulièrement à vos intentions le 1er janvier. Je compte partir le 2 pour la Belgique et y rester jusqu'au 8.
Je vous prie d'agréer mes dévoués hommages. L. Dehon.