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24ème CAHIER (Octobre 1907 – Novembre 1909)

1

L'avocat Gasparri1) est venu pour quelques jours. Je l'ai promené à Paris, à Bruxelles. Il a ses épreuves. La vie dans une capitale, à Ro­me, pour un jeune homme isolé est difficile. Il a été touché de voir à Bru­xelles nos missionnaires tout disposés à partir au Congo, sans hésitation et sans tristesse.

Le 3 octobre, départ de quatre missionnaires à Anvers. C'est un grand acte toujours émouvant. - L'abbé Billet est là. Je vais le soir avec lui à Bonsecours où je célèbre la messe le 4, premier vendredi, fête de s. François. C'est là 2 que le bon Alfred Santerre2) a été appelé au ciel par le Bon Dieu.

Je vais à Sittard. La maison est toute allemande depuis le 24 sept. L'esprit est bon. Il y a seulement à resserrer la règle pour les missionnai­res. Les jeunes novices sont tout à fait bons.

Je reviens par Louvain, Manage, Mons. Il y a partout de la vie et du progrès. Mons est en fête pour la Saint-François de Borgia. Nous avons un beau salut: chants variés, harpe, tuniques blanches, cela rappelle le beau temps.

Le 13, fête de la Maternité de Marie, la Sainte Vierge accueille mes faibles prières avec miséricorde et m'aide beaucoup à sortir d'un mau­vais pas.

Le 17, je vais à La Capelle. Il y a là 3 tant de bons souvenirs qui re­lèvent ma pensée vers le ciel! Ce pauvre pays est terrorisé par le député Ceccaldi et par les délégués communaux qui constituent un gouverne­ment occulte.

Les 21 et 22, séjour à Paris avec le P. Franken et le fr. Salerni3). Je re­vois nos belles églises: Notre-Dame, le S.-Cœur, St-Sulpice, la Madelei­ne, le Panthéon, St-Etienne-du-Mont, N.-D.-des-Victoires. Que de beaux temples, de styles très variés et poussés à leur perfection! Les In­valides, le Val-de-Grâce, la Sorbonne ont de belles églises de la Renais­sance, plus achevées que celles de Rome.

Des magasins d'objets religieux se ferment à Montmartre et au quar­tier St-Sulpice. La vie chrétienne baisse en France. 4 C'est le mara­sme.

Le 24, départ de cinq de nos missionnaires à Anvers. J'ai voulu être là pour les encourager, surtout après la mort récente du P. Luc4). Ils par­tent joyeux.

Le 2, dîner chez M. Jourdain avec Mgr5), M. Parmentier, MM. Loth et les fils Jourdain. Projet de reprise de St Jean par Mgr. Attendons la loi sur l'enseignement.

Nous perdons encore un missionnaire, le P. Germain6), à Beni. Le Congo est terrible. Ces morts expient nos fautes et nous conservent la vie.

Le 4, installation du P. Lobbé7) comme curé de St-Martin8). Il y a vingt ans que nous avons commencé cette œuvre-là. Elle a eu des jours diffici­les et des accrocs pénibles. La voilà faite. Deo gratias. 5

Ayant quelques loisirs, je lis beaucoup. J'ai parcouru plusieurs ouvra­ges sur la franc-maçonnerie.

P. Deschamps: «Les sociétés secrètes» (3 vol.) avec notes et préface de Claudio Jannet. C'est une étude historique documentée. Le P. Des­champs s'est aidé des livres de Clavel, de Ragon de Eckert. Il est très do­cumenté sur l'action politique des sociétés secrètes depuis deux siècles. Les trois premiers grades sont, dit-il, la maçonnerie bleu ou symbolique. Les tenants des premiers grades ne savent rien des secrets de la secte. Les hauts grades ont pour but précis de faire régner un natura­lisme panthéistique, ennemi des religions révélées.

St-Albin: «Etudes sur la franc- maç(onnerie)». Son histoire, ses tran­sformations, son universalité. Son but secret: 6 impiété et révolution. Documents sur l'action de Mazzini.

«La franc-maçonnerie» (par un ancien Rose-Croix, chez Bloud). Même genre.

Paul Rosen: Satan et C.ie. - Insiste sur le caractère particulier des hauts grades, qui se manifeste dans les symboles: corruption, natura­lisme abject.

Voegt: «La grande duperie du siècle». Ouvrage tendancieux. Veut nous faire croire que la maçonnerie n'est qu'une coterie bourgeoise née au XVIIIe siècle, qui a flatté tous les gouvernements et qui n'a jamais conspiré. Voegt n'a sans doute connu que la maçonnerie bleue.

Rohling: «Le juif talmudiste». On y dévoile toutes les turpitudes du Talmud. 7

J'ai assez à travailler pour l'Index. Le P. Esser m'envoie trois volu­mes à analyser. Je rédige les vota en italien…

Le 21 nov. fête à Mons. C'est le 25e anniversaire de la fondation de St-Clément. Tous nos recteurs de Belgique et Hollande sont là. Messe chantée… Poésie, déclamations. C'est un réveil du vieux Fayet.

Je prends la parole au dessert, mais le souvenir de toutes les épreuves de Fayet, de tous les déserteurs, de toutes les vocations perdues me suffo­que. Je fonds en larmes. Que Dieu nous pardonne toutes nos infidélités!

Le 6, réunion de la société civile des œuvres ouvrières. Il y a huit ans que ces réunions ne se tenaient plus 8 régulièrement. L'œuvre est tou­jours prospère. Nos locaux abritent diverses associations, cercle, mutua­lité, etc. C'est le fruit de mes premiers travaux d'il y a 35 ans9). Mes col­laborateurs d'alors sont morts (M.M. Julien, Guillaume, Lecot, etc.); plusieurs sont remplacés au Comité par leurs fils: Henri Basquin, Jean Lecot; Pierre Jourdain10) est là aussi. Son père, toujours dévoué aux œuvres, a été un de nos premiers auxiliaires…

Quelques vocations sont sorties de cette œuvre et elle a aidé à conser­ver un peu de foi dans le peuple à Saint-Quentin…

Le 8, je suis à Cinq-fontaines, au fond du Luxembourg. Bénédiction de notre belle maison de noviciat. Les grandes maisons ne nous manque­ront pas, mais les palais sont bien secondaires 9 dans la vie religieuse. Puissions-nous être plus fervents, plus généreux, plus humbles.

Lectures: divers ouvrages de critique et d'exégèse. L'éditeur Nourry, un défroqué, publie toute une bibliothèque de critique composée par ses pareils. La plupart des auteurs sont anonymes.

Saintyves a plusieurs ouvrages perfides: «Le miracle et la critique», «La réforme intellectuelle du clergé», «Les Saints successeurs des dieux…». Son art consiste à exagérer, à grossir ce que la critique a de juste et de fondé pour détruire la foi. Ses livres sont dangereux.

Houtin fait de même. Il a des livres travaillés, utiles même pour qui sait s'en servir, comme son «Américanisme», mais dangereux 10 pour les lecteurs inexpérimentés.

Loriaux: «L'autorité des Evangiles»; Lefranc: «Les conflits de la scien­ce et de la foi»; Dupin: «Le Dogme de la Trinité» sont du même acabit. C'est de la critique passionnée.

Michaud: «Les enseignements essentiels de l'Evangile» et Bonnefoy: «Vers l'unité de croyance», sont des livres d'esprit protestant ou de christianisme large. Ils sacrifient le dogme pour faire l'unité.

Je me repose en lisant Jacquier: «Histoire des livres du Nouveau Te­stament», livre de critique saine qui fait honneur à la science catholique. je parcours quelques livres de la bibliothèque protestante de Fischbar­her. Une impression m'en reste, c'est qu'il y a plus de bonne foi qu'on 1111) ne pense chez beaucoup de protestants. Ces livres de ser­mons et d'ascétisme sont pieux, sincères et d'une morale élevée.

- A lire: Lichtenberger: «L'Allemagne moderne et son évolution». Etude sur l'Allemagne au XIXe siècle, son évolution politique, sociale, religieuse, économique. C'est l'histoire d'une forte race et d'un grand empire. Il y a cependant un côté faible, c'est la corruption, amenée par le bien-être.

Mes anniversaires d'ordinations et de premières messes me sont tou­jours un réconfort à cette saison de l'année. Je devrais les goûter davan­tage encore!

Je fais un dernier conseil avant de partir. Il s'y manifeste un peu trop d'esprit chauvin. 12

Je fais des adieux rapides à La Capelle. Puis vient la période des let­tres, des cartes, des visites. j'ai cependant diminué sensiblement mes re­lations.

Mort édifiante d'une bonne bienfaitrice, Mme Agombart, âme élevée et droite. Bon Noël. Le Patronage de St-Martin vient à la messe, l'esprit y est bon. Pour la St Jean, réunion de nos isolés, fête cordiale.

Je revis par les souvenirs au Brésil, où j'étais l'an dernier.

Fin d'année: Te Deum! Miserere! - surtout Miserere!

13 -1908-

Je pars le 5 pour Rome.

Deux jours à Paris. Je vois mon neveu et le duc d'Alençon au sujet des affaires du prince de Bulgarie, 112 (13) qui voudrait un pardon du Pape et qui se marie avec une protestante, la princesse Eléonore de Reuss…

Cannes, Menton, Gênes. J'aurais dû pour m'ensoleiller un peu et me fortifier, passer là quelques jours.

J'arrive à Rome le 11, et je vois de suite le P. Pie et le Card. Merry del Val12) au sujet du Prince de Bulgarie. Peu d'espoir de pardon, le Prince devra faire un mariage valide mais illicite, sur le territoire de 14 l'Em­pire Allemand.

Me voici donc encore à Rome. J'y ai reçu tant de grâces. Je vais es­sayer de les raviver. Hélas! Rome n'est plus Rome. C'est une Babel où se rencontrent les nouveaux venus (adveni) de toutes les provinces d'Ita­lie. Les coutumes anciennes, la foi simple et les moeurs patriarcales disparaissent. C'est un monde nouveau, où le Pape paraît tenir peu de place.

Notre petit groupe a bon esprit. Je travaille, j'ai à transcrire mes notes sur le Brésil. J'écris aussi quelques pages sur les Associations cultuelles et l'action maçonnique.

Je fais peu de visites. Je m'intéresse toujours aux travaux 15 publics, qui ont pour but de nettoyer un peu ma vieille Rome et de lui donner les commodités modernes. On travaille lentement et bien des choses sont manquées. Les quais sont généralement laids et malpropres.

Le monument de Victor-Emmanuel avance lentement. Il sera vrai­ment grandiose. Les abords de la gare s'égaient par de belles planta­tions. On commence enfin le pont Vittorio Emmanuele, qui remplacera l'horrible pont de fer jeté là par les béotiens du Piémont.

Le 30 est un grand jour. J'ai l'audience du Pape.

Je lui rappelle notre but intime, la réparation, et nos œuvres apostoli­ques. Il s'intéresse au Brésil, au Congo. Il faut aider, dit-il, le clergé 16 brésilien. Il espère que le roi Léopold traitera mieux à l'avenir ses pauvres sujets du Congo.

Je lui parle aussi de la Finlande. Il paraît au courant. Il comprend qu'il faudrait là une juridiction indépendante de Mohilev.

Pour la France, il nous encourage à ne pas l'abandonner, à y rester deux à deux, discrètement, à y garder un pied-à-terre. Il dit ce mot en français.

Pour le prince de Bulgarie, je fais la commission que j'ai re­çue de mon neveu et du duc d'Alençon. Je demande au St Père si le Prince pourrait avoir sa dispense de mariage mixte. C'est une affaire du St-Office, dit-il, et il y a peu d'espoir. 17 Le pauvre Prince effacera difficilement sa faute. Si sa fiancée se faisait catholique, dit le Pape, ils pourraient se marier sans dispense…

J'offre au Saint Père mon petit livre sur le Cœur sacerdotal de Jésus. Il loue le sujet. Jésus, dit-il, est bien le prêtre par excellence. Il prendra dans ce livre le sujet de ses méditations pour un mois.

Je lui rappelle les pétitions que j'ai déposées autrefois aux Rites pour la fête de s. Irénée. La question dort aux Rites, lui dis-je. Il me dit: «Je la réveillerai…».

Il m'a donné sa signature pour une image de bénédiction destinée au jeune Jean de Chavannes, dont la famille a donné plusieurs zouaves pontificaux.

Je sors très ému, comme toutes 18 les fois que j'ai le bonheur de voir le Vicaire de Jésus-Christ.

je vois plusieurs fois Mgr Benigni13) au sujet de la Finlande. Il s'y intéres­se et comprend bien les choses. Espérons que ce projet d'apostolat aboutira. Le Card. Gasparri que j'ai eu l'honneur de voir s'y intéresse aussi.

Mgr Bégin14) de Québec est ici, toujours aussi bon et aussi édifiant. Mgr Boutry15), du Puy, un autre condisciple, a aussi l'amabilité de ve­nir me voir. Le chanoine Peyron, de Quimper16), est ici aussi, un con­disciple de 1865. Nous réveillons les vieux souvenirs. Tout ce qui me re­porte à ce temps-là me fait du bien. 19

Je vois plusieurs fois le bon chanoine Scislanski de Pétersbourg. Il est peu content d'un livre récent du P. Palmieri17) sur l'Eglise russe, où on lit que le polonisme est un obstacle au retour de la Russie à l'union. Et ce­pendant il y a beaucoup de vrai dans cette assertion. Les Polonais ne ga­gneront pas les Russes, parce qu'ils voudraient les poloniser en les ga­gnant à l'Eglise.

Mois d'étude et de calme. J'ai terminé mon travail sur l'action maçonnique18). Lethielleux va l'éditer.

J'écris des méditations. Je voudrais préparer un ouvrage sur l'Année avec le S.-Cœur19).

Ce mois de calme est utile à mon âme et des jours de grâce viennent m'encourager à sortir de la tiédeur. 20

Réunion au séminaire français. Je rencontre là le nouveau nonce à Bruxelles, Mgr Tacci, qui s'intéresse à nos œuvres congolaises.

Mgr Henry20) de Grenoble est là aussi. J'apprends que les Pères de La Salette sont restés là-bas, mais isolés. Ils ont des confessionnaux dans les paroisses.

Mgr Boutry est encore là, il nous permettrait de recruter des apostoli­ques dans son diocèse.

Nous avons une réunion préparatoire de l'Index. Elle est suivie quel­ques jours après de la condamnation de Paul Bureau, Saintyves, etc. Le P. Esser me donne encore trois volumes à examiner, c'est de l'ou­vrage. Mais si je puis être utile à l'Eglise!

Mon frère arrive le 8. Il 21 passe huit jours à Rome, à l'hôtel Mo­derne, je le vois tous les jours. Avec lui et ma belle-soeur21) nous re­voyons les grands sanctuaires, les beaux sites de la ville et quelques galle­ries [galeries]. Il est clair que l'aristocratie s'en va. Les galleries [gale­ries] Borghèse et Corsini sont devenues des musées de la ville, les galle­ries [galeries] Colonna, Aldobrandini, Barberini, ont un air de décaden­ce et de vétusté. Les princes les exploitent en faisant payer l'entrée.

Le 15, nous avons l'audience. Avec quel sourire affectueux le Pape bénit notre famille!

Du 16 au 18, trois jours à Naples. Revu la Chartreuse, le musée, la cathédrale, Santa Chiara. L'état de la chapelle San Severo montre qu'à Naples l'aristocratie s'en va comme à Rome. 22

Bonne visite à Pompéi au sanctuaire et aux ruines. J'y vois toujours du nouveau. On arrange avec goût les plus belles maisons pour les conserver. Mgr Mignot22) est venu nous voir. Comme beaucoup d'autres il pro­teste contre les exagérations d'Emmanuel Barbier.

Le 29, élections des délégués pour le chapitre. Les choses ne se passent pas très bien. Patience!

Je continue à écrire à peu près deux méditations par jour. A mesure que j'avance en âge il me semble que le temps passe toujours plus vite. Je redoute le jugement de Dieu.

Excursion au mont Soratte [Soratte]. Souvenirs de s. Sylvestre. De ce côté-là la campagne romaine 23 se peuple et se cultive. Il en sera de même partout. Le tramway dessert de belles bourgades: Castelnovo, Ri­gnano, Saint Oreste, Civitacastellana. Là étaient Capena et Falères.

Le mont Soracte [Soratte] a près de 800 m. d'altitude. Il est isolé, c'est un site superbe. D'en haut, on domine toute la vallée du Tibre et le lac de Bracciano.

Dans la vallée du Tibre, des cônes isolés: Monterotondo, Palombi­na23), Montecelio. A l'est, les monts de la Sabine aux sommets neigeux. C'est une journée de bon air qui ranime les poumons.

Visite au Cardinal Lecot24). Ses jambes le portent avec peine. Il a tou­jours la même amabilité. Il nous cause de Barbier et des mutualités. 24 Bonnes visites aux Cardinaux Ferrata et Vannutelli25), toujours bien­veillants. Le Cardinal Rampolla26) reste notre ami. C'est toujours une des plus grandes figures du Sacré Collège. Je refais connaissance avec Paul Sabatier, avocat au Conseil d'Etat, le plus brillant de mes condisci­ples de droit, l'orateur aimé de notre conférence Ozanam.

Le 22 avril, Mgr Benigni me donne une solution provisoire pour la Finlande. Nous devrions nous établir là comme missionnaires apostoli­ques, avec des pouvoirs reçus de Rome. Il y aura des obstacles. Nous ne serons reconnus ni de l'autorité civile ni de l'évêché de Mohilew. Patien­ce! Attendons.

Nous avons un procès ennuyeux à Albino avec Gambarelli27). Il 25 faut toujours des épreuves pour une fondation.

Il y a en France les élections municipales. Léger relèvement, Deo gra­tias! Le bon sens va peut-être revenir.

Les monarchistes s'agitent passionnément. Le groupe Barbier, Cassa­gnac, etc. a des amis et défenseurs même à Rome. Je ne vois rien de pra­tique à espérer de ce côté-là.

Ma brochure sur la franc-maçonnerie a paru28), elle est bien accueillie, elle éclairera bien des gens.

Je travaille sans relâche à mon année de méditations29). J'ai fait quatre mois. Il me faudrait encore un bon hiver de tranquillité à Rome. Visite au Card. Vivès30). Il aime beaucoup notre mission du Congo. Je lui parle 26 de l'action sociale, du tiers-ordre et du projet de réunion à Paray. Il y est très favorable. Il dit qu'au nord de l'Espagne, les fraterni­tés agissent dans ce sens et portent l'action sociale chrétienne dans les gremios ou corps de métiers.

Le 17 et le 24, belles fêtes de béatification. Le 24, c'est la Mère Barat31). Je la prie avec confiance, elle nous aidera pour notre œuvre, qui est analogue à la sienne. La basilique de St-Pierre est splendidement décorée: huit mille lampes électriques.

Le même jour, curieuse expérience d'aviation par Delagrange au champ de manœuvres.

L'Index condamne deux livres d'Emmanuel Barbier. Ces extrémistes de droite sont insolents pour 27 le Pape Léon XIII et pour beaucoup de braves gens.

Je quitte Rome le 26. Pèlerinage à Milan à s. Charles Borromée, mes­se à la crypte.

Une journée à Albino. La petite école marchera, malgré les difficultés que suscite Gambarelli. Il n'y a que quatre enfants, mais on espère en avoir 12 ou 15 à la rentrée.

Un jour à Paris. Je ne vois que l'abbé Billet. Nos projets de patronage sont en bonne voie. Messe à N.-D.-des-Victoires. L'église est aussi fré­quentée qu'avant la persécution.

Lettre de G. Goyau32) au sujet du livre de Lecanuet qui est dénoncé à l'Index. Goyau me dit que Jean Richepin a été 28 touché de mes féli­citations. Je recommande cette âme au S.-Cœur.

Je vais de suite voir notre malade, le P. Assistant33) à Sittard. Nous prions et nous faisons prier partout pour sa guérison.

La maison de Sittard se développe et s'organise; mais le matériel et le nombre ne sont pas tout, l'important est que l'esprit de notre vocation y règne. Visite à Louvain. Trente trois étudiants, bon esprit. La maison neuve est grande, au bon air, mais un peu loin de la ville.

A Bruxelles, la maison s'est développée, il faudra agrandir la chapelle. Nous pouvons faire là beaucoup de bien.

Au Manage, dix-neuf novices bien disposés. C'est une pépinière plei­ne d'espérances. A Mons, vingt-huit élèves. C'est trop peu. L'éducation y devra être 29 plus apostolique encore et plus religieuse.

Quévy: trois Pères seulement. C'est trop peu pour qu'une maison ait de la vie. Le P. Kanters34) a été récemment arrêté et emprisonné parce qu'il allait prêcher en France. Et on dit que nous sommes en république et en démocratie!

Le 1er juillet, grande fête à Sittard. C'est le 25e anniversaire de la fon­dation. Mgr de Ruremonde officie pontificalement. Les cérémonies se font bien dans notre gracieuse chapelle. Dîner solennel, toast fort aima­ble de Mgr. L'après-midi les jeunes gens de l'école jouent César de Sha­kespeare. Le clergé de la ville et des environs est venu.

Que de souvenirs cette fête me rappelle! Il y a 25 ans 30 que je suis ve­nu là sur les renseignements d'un ancien zouave pontifical, ami du P. de Pascal35). Le voisinage du sanctuaire de N.-D. du S.-Cœur m'a char­mé. C'est la Ste Vierge qui nous amenait là comme elle avait sauvé Jésus de la fureur d'Hérode en le portant en Egypte. La piété des habitants nous offrait aussi un bon milieu pour le noviciat. Jésus a grandi en Egypte, nous avons grandi à Sittard. Que de progrès depuis 25 ans! Que de vocations! Que de maisons fondées! Si nous avions été sages, nous serions plus avan­cés encore. C'est jour d'action de grâces et de réparations.

Je vais de là faire la visite à Bergen op Zoom. Tout 31 y est en bonne voie. Il y a cependant un malade, le P. van Diepen36). N.-S. nous éprouve par ces maladies et par l'accident du P. Boeker37). C'est pour nous purifier.

Je travaille à Bruxelles pour compléter mes notes sur le Brésil. C'est encore 240 pages à écrire, cela se fera vite.

Le 15, visite à mon frère à La Capelle pour la Saint-Henri. A l'église, je me rappelle les grâces reçues: baptême, 1ère communion, prémices de mon sacerdoce. Je prie pour mes parents et en union avec eux.

Court voyage à Paris les 20 et 21. Souffrance assez vive. N.-S. se paie parfois de suite d'une faute commise. C'est un acte de bonté dont je le remercie. 32

Conseil à Sittard le 4. Visite à Heerlen au P. Assistant. Il entre en convalescence.

Le P. Glod38) a été en vain demander sa guérison à Lourdes. Il va su­bir une opération à Luxembourg. Ces souffrances de quelques uns sont nécessaires pour que N.-S. puisse nous pardonner et nous bénir. Je n'ai qu'une petite part de souffrances physiques ces temps-ci, quelques ma­laises de l'estomac et des névralgies, mais les soucis ne manquent pas: difficultés à Sittard, à Luxembourg, à Eichwald, à Quévy. Le diable s'agite assez pour troubler un peu la paix et l'ordre avant le Chapitre. La très Sainte Vierge nous protégera. Je travaille avec calme à St­-Quentin. J'écris des méditations, 33 je corrige les épreuves du livre sur le Brésil39).

Notre association réparatrice se propage dans quelques diocèses. Nous l'avons trop négligée depuis vingt cinq ans. Je charge le P. André40) de propager l'association intime de réparation.

Le 5, je passe à Bruxelles. Le 7 j'arrive à Louvain, à la maison neuve, elle s'achève. Conseil le 8. Les difficultés ne manquent pas. Cependant il est visible que N.-S. ne nous abandonne pas. Il a dit à Marguerite­Marie qu'il ne rejetterait pas ceux qui travaillent pour le S.-Cœur, mê­me s'ils ont des faiblesses. C'est ce qui se réalise chez nous depuis 30 ans. La miséricorde du S.-Cœur à notre égard a été sans limites. 34

La retraite commence le soir du 8. Le P. Floriot la prêche. Instruction Préparatoire. Pax vobis… Nolite timere [Lc 24,36]. C'est le salut de N.-S. à ses apparitions après la résurrection. Il enseigne ses apôtres, il les en­courage, il leur donne leur mission. Il va faire cela pour nous. Oui, Seigneur, pacifiez mon âme et donnez-moi la force de mieux répondre à ma mission.

1er jour. Le matin. Creatus est homo. L'homme est l'œuvre de Dieu. On peut dire qu'il sort du Cœur de Dieu, car Dieu a conçu et voulu la créa­tion par amour pour l'homme, pour lui donner la vie, le salut, le bon­heur. Donc: humilité, adoration, amour, reconnaissance, dépendance surtout: conformité à la volonté de Dieu, consécration à son service. 35

A 10 heures. Fin de l'homme. Dieu m'a créé pour le connaître, l'ai­mer, le servir. Il m'a donné l'intelligence, la volonté, l'activité. Qu'ai-je fait de ces facultés? Les ai-je appliquées au service de Dieu? Ne les ai-je pas tournées indûment vers les créatures? Déjà l'humiliation m'envahit. Qu'ai-je fait? Dieu me pardonnera-t-il? Marie, venez à mon secours.

A 3 heures. Le bon usage des créatures. C'est bien manifeste que Dieu a fait les créatures pour que nous en usions à son service. Elles nous disent sa puissance, sa bonté, elles nous aident à vivre, à expier. Tout doit être rapporté à Dieu. Que d'abus j'ai à me reprocher! Quel autre moyen ai-je pour me corriger que le recueillement habituel, la vie devant Dieu et en Dieu… 36

A 6 heures. L'indifférence à l'égard des créatures. Oui, mon Dieu, je dois me détacher des créatures et n'en faire usage que selon votre volon­té. Que d'attaches j'ai encore! Que d'inclinations naturelles trop écou­tées! Pardonnez-moi, corrigez-moi.

2e jour. Méditation. Le triple péché. Que vous avez été bon, Seigneur, de me supporter jusqu'à présent! Que d'ingratitude, que de folie dans ma vie passée. Pardon! Pardon!

A 10 heures. Nos péchés personnels. Quelle faiblesse! Quelle ingrati­tude de ma part! Quelle responsabilité! «Si iniquitates observaveris, Domine, Domine quis sustinebit?» [Ps 129,3].

A 3 heures. La confession. Confiance. «Quia apud te propitiatio est et propter legem tuam sustinui te Domine». Prêchons la confiance. 37 Nul n'est tenu à dire les circonstances, à moins qu'elles ne changent l'espèce du péché. Confiance. Nos péchés en eux-mêmes sont odieux, mais devant la miséricorde de Dieu que sont-ils? Moins qu'une goutte de fiel dans un océan de lait, moins qu'une goutte d'eau froide dans un volcan…

A 6 heures. Le péché de s. Pierre. L'apôtre n'avait pas encore la fer­veur, l'union à N.-S. A Gethsémani, il dort, il est violent contre Mal­chus sans demander avis à N.-S., il s'enfuit, puis il revient et suit de loin ut videret finem [Mt 26,58]. Il cause avec les domestiques, il se chauffe… C'est la vie naturelle. J'en suis là. J'ai imité Pierre dans toutes ses fai­blesses, il est temps que je l'imite dans sa conversion. 38 Ce que Jésus veut de moi, c'est l'union avec lui. Si je ne m'y mets pas fidèlement, il me criblera d'épreuves et de châtiments.

3e jour. Méditation. La mort. Elle vient vite. Elle est à ma porte. Le corps périra comme un arbre qu'on coupe. Et ensuite? Pardon, Sei­gneur, pour toutes mes fautes. Pourrez-vous me refuser le pardon?

A 10 heures. Le jugement. L'éternité. Il n'y a pas de doute. Je serai jugé et bientôt. Je crains, mais je veux espérer dans la miséricorde de S.-Cœur.

A 3 heures. Les obstacles: la tristesse, la tentation. La tristesse est mauvaise conseillère. Je ne l'écouterai pas, j'agirai comme si elle n'était pas là. Je connais 39 mes faiblesses, mes inclinations. Et pourquoi est-­ce que je me laisse toujours prendre au même piège par le diable? Ne vais-je pas une bonne fois me défier de lui?

A 6 heures. Le règne de N.-S. - C'est le fondement de la seconde se­maine de s. Ignace. Oui, Seigneur, vous êtes mon roi, par la création et par la rédemption. Et vous m'appelez à une croisade contre le démon, contre la chair, contre le monde. Il faut que je vous suive dans cette guerre avec les mêmes armes que vous avez prises: l'humilité, le sacrifi­ce, la charité. Jusqu'ici, hélas! j'ai trop pactisé avec l'ennemi. Dégagez-­moi, sauvez-moi, ranimez-moi pour le combat.

4e jour. Méditation. L'incarnation. Ses causes: amour et répa­ration. 40 Ses moyens: humilité et sacrifice. Ses fruits: gloire à Dieu et paix aux hommes de bonne volonté. Leçon pour moi: humilité, union à N.-S., à son divin Cœur.

A 10 heures. Bethléem. Pauvreté, détachement… pour expier… pour nous enseigner qu'il ne faut pas chercher le bonheur ici-bas dans la sa­tisfaction des sens. Le vrai bonheur est au ciel. Il faut attendre. Plus nous ferons de sacrifices comme Jésus à Bethléem, plus nous serons ri­ches en grâces et puissants en œuvres.

A 3 heures. La volonté. Une fois le devoir connu, il faut vouloir; il faut se déterminer, il faut exécuter, il faut persévérer. Ex. Jeanne d'Arc. Allez-vous donc, lui disait-on, quitter votre père et votre mère? - Quand j'aurais cent pères et cent 41 mères, disait-elle, je partirais pour faire la volonté de Dieu. - Mais Chinon est bien loin, bien loin. - Quand je devrais, disait-elle, user mes jambes jusqu'aux genoux, j'irais. - Mais vous rencontrerez les Anglais. - On bataillera et Dieu donnera la victoire…

A 6 heures. Les deux étendards. L'intention de s. Ignace est de résu­mer là toute la seconde semaine et de montrer dans l'ensemble toute la doctrine de Jésus, toutes ses vertus. Il nous montre aussi toutes les ruses de l'ennemi, ses pièges, sa ténacité. C'est en me tenant uni étroitement à Jésus que je vaincrai avec lui.

5e jour. Méditation. Nazareth: obscurité, obéissance, travail, progrès. Quelles leçons pour la vie privée et pour la vie sociale!… Pour moi, 42 c'est l'union avec Jésus qui est tout, c'est ma vie, c'est mon salut….

A 10 heures. Les trois degrés d'humilité de s. Ignace. L'élection. Pour moi. Jésus me demande le don complet de moi-même, l'abandon, la conformité absolue à sa volonté. Il faut que je meure à moi-même et qu'il vive en moi.

A 3 heures. Conseils sur la direction. Conférence sur le sacrifice com­me moyen d'apostolat. Déjà les prophètes qui annonçaient le Christ ont souffert comme le rappelle st Paul. Tels Elle, Isaïe, Jérémie… Les apô­tres ont souffert, et tous ceux qui ont propagé l'Evangile. N.-S. me de­mande le sacrifice de la régularité, du travail, de la modestie, de la pa­tience dans les peines, du support du prochain. 43

A 6 heures. Les préliminaires de la Passion. N.-S. était à Béthanie, af­fectueux, dévoué. Adieux, départ pour la Cène et la nuit terrible. Marie était là sans doute. Jésus envoie Pierre et Jean préparer la Cène, il n'en­voie pas judas l'économe. Il l'exclut d'une œuvre si sainte, et puis judas serait allé prévenir les pharisiens et la Cène aurait été troublée par l'ar­restation.

(6e jour.) Merveilles de l'Eucharistie! Souffrances morales de Jésus. Il pense aux sacrilèges futurs, à judas, à ma tiédeur. Il fait son discours sur la charité. Il va avec calme à Gethsémani selon la coutume, malgré tout ce qui le menace… Paix de l'âme, sacrifice, vie intérieure, abandon à Dieu.

A 10 heures. Le Calvaire. 44 Souffrance infinie de Jésus. Patience, résignation, douceur. Jésus s'oublie dans sa souffrance. Il pense à nous, à compléter la rédemption, à nous donner une Mère.

A 3 heures. Conférence sur la bonté. Imitons N.-S. Il a été si bon pour tous, pour les malades, pour le peuple, pour les enfants, pour ses disci­ples! S. Paul décrit la bonté: elle est bienveillante, douce, patiente. Soyons bons pour gagner les âmes, mais surnaturellement et sans mol­lesse.

A 6 heures. La résurrection du Christ. Sainte joie. Sa visite réjouit Marie et les disciples. Le Christ ressuscité ne meurt plus. Je suis res­suscité à la grâce. Je dois veiller pour éviter de retomber dans la mort. 45

Jour de clôture. Méditation sur l'amour de Dieu. Amour de recon­naissance à l'Auteur de tout bien. Amour de préférence: gloire et louan­ge. Amour de bienveillance: zèle et réparation. Amour d'union: présen­ce de Dieu, vie en Jésus, vie dans le Sacré-Cœur.

Mon exhortation: Sursum corda! Venons au Chapitre avec une grande foi. De ces journées précieuses dépend la bonne organisation de notre œuvre d'apostolat du S.-Cœur qui s'étend au monde entier. - N.-S. nous con­temple avec toute sa cour du ciel, avec les saints du S.-Cœur surtout. Ils ont soif de notre zèle, de notre sagesse, de notre amour. Ils veulent nous ai­der, n'y mettons pas obstacle. N'endurcissons pas nos cœurs. 46 Venons au Chapitre avec une grande humilité. Soyons humbles devant Dieu: humilibus dat gratiam [Jc 4,6]. Reconnaissons notre impuissance, notre faiblesse, nos fautes passées, notre indignité pour une si grande mission…

Soyons humbles devant nos frères. Ne croyons pas que nous avons le monopole de la sagesse. Exposons nos sentiments avec humilité et dé­fiance de nous-mêmes. Montrons de la déférence pour les anciens…

Venons au Chapitre avec une grande charité. On disait des premiers chré­tiens: «Voyez comme ils s'aiment». Ne faut-il pas qu'on puisse dire ce­la des prêtres du S.-Cœur, des imitateurs de l'apôtre s. Jean? Défions­-nous de ce qui divise, de l'amour-propre, de l'estime 47 exagérée de son propre jugement, des antipathies naturelles, du patriotisme outré. Aimons-nous les uns les autres.

Mettons notre Chapitre sous la protection de Marie. Elle était au Cénacle à la Pentecôte, elle y exerçait une sorte de présidence. Prenons-là pour président de ce Chapitre. Prions-là de le prendre sous sa protection ma­ternelle. C'est elle qui le rendra sage, surnaturel et fécond.

Le 15, premières réunions du Chapitre. Tout se passe avec charité et bon esprit. La statue de Marie, ornée de fleurs, préside à la salle. On adopte le matin la règle des supérieurs, des conseils, des assistants, des économes. - L'après-midi celles des professeurs et 48 des préfets d'études, avec quelques modifications. On vote l'érection des Provinces. C'est un grand pas pour la Congrégation. Puisse le Cœur de Jésus y trouver sa gloire! Ce vote est obtenu par 16 voix contre quatorze. On rè­gle ensuite les ressources de la Maison-Mère et des Maisons Provincia­les…

Le 16, organisation des Frères convers. La prière du matin est abré­gée, la retraite du mois est réglée.

Un vote important est celui du Mois de rénovation spirituelle qui se fera tous les trois ans dans nos maisons. J'en attends un bien immense. Ce sera le salut de l'œuvre.

Pour les œuvres: règles des missionnaires, des prédicateurs, des iso­lés. 49 L'après-midi, adoption de la règle des coulpes et pénitences, de la pauvreté, des vacances et des voyages.

Nous rappelons l'usage de notre salutation et de la bénédiction des su­périeurs. Un memento des faits saillants de l'année pour l'œuvre sera joint à l'elenchus.

Nous terminons le soir par le chant du Magnificat et le salut en remer­ciant le S.-Cœur et la Sainte Vierge qui ont béni ce Chapitre malgré ses imperfections.

Au retour, j'écris la lettre circulaire, je revois les règlements adoptés au Chapitre, tout cela va s'imprimer.

Quelques misères, névralgies, abcès, cela paie les dettes spirituelles. Le placement se fait péniblement, comme tous les ans. 50

Le 22, c'est la vêture et le 23 la profession au Manage. J'achève de donner la retraite aux jeunes gens et je reçois leurs engagements, Ce sont de bonnes journées. Toutes ces jeunes âmes sont bien disposées. Le 25, je reçois les voeux perpétuels de quelques-uns et la rénovation des voeux des autres. Puissé-je donner au Cœur de Jésus une infinité de vrais oblats!

Le ler, départ pour Rome. Retard des trains, coucher à Dijon. Le 2, coucher à Gênes. Ces hôtels ont parfois un triste monde. Le bruit qu'on y fait ne permet guère d'y dormir.

Le 3, arrivée à Rome. Je salue la nouvelle Jérusalem, la cité des Pa­pes, des apôtres, des martyrs et des saints.

Rome 51 parle à l'âme plus qu'aucune autre ville du monde. C'est la cité sainte. Elle a les mystères et souvenirs de la crèche et de Bethléem à Ste-Marie-Majeure. A S. Jean, ce sont les mystères eucharistiques, c'est le Cénacle avec la table de la Cène et les ordinations. A Ste-Croix, c'est le Calvaire. A S.-Pierre, c'est la gloire, c'est la résurrection, c'est le ciel. La coupole est belle comme la voûte céleste. Les anges y habitent. Les saints sont là glorifiés dans leurs reliques et leurs images.

Le mardi 7, belle audience du Pape avec Mgr Grison41). Pie X se mon­tre bon comme un père. Il nous parle de la mission, de ses progrès, de ses 52 difficultés; de l'administration belge; des bonnes Soeurs Mis­sionnaires qu'il estime beaucoup. Il parle de l'avenir de la Belgique, de l'union nécessaire, surtout à Liège. Il donne à Mgr une belle croix ornée de filigranes et de pierreries.

Le 11, c'est la belle fête du sacre, à la chapelle Ste-Hélène chez les Soeurs franciscaines missionnaires. Le Card. Gotti42) fait le sacre, assisté de Mgr Gilbert et de Mgr Virili. L'Archevêque russe Symora est là, puis le Ministre de Belgique, le prince Rospiglisi, etc. L'élu promet d'obser­ver les vertus chrétiennes, en particulier l'humilité et la patience. Il pro­met d'être affable et miséricordieux envers les pauvres, les étran­gers 53 et tous ceux qui sont dans le besoin.

L'évêque est juge de la foi: Episcopum oportet judicare, interpretare, consa­crare, ordinare, offerre, baptizare et confirmare.

La préface est superbe, elle rappelle la consécration d'Aaron et les pouvoirs de l'évêque. L'onction est comparée à celle de David. La crosse est la houlette du pasteur.

L'anneau est un mystère de force et un signe d'alliance avec l'Eglise de Dieu.

La mitre est un casque de défense et de salut. Ses deux cornes indi­quent qu'il doit tirer sa force de l'ancien et du nouveau Testament. Les gants rappellent ceux qui valurent la bénédiction à Jacob. Le symbolisme liturgique est 54 rempli de poésie.

Après la cérémonie, le rinfresco.

Dîner chez le Cardinal avec les Evêques, le gentil homme de cérémo­nie et quelques prélats. Le Cardinal reçoit comme dans le meilleur mon­de. Il édifie par sa piété, sa gravité. Il récite les prières avant et après le repas avec la formule religieuse.

Le 13, dîner au séminaire français, nous recevons Mgr Gilbert43), Mgr d'Olinda44) et une vingtaine d'invités. Aimables toasts de Mgr Grison et du Père Supérieur de Santa Chiara.

Le 14, nouvelle audience. Le Saint-Père est affable et paternel. En bon latin, il comble Mgr de bénédictions. Il me dit ce petit mot significa­tif: Che bello 55 vescovetto che abbiamo fatto!

Le 23, nous avons des départs pour le Brésil. A Bordeaux s'embar­quent les Pères Maximin, Pedro Graaf et Bernardo Wedemeyer45); à Brême s'en vont les Pères Mâller, Stolte, Fischer et Baumhoff46). Ces dévouements sont une grâce pour l'œuvre.

Le dimanche 25, Mgr Grison visite Albino. Il distribue 2.000 commu­nions et préside les offices et la procession.

Le 28, exhumation du fr. Raphaël Picard47). C'est une scène impres­sionnante. Le cercueil est enfoncé. Il reste de pauvres ossements dans une soutane roussie. Le crâne qui paraît large a gardé une tignasse de cheveux blonds. Tous ces os remplissent une 56 cassette de zinc, qui attendra la compagnie d'autres cadavres dans le nouveau caveau.

J'apprends que le 26, le commissaire Gabrielli est allé de nouveau enquê­ter à Fayet. Nous avons encore les honneurs et la grâce de la persécution.

Il me reste une quinzaine de jours pour mon travail calme et recueilli sur les méditations de l'Année du S.-Cœur. Ce travail est une grâce, j'y trouve un grand profit spirituel.

Quelques nouvelles troublantes me viennent d'Albino. Nous sommes là poursuivis par un vilain personnage et ses amis.

Autres difficultés avec les isolés de la Meuse. Il faut porter sa croix quotidienne.

Le 6, nous recevons l'indult pour la fondation des provinces, je prie pour que cela aide au règne du 57 Sacré-Cœur.

J'apprends le 10, que Mgr l'Evêque de Bois le Duc autorise la fonda­tion du noviciat hollandais à Asten.

Je vois Mgr Benigni, il est toujours désireux de voir la mission de Fin­lande se développer.

Mgr Gilbert vient fort aimablement nous voir.

Mgr Nowak, Evêque auxiliaire de Cracovie vient aussi m'assurer de sa bienveillance pour caser le P. Buks a Cracovie.

Mgr Radini est toujours favorable à l'œuvre d'Albino.

Quelle belle fête le 16! Messe d'or du Pape. Messe pontificale. Il y en a eu si peu depuis 1870. 34 cardinaux, 268 évêques. Tout l'apparat d'autrefois. La basilique de S.-Pierre est 58 comble. J'assiste à toute la messe qui est en grande partie en plain-chant. On n'avait jamais vu cela sous Pie IX. La musique raffinée y régnait sans partage.

Prier à S.-Pierre, c'est toujours bien doux. S.-Pierre a une grâce de mystère glorieux.

Retour le 17. Arrêt à Savone. Cathédrale majestueuse. Un petit S.-Pierre. Une journée à Nice avec le Bon Père Harmel48) et le P. Char­cosset49). La Providence a ménagé sur cette côte un paradis terrestre pour reposer les malades.

Le Bon Père est toujours un exemple de zèle. Il ne perd pas le temps. Nous causons des œuvres du Val et de celles du Brésil.

Quelques heures à Paris chez, 59 M. Billet, aumônier de Bon­-Secours. Nous pourrons avoir un pied-à-terre à Paris, mais qu'est-ce que cela en regard des œuvres que nous devrions avoir en France!

Je rentre à St-Quentin le 22. Le P. Falleur est occupé à Bergame à re­vendre la maison de N.-D.-de-Guadalupe au sieur Gambarelli qui nous a fait mille misères50).

Ici, la persécution ne chôme pas. Notre appel pour des vocations dans les semaines religieuses a mis en émoi le parquet d'Amiens et la préfec­ture de l'Aisne qui font une enquête pour savoir si nous n'avons pas re­constitué nos œuvres. La Franc-maçonnerie a toutes les bassesses de ju­das et de Pilate.

Le 28, je me rends à Bruxelles, où je retrouve mon cher Vicaire apostolique51). 60

Le 30 a lieu le conseil. Nous nommons les dignitaires de la Province orientale: les Pères Boeker, Peters, Jonkman, Wiese, Tillmann52).

Le 7, nouveau conseil pour réorganiser la maison de Quévy. Il nous faudrait cependant quelques groupes français.

Le 8, belle ordination à Louvain par le cher Vicaire apostolique53). Les ff. Bunn et Guillaume54) sont prêtres.

Première messe du P. Guillaume à Namur, le 9, chez nos chères Soeurs-Victimes. Nous nous unissons de plus en plus à ces bonnes Soeurs. La Providence dirige tout cela. Les Soeurs-Servantes du Cœur de Jésus ont eu pour nous un rôle de précurseurs. Elles ont accompagné nos premiers pas. Celles de Namur seront comme 61 les saintes fem­mes qui ont accompagné Jésus à son sacrifice.

Fête de famille le 10 à Mons. Messe du jeune prêtre. Soirée récréative.

19 - 20 décembre. 1868 - 1904 (1908). Anniversaires d'ordination et de première messe.

40 ans! C'est tout un monde. Que de grâces reçues! Quatorze mille six cents messes, environ. Comme je devrais être consommé en N.-S.!

Je rougis des grâces perdues. Comment ai-je pu rester si pauvre en vi­vant au milieu de tant de richesses spirituelles! J'ai fait l'enfant prodi­gue.

Maintenant ma carrière ne sera plus longue. Comment racheter le passé? Autant que je peux, je puise dans le trésor infini des mérites de N.-S. pour tout réparer, pour payer toutes mes dettes spirituelles.

Il y a quarante ans, c'étaient de 62 beaux jours à Rome, avec toutes les joies. N.-S. m'encourageait, mon père revenait à Dieu, ma mère était profondément émue. J'étais entouré d'amis55).

Mon Dieu, donnez-moi le temps et la grâce de pleurer toutes mes fau­tes. - O Marie, je vous ai bien attristée! Vous comptez sur moi pour travailler à la gloire et à la consolation de N.-S.; j'ai souvent défailli. Pardonnez-moi et relevez-moi. Rendez-moi votre amitié maternelle.

Le Noël se fait modestement dans notre petite chapelle. Je demande à N.-S. de nombreuses vocations pour l'œuvre.

Le 27, S. Jean. Petite réunion de fête avec Mgr Grison. Quam bonum et quam jucundum habitare fratres in unum! [Ps 132,1].

Le 30, j'apprends le mort du P. Wulfers noyé par accident à sa mission56). C'est 63 encore un vaillant missionnaire de moins. Il faut donc beaucoup de vies pour racheter ces pauvres noirs!

L'année s'achève. N.-S. a été encore bien miséricordieux, bien pa­tient, et moi bien ingrat. Je suis bien confus, bien humilié, mais ma vo­lonté est souvent faible. Je vais recommencer encore. Adjuva me Domine!

64 1909

Visite à La Capelle.

Correspondance. - Mes souhaits à N.-S.: Aimé soit partout le S.-Cœur de Jésus. Loué, adoré et remercié soit partout et toujours le S.-Cœur de Jésus!

Conseil le 6. Décisions importantes. Election des dignitaires de la Pro­vince occidentale. P. André, provincial. P. Van Halbeck, assistant. - Conseillers, les PP. Mailler, Brovillé, Hermans57).

Le P. Jacquemin58) sera maître des novices.

Le même jour, c'est la réunion d'adieux à Bruxelles. Mgr Grison va s'embarquer le 10 à Marseille avec le P. Lambert59). Ils passeront devant les ruines fumantes de Messine.

Les PP. Kohl et Bunn60) s'embarqueront à Anvers avec deux frè­res. 65

J'écris une lettre circulaire pour annoncer l'organisation des Provin­ces. Des difficultés surgissent, des mauvaises nouvelles me viennent de Bruxelles, de Clairefontaine, de Munich. Il faut bien des souffrances pour acheter des grâces.

Je pars pour commencer le mois de rénovation à Louvain le 16. Un mois d'instructions à donner. Il y en aura 86. Le Cœur de Jésus m'aide­ra. Je trouve les jeunes gens bien disposés.

Le 18, j'apprends qu'un affreux scandale sacerdotal a été commis à Tergnier. Seigneur, ayez pitié de ce malheureux dans votre infinie misé­ricorde.

Je parle trois fois par jour, c'est un gros travail. Il y aura des grâces pour moi comme pour mes auditeurs. 66

Conseil à Louvain le 25. Quelques difficultés à Manage et ailleurs, il y a des grâces à acheter.

N.-S. me broie au souvenir de toutes mes fautes. Je voudrais me ca­cher à la Chartreuse.

Quelques difficultés encore, mais la grâce agit visiblement. Le diable est mécontent et s'agite là où il trouve de la correspondance.

Notre grand mois s'achève le 20. Nous faisons la rénovation générale des voeux: fête touchante. La retraite a touché tous les cœurs, j'espère que les fruits seront durables.

Je rentre à St-Quentin le 20. J'écris toujours des méditations. Conseil à Bruxelles le 26. Projet de constructions de chapelles à Trois­Vierges et à Bruxelles. - Nous reprendrons une maison de famille à Te­plitz. 67

Je retrouve mes vieilles notes de voyage à Teplitz en 186561).

Le 27, le mois de rénovation commence à Luxembourg. Mais la grippe y sévit. C'est un désastre la première semaine. Il y a jusqu'à quinze malades au lit en même temps. Puissent ces petites souffrances être salutaires!

Tout le mois se déroule dans le travail de la prédication. Je reconnais ma faiblesse. Je ferais infiniment plus de bien, si j'avais mieux cor­respondu aux grâces que N.-S. m'a prodiguées depuis mon enfance. Mes méditations sur la vie intérieure sont faibles.

Il y a ici, comme en d'autres maisons, quelques âmes bien innocentes, qui sauvent notre congrégation.

Le 6, nous obtenons de Rome 68 un rescrit pour les quêtes, qui nous sont si nécessaires.

Le 14, j'entre dans ma 67e année. Que de réflexions sur les grâces per­dues! Puissé-je racheter le temps!

Je réveille mes souvenirs sur les commencements de l'œuvre. Quels assauts lui a fait subir le démon! De 1881 à 1884 surtout, quelles épreu­ves fondent sur moi et sur l'œuvre! L'incendie, la mort de mes parents, le dettes, la perte de l'héritage de Sr Marie des Cinq Plaies, les illusions du P. Captier, mon état maladif et mes crachements de sang répétés, et pour couronner le tout, la condamnation de l'œuvre à Rome pour un temps. - Ce sont là des signes de la divinité de l'œuvre62).

Je me rappelle aussi les secours spirituels que j'ai reçus pour la 69 fondation de l'œuvre. Nos Soeurs de St-Quentin ont eu une mission maternelle, usque ad praefinitum tempus [Gal 4,2], jusqu'en 188463).

La sainte Mère Marie Véronique64) et ses victimes à Villeneuve avaient prié et souffert pour l'œuvre des prêtres. Elles m'envoyèrent le P. Prévot, le P. Charcosset, le P. Galley65).

Plusieurs communautés, avides de voir se former une œuvre répara­trice de prêtres, m'avaient accordé l'union de prières et de sacrifices, tel­les: l'Adoration réparatrice, rue d'Ulm; les Filles du Cœur Eucharisti­que, rue Nicolo; les Victimes du S.-Cœur de Marseille; les Filles du Cœur de Jésus de Marseille et d'Anvers; la Visitation de Paray.

Plus tard, je fus encouragé encore par les Dames du S.-Cœur, par les Clarisses de Talence; les Soeurs du Sauveur de la 70 Souterraine; les Soeurs du Verbe Incarné; les Dominicaines de Bar; celles de Luxem­bourg.

En commençant, j'étais en relations avec tout le mouvement de répa­ration qui régnait à Grenoble. Mgr Jourdan de la Passardière66) était ve­nu me voir.

En 83, Don Bosco et Louise Lateau67) m'encouragèrent vivement. Mgr Gay, à mon appel, suscita l'œuvre de réparation dans le clergé68). La sainte Ame qui avait à Montbard des vues sur le Cœur pénitent de Jésus m'encouragea aussi.

J'étais en correspondance avec la fondatrice de la Garde d'honneur de Bourg69).

Le P. Villabard, jésuite, m'avait mis en relations avec la pieuse per­sonne qui avait des vues sur le Cœur 71 miséricordieux de Jésus. J'ai vu aussi la voyante de Pellevoisin70).

Puis-je douter que notre œuvre est de Dieu, après tous ces encourage­ments? J'ai tout gâté par mes péchés, le S.-Cœur a tout sauvé par sa mi­séricorde.

Quelques nouvelles de Louvain m'attristent. Le diable y travaille après la retraite.

Je corresponds avec M. le curé de Bois d'Haine. L'opinion redevient favorable à Louise Lateau en Belgique. Mgr l'Evêque de Tournai pense à la béatification. C'est une consolation et un encouragement pour moi. Je l'ai vue en 1873 et 1883. J'ai eu foi en ses grâces, elle m'a bien encou­ragé pour notre œuvre. 72

Départ pour Rome le 2.

Je passe deux jours à Albino. Nous avons là un beau terrain qui domi­ne la petite ville; mais deux entrepreneurs se disputent l'honneur et le profit de nos constructions, cela s'arrangera.

Arrivée à Rome le 7, mercredi saint.

Je sors peu, je complète mon petit travail sur la vie d'union à N.-S. Le 18, grande journée: béatification de Jeanne d'Arc71). Elle a été pour la France ce que Esther, Judith, les Macchabées ont été pour le peuple d'Israël. Dieu voulait garder la France catholique pour se servir d'elle dans le monde. 73 La France, demeurée catholique a lutté contre le protestantisme, elle a donné au monde son grand siècle littéraire chré­tien, avec un grand nombre de saints, d'ordres religieux, et des mission­naires à l'infini.

Sans Jeanne d'Arc, la féodalité anglaise et le clergé affadi d'Angleter­re nous auraient conduits au protestantisme.

Le 19, audience des pèlerins à St-Pierre. L'église est comble. Nos pè­lerins français chantent comme à Lourdes. C'est une cérémonie inou­bliable.

Mgr Perriot vit avec nous quelques jours.

Je commence le 20 à faire faire le mois de rénovation à nos Ro­mains. 74

Le 25, nouvelle fête de béatification, c'est pour le vén. Jean Eudes72), un saint du S.-Cœur, un de nos modèles. J'y prends part de tout cœur, et je lui recommande bien notre œuvre.

On me communique une liste de causes de béatifications et de canonisa­tions pendantes. J'y vois beaucoup de causes françaises (pauvre France!), beaucoup de causes de religieux, une quinzaine de causes de fondateurs et de fondatrices. J'aurais dû me faire saint. Seigneur, pardonnez-moi!!

Le 2 mai, autre béatification: Théofane [Théophane] Vénard73) et d'autres missionnaires et martyrs du Tonkin et de Chine. Je les prie pour nos missions.

Je continue à faire faire le mois de rénovation. Puissé-je en profiter le premier. Les lumières ne me manquent pas, mais je suis 75 si faible! L'union à N.-S., c'est la direction par excellence. Je veux de nouveau y être assidu. Seigneur, aidez-moi!

J'ai été blessé par votre amour et vous m'avez tenu longtemps uni à vous; mais ce n'a pas été sans intervalles, à cause de mon inqualifiable faiblesse. Rendez-moi cette union, Seigneur, mon seul trésor, ma seule joie intime et pure.

Pater, peccavi coram te, fac me unum de mercenariis tuis… [Lc 15, 18-19] Ecce quem amas infirmatur [Jo 11,3].

Mon livre sur le Brésil paraît ces jours-ci74). J'en donne quelques hom­mages.

Le 20, canonisation des bienheureux Joseph Oriol et Clément Hofbauer75), deux prêtres. C'est beau comme une fête du ciel. S.-Pierre 76 resplendit comme un ciel étoilé. Quelles leçons de vertu, d'abnégation, de pureté, de sacrifice, ces saints nous ont données!

Le 21, retour à Paris, St-Quentin, Bruxelles. - Bonne visite à Asten, excellent petit noviciat, où il y a de bonnes petites âmes.

Tout le mois à Sittard. Conférences sur la vie intérieure, sur nos Constitutions, sur le S.-Cœur. J'y reçois bien des grâces de purification et d'union. J'ai été bien infidèle à la grâce dans le passé, surtout depuis 20 ans. Souvent N.-S. m'a fait expier mes fautes sur le champ, par quel­que épreuve ou souffrance proportionnée à la faute, cela me donne la confiance qu'il m'a pardonné. Combien je suis confus de tout ce passé! N.-S. a été infiniment miséricordieux pour moi.

La maison à bon esprit, j'en suis 77 consolé et encouragé.

Une lumière me frappe principalement dans ce mois, c'est que l'exer­cice de l'union à N.-S. est préférable à tous les autres et qu'il nous aide plus que tous les autres. N.-S. n'est-il pas la cause unique de notre pré­destination, de notre salut et de tout bien spirituel!

C'est la direction que m'avait donnée le P. Freyd76) et j'y avais trouvé beaucoup de grâces. Quand je m'en suis éloigné , j'ai baissé. C'est vrai­ment ma grâce et c'est par cet exercice seulement que je me sanctifierai. Je veux m'y attacher définitivement. Je ne ferai rien que dans cette union, avec Jésus, par Jésus, en Jésus. - Cor Jesu, quid me vis facere: telle doit être mon unique règle de conduite. 78

Le 21, rentrée des postulants. Ils sont onze à Sittard, sept à Asten et une douzaine à Manage, en tout une trentaine. C'est une belle moisson. Mais les besoins sont si grands! Nos œuvres demandent tant de prêtres!

La fête du S.-Cœur marque le 31e anniversaire de mes premiers voeux. Que de grâces j'ai perdues. Miserere mei, Deus, secundum magnam misericordiam tuam! [Ps 50,3].

Nous allons préparer des fondations en Angleterre et en Espagne77), par l'envoi d'un Père en chacun de ces pays pour apprendre la langue. Faites, Seigneur, que ce soit pour votre gloire et votre consolation!

Le 23, bon pèlerinage à N.-D. du S.-Cœur. Toute la communauté s'y rend, on prie bien. - Je remercie N.-D. du-S.-Cœur de tout ce qu'elle a fait 79 pour nous ici. C'est elle qui nous a attirés en 188278). Elle est depuis 25 ans la mère de notre noviciat. Nous lui devons tout, sa miséricorde nous a sauvés.

Je lui demande beaucoup aujourd'hui: des vocations, des conver­sions, surtout la mienne, j'ai la confiance d'obtenir beaucoup.

Le 24, visite à Mgr à Ruremonde. Il nous accueille avec affabilité. Bonne ville pieuse, églises gracieuses et bien remplies. N.-S. n'est pas délaissé partout.

J'apprends la mort d'un de mes anciens condisciples d'Hazebrouck et de Paris: Siméon Van de Walle. 69 ans! N.-S. me laisse sur la terre et at­tend ma conversion.

Un de mes anciens professeurs de S. Jean, M. Paul Lefrère est mort aussi ces jours-ci. 60 ans. 80 Combien de mes collaborateurs de St­-Jean sont déjà allés au jugement: M. Labitte, M. Lefèvre Arnould, M. Marchal, M. Philippot…

Ces jours-ci une lettre du Cardinal secrétaire d'Etat79) à M. Keller80) et une note de la Corrispondenza Romana81) indiquent un changement aux di­rections politiques du S.-Siège pour la France.

Pie X maintient en théorie les directions de Léon XIII sur le ralliement et continue à louer l'Action libérale qui se place sur le terrain constitu­tionnel, mais désespérant d'amener les catholiques à l'union sur ce ter­rain, il leur demande de s'unir tous sur le terrain religieux autour des évêques sans se quereller sur les questions politiques.

Est-ce la création depuis longtemps désirée d'un parti catho­lique?. 81

Le 28, trente-et-unième anniversaire de mes premiers voeux. Que d'événements depuis lors: «Tantae molis erat condere congrega­tionem!». Trente-et-un ans de miséricorde divine, de patience divine. Pardon, Seigneur, pour une infinité de fautes commises! Merci pour une infinité de grâces reçues!

Les croix ne manquent pas ces jours-ci, elles me font espérer des grâ­ces. La maison de Louvain a de grosses dettes qui m'empêchent de dor­mir; les espérances de ressources en Espagne sont tombées à l'eau; un Frère ici a des imprudences qui font jaser dans le pays; je reçois des let­tres peu aimables de Mons et de Quévy…

J'ai accepté d'avance le sacrifice pour le progrès de l'œuvre. 82

Après le conseil, visite à nos Pères du Poitou.

Le 11, je passe à Niort. Sa nouvelle église S.-Hilaire est une petite ca­thédrale romano-byzantine. J'aime mieux ses vieux sanctuaires de Notre-Dame et de S.-André, ils portent plus à la prière. Le Donjon des Plantagenêt rappelle les divisions de la France, qui ont occasionné la campagne héroïque de Jeanne d'Arc.

L'Ouest a encore quelques costumes. Les Niortaises ont de gracieux bonnets, ceux des Saintongeaises les surpassent de beaucoup. Les pay­sans portent encore la blouse.

Deux bonnes journées à Javarzay. Le P. Bouteiller82) a là une assez grande action. C'est un apôtre. Il groupe dans des réunions mensuelles la jeunesse catholique de la région. 83

Avec la force motrice d'un moulin, il active une presse qui imprime ses journaux paroissiaux pour une douzaine de communes.

Toute cette région, aux temps féodaux, était aux châteaux et aux ab­bayes. A Javarzay, le château a été racheté par le M. de Vachez Mo­reau, et le prieuré par le tonnelier Bonneau.

Il reste une comtesse à Lussais, c'est une chanteuse de café qui a été épousée par le comte et qui est devenue son héritière. Elle ne va guère à l'église, mais elle souscrit pour les besoins du culte. Quelle société boule­versée!

Le P. Vernoux83) a une jolie chapelle, jadis bâtie par le château, au pauvre village de Luché.

Le 13 juillet, je couche à Pouy 84 où les lazaristes me reçoivent gra­cieusement. Ils ont pu conserver là une école apostolique de 80 enfants. Ils forment aussi des frères parmi les orphelins élevés chez les Soeurs de charité. Ils ont de bons ateliers de menuisiers, de tailleurs, de cordon­niers.

Bonne messe à la maison de S.-Vincent. J'ai tant à lui demander! J'arrive à Lourdes le 14 et j'y reste jusqu'au 18. Bon séjour, calme et assez recueilli. Il y a peu de pèlerins. Je prie, mais pas assez bien, et je ne suis pas content de moi. J'ai cependant confiance en la miséricorde de Marie.

Le 18, coucher à Béziers. La ville a sa vieille cathédrale et son cloître, elle est fière de 85 ses allées, mais la foi et les moeurs y ont, paraît-il, beaucoup baissé.

Le 19, longue route de Béziers à Lyon. Toute cette région m'était connue, sauf la ville d'Orange. J'admire son grand théâtre qui a utilisé le flanc d'une colline et dont la scène, bien conservée, s'élève à 36 mètres de haut. Le vieux château des princes d'Orange sur la colline a été dé­truit par Louis XIV, mais une statue de la Sainte Vierge domine ma­jestueusement les ruines.

Le 20, messe à N.-D. d'Ainay et arrivée à Paray-le-Monial, où je pas­se trois bonnes journées.

Ces bons séjours à Lourdes et à Paray me sont une petite retraite que j'aurais dû faire plus fervente. Ces journées correspondent à celles 86 où je préparais la fondation de la congrégation en 1877, dans une bonne retraite du 16 au 31 juillet84). Que de pardon j'ai à demander! Que de réparations à faire!

Je passe aussi trois bonnes journées à Domremy, du 24 au 26. On sent bien là que Jeanne d'Arc est une grande trésorière de grâces. Il fait bon auprès d'elle.

Le 25, belle fête sportive, un millier de gymnastes. Ces jeunes gens des Vosges sont calmes, robustes, sérieux et chrétiens.

Quatre-vingts soldats des garnisons de l'est sont venus aussi. Ils font l'adoration nocturne. Je les harangue le matin et je conduis la proces­sion. 87 Il y a quatre de mes enfants dans ce groupe.

Domremy est très visité. Les buveurs et joueurs de Vittel et Contréxé­ville y viennent en auto. Puisse la sainte Héroïne refaire l'union des Français!

Je finis le mois à La Capelle. C'est toujours pour moi un pèlerinage de revoir l'église de mon baptême et de ma première comunion et la tombe de mes parents.

C'est du 16 au 31 juillet que j'ai écrit mes premières constitutions dans une bonne retraite chez nos Soeurs en 1877. C'est vraiment de cet­te quinzaine de grâce que date la fondation de l'œuvre85).

Désormais nous commémorerons le souvenir de cette fondation au 16 juillet, au jour de N.-D.-du-Carmel. 88

Je remarque qu'au 16 juillet, l'Espagne célèbre la fête du triomphe de la Sainte Croix, en mémoire de la belle victoire d'Alphonse de Castille à Navas de Tolosa en 121286).

Le 3 août, conseil à Bruxelles, nous achevons d'organiser notre per­sonnel pour l'enseignement à Louvain.

Scène d'anarchie à Barcelone; si le P. Goebels87) y était installé, com­me nous en avions le projet, il aurait pu y donner sa vie pour la foi. Visite à ma parente de Verberie. Revu Compiègne, Pierrefonds, Villers-Cotterêts avec mon neveu Jean88). C'était là comme le centre de la vieille France.

Les druides avaient un sanctuaire dans la grande forêt. Il reste une belle pierre levée à Rhuis près 89 Verberie. - Les Romains eurent un camp à Champlieu, avec temple et théâtre. - Verberie eut sa résidence royale depuis les Mérovingiens jusqu'au XVIe siècle. Charles Martel y mourut. Il s'y tint des conciles au 8e et au 9e siècle. Charlemagne en re­bâtit le palais.

Compiègne a sa résidence royale, depuis les Mérovingiens. Jeanne d'Arc y fut faite prisonnière. François Ier y reçut Charles-Quint. - De sa grande abbaye de S.-Corneille, où Charles le Chauve avait fondé cent canonicats, il ne reste que quelques arceaux du cloître.

St Jean au bois, dans la forêt avait son abbaye du XIIe siècle, il y reste une église du plus pur gothique primitif.

Villers-Cotterêts avait aussi 90 son abbaye de S.-Remi, et sa de­meure royale que François Ier fit remplacer par un gracieux château Re­naissance française. Ce château a été fort défiguré au 18e et au 19e siècle. Il y reste quelques détails délicieux, la façade, une petite chapelle et deux voûtes d'escalier très fouillées. J'avais lu la description de tout cela dans le bel ouvrage de mon ami Palustre: La Renaissance en France.

Je passe tout ce mois d'août à St.-Quentin dans un demi-repos avec une grosse correspondance et quelques visites.

Cette promenade à Compiègne, Pierrefonds, Verberie, Villers­Cotterêts fait bien sentir l'évolution des temps et des moeurs. La grande 91 vie sociale était là autrefois dans les palais et les abbayes. Il y avait un idéal de vie religieuse et de vie seigneuriale; aujourd'hui toute l'activité sociale se condense à l'usine, à la Bourse, au parlement. Bien des sentiments élevés ne trouvent plus d'écho dans les âmes.

Le 1er du mois, je vais à Boulogne voir un de mes anciens élèves mala­de, Georges Raviny. Il faut qu'il revienne d'un peu loin pour se prépa­rer à la mort. Au lieu de garder la foi de sa famille, il s'est lié avec des amis qui ne cherchaient que le plaisir et les fêtes.

Je m'occupe de recruter l'école de Mons [sic!]. Je voudrais aussi ga­gner quelques jeunes gens pour le noviciat, il nous faudrait beaucoup de monde pour nos œuvres, surtout pour le Congo. 92

Prédicateur, le R. P. Degrelle s. j.

I. Préparation. Le vaisseau de notre vie fait eau, il faut le rentrer dans la cale sèche et l'examiner, le sonder partout. Il y aura des bois à remplacer, des fissures à combler. Nous étions en danger de périr. Donc, examen, ré­paration. La retraite est un temps d'examen, de prière, de résolution. Il y faut de la bonne volonté et de la confiance en N.-S. Il y aura des jours de trouble et de tempête… Jésus sera là: Ego sum, nolite timere [Jo 6,20].

II. Notre origine, notre fin. - Nous venons de Dieu, nous sommes à Dieu et pour Dieu. Nous n'étions rien, il y a quelques années. Dieu nous a donné l'être pour avoir des serviteurs, des amis, des enfants. Qu'en faisons-nous. - Dieu nous conserve la vie 93 par sa puissance et son action, comme le sol conserve la vie aux plantes, comme les aliments et l'air vivifient l'homme. Nous vivons de Dieu, de son action conservatri­ce et de sa grâce, vivons pour lui.

III. Le service de Dieu. - Dieu nous aime et il est jaloux. Il veut no­tre cœur. Exemple d'une épouse qui pleure si son époux donne seule­ment un regard à une autre personne.

La récompense proportionnée: les cinq talents… Un talent, c'est la vie commune; deux talents, la vie sacerdotale avec ses deux promesses, la chasteté et la prière; les cinq talents peuvent s'entendre de la vie reli­gieuse avec ses sacrifices…

Le contentement divin: le père de famille embrasse et bénit, le soir, l'enfant qui a été obéissant.

La joie au service de Dieu: un mondain 94 donnait une obole à S. Labre89) en lui disant: «Tiens, malheureux». Le Saint se leva et lui dit: «Mais non, je ne suis pas malheureux, j'ai la joie intime que donne la grâce de Dieu». - Tel un lépreux qui se réjouissait de voir tomber en lambeaux la prison qui retenait son âme loin du ciel.

Les fruits de la vie chrétienne: gaudium, pax… Voyez aux catacom­bes, les premiers chrétiens affectionnaient ces noms: Félix, Macaire, Hi­laire, Irène, etc. Ils représentaient le Christ sous les traits du charmeur Orphée, dont les chants apaisaient toutes les souffrances…

IV. L'usage des créatures, la passion, l'indifférence. - Il y a des âmes qui en arrivent à s'attacher 95 passionnément au vice, à l'ordu­re. La fable raconte que Circé, la magicienne, a changé les compagnons d'Ulysse en animaux, en lions, en loups, etc. Ulysse se plaint, elle pro­met de les rendre à la vie humaine s'ils le désirent. Ulisse court les bois et les interroge, mais ils se sont attachés à leur vie grossière et ne deman­dent pas à changer. Circé représente les passions et les tentations.

On dit que Louis XVII, sous l'inspiration de Simon90) et de ses gar­diens, avait pris des habitudes grossières et vicieuses. Si son père et sa mère l'avaient su, n'auraient-ils pas plus souffert de cela que de tout le reste! Le Sauveur souffre de voir où nous nous laissons aller.

Des forains avaient enlevé une fillette 96 de bonne famille en Angle­terre. Deux ans après le père la reconnut sur la foire et voulut la repren­dre, mais elle le repoussa et lui répondit par des grossièretés et des blasphèmes, elle s'était attachée à cette vie de bohème. Le père tua le chef de la loge et fut acquitté en justice.

Au jardin zoologique d'Anvers, un gardien alléchait un hippopotame par une botte d'herbes au bout d'une perche, la bête tournait, tournait, ouvrait sa gueule immense et ses yeux comme des lanternes. Et quand le gardien lâcha l'herbe, elle l'avala et plongea, comme honteuse. Ainsi l'homme vicieux suit un appât tentateur…

Les créatures sont comme nous de Dieu et pour Dieu. Dieu nous les prête pour notre usage, 97 mais nous n'en devons user que pour sa gloire et selon notre fin.

V. Le péché. - Nous faisons la méditation classique de s. Ignace sur le triple péché de Lucifer, d'Adam et du damné. Ce qui me frappe le plus, c'est la contemplation d'Adam et d'Eve, auprès du cadavre d'Abel. C'est l'apparition de la mort sur la terre.

Abel était beau comme Adam, beau comme Jésus. En quel état est-il ré­duit par le péché de Caïn et par le péché d'Adam! Il est tuméfié par les bles­sures que lui a infligées Caïn. Mais cela n'est rien encore! Voilà son cada­vre froid et raidi, ses yeux blanchis, sa chair se corrompt, la pourriture commence. Eve eût voulu garder son corps, elle ne peut pas, il faut l'ense­velir. Oh! les premières funérailles! quel spectacle lugubre! 98 C'est le premier triomphe de la mort, c'est le fruit du péché.

J'ai péché souvent et beaucoup. Je ne veux pas cependant me décou­rager! Jésus est miséricordieux.

Les hommes ne pardonnent guère aux pécheurs, mais Jésus est tou­jours miséricordieux. Jésus, c'est le Père de l'enfant prodigue. Le frère aîné et sans doute l'entourage gardent rancune, mais le père pardonne et il aime le pécheur repentant.

Voyez Jésus auprès de la Samaritaine, auprès de la femme adultère, auprès de Madeleine, il pardonne toujours.

Jésus, c'est le bon samaritain. Il a pitié du blessé que tous les autres dédaignent. Jésus, Marie, ayez pitié de moi.

VI. La dégradation du pécheur. - La pécheur ne comprend plus, il ne distingue plus le bien du mal ni 99 le vrai du faux. Voyez Judas, il croit que 30 pièces d'argent valent mieux que l'amitié de Jésus. Quelle aberration! «Homo, cum in honore esset, non intellexit et factus est si­milis animantibus…» [cf. Ps 48, 13.21]. Le pécheur se passionne pour les jouissances grossières qui plaisent aux animaux.

Son intelligence est faussée. Sa volonté est affaiblie: il veut et ne veut pas… Son cœur est dépravé, il est curieux comme Eve, orgueilleux com­me Satan, jaloux comme Caïn, avare comme judas, sensuel comme l'enfant prodigue. Physiquement même il perd sa beauté, son sourire, sa bonne grâce, sa candeur…

Et après le péché, quelle désillusion, 100 quel désenchantement, quels remords! Voyez Caïn qui craint d'être tué, judas qui rejette son argent et va se pendre… l'enfant prodigue qui est abandonné par ses compagnons de plaisir et qui est réduit à garder les pourceaux et à se nourrir de leurs restes!

Que de fois aussi j'ai éprouvé la désillusion et le remords!

VII. L'ennemi, le tentateur. - Le démon est un ennemi puissant, intrépide, sagace, persévérant. Il est poussé par les mobiles les plus vio­lents, la haine vis-à-vis de Dieu qui l'a damné; la jalousie vis-à-vis des hommes que Dieu veut mettre au ciel à la place des anges déchus.

Quelle passion violente que la jalousie! Il y a l'exemple de Caïn. Le Père cite des traits: une oie privée qui 101 suivait un Père comme un chien et qui se jetait sur ceux qui venaient lui parler au jardin et déchi­quetait leur soutane.

Un enfant de trois ans qui avait eu toutes les gâteries de ses père et mère. Un autre vint qui partagea les caresses, l'aîné endiablé se prépa­rait un jour à lui crever les yeux dans son berceau avec une aiguille, si la nourrice ne l'avait pas surpris et arrêté.

Une jeune fille jalousée par sa mère pour ses succès dans le monde (à La Louvière); sa mère cassa un verre et lui en marqua le visage pour la défigurer…

Satan nous jalouse furieusement. Il a juré de nous pervertir. Il ne faut

rien avoir de commun avec lui. Persuadons-nous de sa laideur. La Ge­nèse nous le montre 102 sous la forme du serpent, l'animal sournois, violent, venimeux et agile. S. Pierre l'appelle un lion à cause de sa vio­lence (tamquam leo rugiens: 1Pt 3,8); dans l'Evangile, nous le voyons se re­tirer dans le corps des pourceaux, ses semblables; le peuple lui prête des cornes parce qu'il est sensuel comme le bouc. On le représente comme un nègre parce qu'il est moralement homicide et anthropophage.

Ne le craignons cependant pas trop. Nous avons contre lui des armes invincibles. Armes défensives: le casque de la foi, le bouclier de la tem­pérance et de la modestie. Armes offensives: la prière le fait fuir, surtout les noms de Jésus et de Marie et le signe de la croix… 103

VIII. La confession. - Que ses fruits sont doux! C'est la paix et la joie. Le soir du jour de confession dans un pensionnat, tous les visages sont gais et ouverts. Une soeur cuisinière disait que les enfants man­geaient plus ce soir-là. - Les protestants sont tristes parce qu'ils n'ont pas la confession.

Un vieillard de l'hospice disait après sa confession: «Je courrais après un lièvre!». Il avait le poids de 40 ans de moins sur la conscience. Les malades vont ordinairement mieux après leur confession.

Se confesser régulièrement et avec simplicité. Ne pas trop ruminer les péchés, les tentations, les circonstances du péché. - La pensée conduit à l'action. - La pensée nous hypnotise. Pensons plutôt à N.-S. et à la ver­tu! 104

IX. L'enfer. - Il est bon d'y penser. Les saints y pensaient souvent. C'est la méditation de l'enfer qui a peuplé le ciel. Initium sapientiae timor Domi-ni [cf. Pro 9,10]. S. Paul le craignait: Ne ipse reprobus efficiar [cf. 1 Cor 9,27]. S. Bernard, s. François de Sales y pensaient souvent. C'est la crainte de l'enfer qui a converti et sanctifié ste Thérèse. Cette crainte est un frein pour nos pas­sions, semblable à ces freins puissants qui arrêtent un train en marche.

Les séductions du monde sont si grandes! Rappelons-nous Ulysse au cap Circé; pour n'être pas entraîné par les Sirènes, il se fait lier au mât du vaisseau, il se couvre les yeux d'un bandeau et se bouche les oreilles avec de la cire, et encore sentait-il ses sens troublés.

Il échappe, mais ses compagnons furent 105 tous séduits. Sa pru­dence fut récompensée. Notre prudence sera de méditer l'enfer.

Au siècle passé, l'épilepsie se propageait à Amsterdam par imitation. Un médecin ingénieux se fit donner plein pouvoir par l'autorité; puis il fit allu­mer un grand bûcher dans la cour de l'hôpital et menaça d'y faire jeter tous ceux qui tomberaient encore dans l'épilepsie, le mal fut conjuré…

N.-S. nous parle souvent dans l'Evangile du feu éternel, au moins une douzaine de fois. Il veut que nous soyons avertis. Le mauvais riche au­rait voulu avertir ses frères. Nous le sommes.

Craignons l'enfer, où la plus grande souffrance est d'être loin de Dieu et de ne pas l'aimer. 106

X. La mort. - Il y faut penser. Elle est certaine, elle est prochaine, elle nous menace.

Morte morieris! [4Rg 1,4] Nescitis diem neque horam! [Mt 25,13]. Sicut pi­sces hamo, sicut aves capiuntur, sic homo… [Ec 9,12] Les morts subites et im­prévues sont fréquentes: tel prédicateur en chaire, tel frère en servant au réfectoire, tel fidèle à la messe, sur la rue, au travail…

Ou bien il y a une maladie, mais elle trouble les facultés par la fièvre ou les affaiblit par le gâtisme et le coma… et la mort est encore imprévue et mal préparée.

La préparation doit être quotidienne. Elle ne s'improvise pas au der­nier moment, il faut être habitué à la faire… 107

Il n'y a pas que la mauvaise mort qui est redoutable, la mort du dé­couragé et du désespéré, il y a aussi la mort troublée, la mort inquiète… elle équivaut à une mort non préparée…

XI. Le jugement. - Cette méditation est le commentaire du dies irae. Ce sera beau, ce triomphe de Jésus: il viendra dans toute sa majesté avec l'armée de ses anges. Ce sera plus beau que la descente de Charlemagne vers Pavie avec ses bataillons qui faisaient trembler les Lombards; plus beau que Napoléon entrant en Russie avec sa grande armée européenne.

L'examen sera poignant: quidquid latet apparebit, nil inultum remanebit. Tout sera révélé. Il n'y aura pas d'excuses ni de défenseurs: Quid sum mi­ser tunc dicturus, quem patronum rogaturus? 108

Ce sera enivrant pour les élus d'entendre leur appel: Venez, les bénis de mon Père… [Mt 25,34] Mais ce sera épouvantable d'entendre la sentence des damnés. Le coup de tonnerre qui foudroie est moins terrible; le cra­quement du navire qui se coule est moins effrayant.

Préparons-nous un jugement favorable.

XII. Conseil pour la confession et les examens. - Ne ruminons pas nos péchés. Le souvenir du péril nous hypnotise. L'enfant qui pense tou­jours aux confitures prohibées et qui les regarde, finit par y goûter. Faisons-nous une conscience droite et éclairée. Formons bien les jeunes âmes. On est tenu strictement qu'à dire ses péchés mortels.

Un novice était torturé parce qu'on lui avait dit de tout dire, et il 109 avait pensé de son supérieur des niaiseries qu'il n'osait pas dire…

XIII. L'enfant prodigue. - Sa conversion. Il voit clairement sa mi­sère: hic fame pereo [Lc 15,17]: ici, je meurs de faim, les mercenaires de mon père sont mieux que moi. Il prend une résolution ferme; surgam et ibo ad patrem [Lc 15,18]. Il l'exécute sans retard: il se lève et s'en va.

Ai-je la même vue nette de mon état? Ma résolution est-elle claire et positive? Suis-je prêt à l'exécuter sur le champ?

Que la bonté du père est grande! Il allait tous les jours voir si son en­fant revenait. Il lui saute au cou, il fait venir de suite ses vêtements d'au­trefois pour qu'on ne le voie pas dans la misère, il lui fait fête. Le frère du coupable n'oublie pas ses fautes, mais le père les oublie. 110

Dieu nous attend! ainsi une mère attend son fils qui est en péril au loin, à la pêche sur mer ou à la guerre. Après l'Empire, une mère atten­dait toujours son fils qui avait disparu dans les guerres. Chaque jour pendant des années, elle aspirait son retour. Elle ne fermait pas sa porte à clef pour qu'il pût rentrer pendant la nuit. Dieu est plus qu'une mère. Et nous ne l'aimons pas! Revenons à lui et il nous rendra tous les dons que nous avons gaspillés.

XIV. Le règne du Christ. - Le Sauveur nous appelle à concourir à son règne. Il y a eu des chefs humains qui entraînaient les foules, César, Char­lemagne, Napoléon, Urbain II et Godefroy de Bouillon aux croisades. Jé­sus, notre roi, est plus beau, plus aimable. Il est si généreux, il 111 nous aime tant, il a tant souffert pour nous! La campagne à laquelle il nous ap­pelle est si belle: sauver les âmes, propager la vertu, peupler le ciel.

Suivons Jésus. Donnons-nous entièrement à lui pour travailler à son règne. Mais le plus bel appel est celui du S.-Cœur, qui nous invite à tra­vailler au règne de son amour…

XV. L'incarnation. - Dans quel état était le pauvre monde! La sa­gesse d'Athènes et de Rome était bien courte. Les philosophes eux­mêmes, tels que Socrate et Platon avaient des moeurs déplorables.. Le Sauveur est venu nous apporter le salut. Sans lui, le monde, oublieux des traditions primitives, serait tombé au dernier degré de la corruption et de la bestialité.

Il s'est anéanti, il s'est fait petit 112 enfant pauvre par amour. pour nous. Adorons et remercions!

XVI. Conseils pour les résolutions. - Il en faut prendre, dussent-elles n'être pas observées. Ce sera toujours un bon acte, un bon moment. Elles doivent être précises et motivées. Elles doivent être adaptées à nos besoins et à notre vocation. Souvent nous nous arrêtons à mille projets qui ne nous re­gardent pas. Les journaux nous font rêver à des réformes imaginaires.

Lisons les livres qui peuvent nous porter à des résolutions conformes à notre état, les vies de Saints qui ont eu la même vocation que nous, soit pour la vie intérieure soit pour les œuvres.

Elles doivent être vaillantes. A Eylau, Marbeau est envoyé par Augereau91) après trois autres 113 pour avertir un régiment qui est en danger. Il part sans dégainer son épée, sans regarder à droite ou à gau­che, il pique son cheval et va droit au but à travers les balles et les obsta­cles. Il arrive là où les autres ont échoué…

Elles doivent être exécutées sans discussions quand vient le moment de l'action. Ce n'est pas le matin qu'on doit discuter avec son oreiller, on a dû se fixer l'heure du lever d'avance, et ainsi pour tout le reste.

XVII. Bethléem. - Marie et Joseph obéissent à l'ordre d'Auguste. Ils obéissent sans retard et sans murmure, malgré la situation de Marie. L'exécution est pénible, peu importe. Si les autres critiquent et murmu­rent, eux se taisent. La Providence divine se sert pour ses desseins des décrets d'Auguste. 114

Le voyage se fait pieusement, dans la modestie et le recueillement. Marie médite (conferens in corde suo [Lc 2,19]). Ils édifient et prêchent par leur modestie.

A Bethléem, ils sont accablés d'humiliations et s'en réjouissent sûre­ment. Jésus ne les remplit-il pas de son esprit? Cum gaudio sustinuit crucem. [cf. Heb 12,2] - Ils aiment le sacrifice et la réparation.

Traits tirés des Fioretti: dialogue de s. François et de f. Léon. Où est la plus grand joie! demande s. François? Est-ce dans le réception charita­ble qui nous sera faite au monastère?… Non, si nous sommes exclus, battus, injuriés, ce sera la plus grande joie, parce que nous serons sem­blables à Jésus à Bethléem.

- Autre trait: le f. Juniper aime les humiliations et il aime ses supé­rieurs. Un jour qu'il priait à la chapelle il a donné à une mendiante qui 115 avait faim les clochettes d'argent des candélabres. Il pensait qu'il fallait voir N.-S. dans les pauvres. - Il est réprimandé au chapitre, il sourit toujours parce qu'il aime les humiliations. Le prieur se fâche de plus en plus; à la fin f. Juniper est triste, c'est de voir le P. Prieur fatigué et en­roué. Il va voir l'infirmier pour faire faire un bon lait chaud au P. Prieur…

A Bethléem, la sainte Famille est pauvre. Jésus aime les pauvres. Il envoie ses anges aux bergers. Les anges chantent et invitent gracieuse­ment les bergers. Les mages ne voient qu'une étoile froide et muette. Jésus aime donc la pauvreté et les pauvres, faisons de même.

XVII [sic!]. La purification. L'oblation et ses qualités. - Jésus et Marie s'offrent tous deux, tout entiers, pour 116 la vie et la mort.

Marie connaissait les prophéties, elle savait que Jésus était la victime par excellence, l'Agneau toujours immolé; elle s'offrait avec lui. Offrons-nous chaque matin, au commencement de chaque action, et surtout dans les épreuves.

Motifs de cette oblation: les quatre fins du sacrifice. Jésus s'offrait pour remplacer tous les sacrifices de l'ancienne loi. Offrons-nous aux mêmes intentions, en esprit d'adoration, d'action de grâces, de répara­tion et de prière.

Qualités de cette oblation: elle est sans retard, sans réserve et sans retour. Faisons ainsi: pas de réserve, pas de retard. Abandon à la Providence. Ne re­gardons pas en arrière. Renouvelons nos voeux tous les matins. 117

XVIII. A 9 h., le lundi 13, j'ai manqué la méditation. Nous enter­rions notre jeune scolastique Georges Kieffer92) mort pieusement à la cli­nique des phtisiques. Nous l'avons conduit au cimetière de Hérent. Il repose aux pieds des vieux murs d'une église romane. Il n'y a sans doute guère que des élus dans ce cimetière d'un village catholique. Une pareil­le cérémonie vaut une méditation.

J'avance en âge, je vais à grands pas vers mon dernier jour. Où reposerai-je? peu importe. Où ira mon âme? J'ai reçu tant de grâces et j'en ai tant abusé! … Je demande à Jésus et à Marie de me rendre tout ce que j'ai perdu.

XIX. Dans sa vie publique Jésus a chassé un démon muet. Quel est pour moi le démon muet? C'est celui qui m'empêche de dire à N.-S. et à mon prochain ce que je dois dire. 118 A mon Dieu, je ne parle pas as­sez. Je ne prie pas assez et je prie mal. Mes lèvres parlent à Dieu et mon imagination s'égare.

A mon prochain, je ne parle pas comme je devrais, pour corriger… pour édifier, pour encourager, pour corriger…

XX. L'agonie de N.-S. - Comme le Sauveur prie bien! Comme les apôtres ont dû se souvenir pendant toute leur vie avec amertume de leur somnolence à Gethsémani. Et moi…

Jésus accepte tout par amour pour son Père et pour nous. Et comme il sort de sa prière vaillant et généreux: surgite, eamus! [Jo 14,30]. Où en suis-je après mes prières?

L'ange console le Sauveur en lui présentant les fruits de sa Passion, les saints, les justes, les âmes réparatrices. Suis-je un 119 sujet de conso­lation ou d'amertume pour N.-S.?

XXI. Beaucoup d'âmes compatissent aux souffrances du Sauveur à sa Passion. Hérode lui-même joint la compassion à la dérision: ainsi fait le monde. Pilate a compassion, mais il a peur. Sa femme a compassion, mais elle n'est pas assez affirmative. S. Pierre a compassion, mais il tremble et renie son maître. Les apôtres ont compassion, mais ils se sau­vent. Les filles de Jérusalem ont une compassion plutôt naturelle.

Il y a de meilleures compassions, celles de Véronique et des saintes femmes surtout. Elles sont fidèles, elles ne craignent rien, surtout Made­leine. Elles sont au Calvaire, elles sont au tombeau. Quelle est ma com­passion? Peut-elle consoler Jésus? 120

XXII. La pietà. Comme Marie est admirable! Elle a pris part à l'agonie d'une manière mystique. Elle est tenue au courant de tout par s. Jean. Elle accompagne Jésus au chemin de la croix, elle encourage Véronique. Elle envie Simon de Cyrène. Elle ressent le contre-coup des clous et de la lance. Elle reçoit Jésus dans ses bras. Elle se pique aux épi­nes en les ôtant de son front. Elle mêle son sang à celui de Jésus et arrose son corps de ses larmes. Elle en compte les blessures. Sa compassion est comme une reproduction de la Passion de Jésus.

Quelle est ma compassion? Quelles sont mes réparations?

XXIII. Lecture de Mgr Lelong93), évêque de Nevers sur la chasteté des prêtres. 121

XXIV. Le résurrection. Jésus à Emmaüs. - Comme Jésus ressusci­té, je dois prendre une vie nouvelle. Je dois me détacher autant que pos­sible de la terre et des sens.

A Emmaüs, nous voyons l'action de l'Eucharistie. Les deux disciples sont éclairés et fortifiés par la communion. Ils retrouvent la foi, ils sont pleins d'ardeur, ils partent de suite pour annoncer la nouvelle aux apôtres à Jérusalem. Je devrais puiser aussi dans l'Eucharistie la vie de foi, le zèle, la charité.

Comme Jésus est bon! Le soir-même il est avec eux à Jérusalem, il en­tre au Cénacle, les portes étant closes. Il se montre aux apôtres, il leur montre ses plaies, il mange avec eux. Ils pourront ainsi témoigner qu'il est bien ressuscité le troisième jour. 122

XXV. L'Ascension. Le désir du ciel. - Marie et les apôtres ont une sainte tristesse, parce que Jésus s'éloigne. Marie avait tant pleuré quand elle l'avait perdu trois jours au temple!

Suis-je triste quand je perds la présence de Jésus, l'union avec lui? Mais Jésus leur a promis la consolation du S.-Esprit, à la condition qu'ils s'y préparent par le recueillement et la prière. Je retrouverai tou­jours le St-Esprit, l'Esprit de Jésus, si je vis dans le recueillement, dans la prière, dans la fidélité à tous mes devoirs…

La retraite se termine. Seigneur, pardonnez-moi ma tiédeur et faites fructifier les lumières et les grâces que j'ai reçues. 123

Du 16 au 24, je prêche la retraite à nos chers novices. J'en tire quel­ques grâces pour moi-même. Je prends pour thème la vie d'union à N.-S.

Ce sont des journées consolantes. Il y a là de belles âmes. Plusieurs avaient besoin d'être remontés.

Six de nos jeunes gens font profession. Quatorze prennent l'habit. C'est belle fête le 24.

Nous sommes bien éprouvés au Congo. Le P. Farinelle est mort94). Plusieurs reviennent. Où trouverai-je des apôtres pour toutes les âmes qui attendent là-bas? La moisson est mûre, il faudrait là vingt prêtres de plus. Si nous avions été plus fidèles, nous serions bénis 124 plus com­plètement.

Ma famille me demande de conduire mon petit neveu95) en Italie. Je me prête à cela. En allant à Rome, je lui fais faire un voyage rapide en Italie et Sicile. C'est un acte de charité.

Départ de Paris le 10 pour St-Maurice-en-Valais. Je prie là s. Mauri­ce, le patron des soldats chrétiens pour mon jeune cuirassier. Nous visi­tons le trésor où des coupes, des ex-voto attribués à Charlemagne et à s. Louis attestent la dévotion de tous les âges pour les grands martyrs de la légion Thébéenne.

Le 12, j'ai revu Pise. C'était la grande république chrétienne du XIe siècle. Les trophées turcs de son église des Cavalieri rappellent 125 sa vaillance contre les musulmans. Ses gracieux monuments montrent qu'elle a devancé de 300 ans la Renaissance de l'art en Occident. Du XIe au XVe siècle, l'école de Pise tenait le premier rang et préparait cel­les de Florence et de Rome. Les Toscans sont une race d'élite, des sémi­tes probablement, venus d'Asie mineure, et qui ont mis l'Occident en contact avec les civilisations de l'Egypte et de la Grèce.

Le 13, séjour à Florence, délicieuse promenade au Viale dei colli. La cathédrale est un grand acte de foi. J'aime toujours à revoir au palais Pitti la Madone du Grand-Duc, la plus belle des Vierges de Raphaël. L'artiste a uni dans cette œuvre 126 la piété de l'art chrétien, la per­fection de la Renaissance et la tradition relative au portrait de la Sainte Vierge, d'après les Vierges dites de s. Luc.

A Santa Croce, j'aime à revoir mon cher patron s. Jean glorifié par les fresques de Giotto, qui a représenté son assomption.

L'Etat achève la sacristie de S.-Laurent, comme il a achevé la façade du dôme. Il fait mieux que nos gouvernants.

Le 14, passage à Rome. Il y a grève générale. Le parti juif et franc­maçon a poussé le peuple à la grève en l'honneur de son héros Ferrer. Toute cette histoire de Ferrer est montée par la maçonnerie 127 enjuivée. Ferrer a fait connaître ses patrons en chargeant le juif Naquet de veiller à l'exécution de son testament.

Je m'étais arrêté quelques heures à Assise, c'est toujours une jouissan­ce et un profit spirituel: l'art chrétien a semé là tant de foi et de piété dans l'église de S.-François. J'aime à revoir la grande voûte de la crypte où Giotto a représenté avec amour la gloire et les vertus de s. François. - Cimabue se révèle là aussi par sa Madone entourée d'anges et s. François. Il aimait à faire grand. La noblesse de son dessein surpasse toutes les conceptions des autres artistes de la grande crypte. 128

Le gouvernement a donné le couvent à une école normale qui le gâte et l'abîme, et qui fait régner l'esprit maçonnique à la place de l'humble vie franciscaine. J'ai remarqué là au petit réfectoire la Cène par Dono Doni. N.-S. y témoigne une affection très tendre à s. Jean en l'entourant de son bras.

Le 15, Naples. On donne de l'air à la ville par quelques larges rues, mais la propreté laisse toujours à désirer. La négligence est dans les moeurs. Un quartier neuf se construit sur le plateau de Vomero et des usines s'élèvent près de la gare. La foi de la vieille Naples s'en va, et l'esprit nouveau gagne du terrain. 129

Le 16, le Vésuve. Je n'ai jamais vu le cratère comme cela, il est presque éteint. Un côté seulement fume un peu. C'est une cuve de cen­dres sèche et nue. Le cône s'est effondré, il y a trois ans. Cet arrêt du Vé­suve, qui semblait une soupape de sûreté, a-t-il des rapports avec les tremblements de terre de Messine?

Le 17, la grotte d'azur (crotta azzurra). C'est toujours un spectacle délicieux, que les ondes soyeuses et azurées de cette grotte mystérieuse. Les gens de Capri ont élevé une grande statue de N.-D. de Lourdes au­dessus de l'entrée de la grotte. Heureuse idée! Le manteau de Marie doit ressembler à l'azur velouté de ces eaux. 130

Le 18, visite à Pompéi et pèlerinage à Valle. Il semble bien qu'il y a quelques signes chrétiens dans certaines maisons de Pompéi, notam­ment les colombes, les poissons, le tau mystique. D'ailleurs les Vetti n'ont-ils pas donné un martyr à Lyon, comme pour réparer le scandale de leur maison pompéienne, ornée de peintures si sensuelles!

Le 19, Palerme. J'aime cette ville, elle est plus sérieuse, plus propre, plus cultivée que Naples. Ses monuments byzantins et normands rivali­sent avec l'Orient. La végétation de ses jardins, surtout à la villa Tasca, rappellent les tropiques. Je n'avais pas remarqué autrefois à Palerme les beaux araucarias qui égalent ceux du Brésil. 131

Le 20, Messine. On peut dire que les funérailles continuent depuis dix mois. On fouille les vieilles rues et les maisons effondrées, et chaque jour on retrouve quelques cadavres.

La ville est un amas de décombres. Ce n'est plus une ville. Les tra­vaux de dégagement ont marché bien lentement. On a découvert le quai et quelques bouts de rues. Il y avait là 150.000 âmes, 80.000 ont péri. Des villages de barraques [baraques] se sont élevés autour de l'ancienne ville. C'est assez régulier, mais pauvre et dans de mauvaises conditions hygiéniques. La nouvelle Messine compte, dit-on, 60.000 âmes. Ce qui reste de l'ancienne population a un cachet de tristesse, d'inquiétude, de désarroi. 132

La belle cathédrale est remplie de ses décombres. Un débris de mosaïque apparaît en l'air. On commence à fouiller et on va bâtir une église de bois.

C'est pour longtemps la misère à Messine et en Calabre.

Le 21, Taormine. C'est le belvédère du détroit de Messine. De là on peut faire revivre dans sa mémoire une infinité de faits historiques. Aux fantaisies d'Homère je préfère le souvenir des apôtres qui nous apportaient la foi, des croisés et des missionnaires qui allaient au loin dé­ployer leur zèle héroïque.

Le 22, retour à Rome. Visite rapide de Rome en cinq jours avec mon neveu. 133

Le 26, petite, mais délicieuse audience du S. Père. - Vous êtes ici, me dit-il - Oui, Saint Père, et je vous demande une bénédiction parti­culière pour ma congrégation, ma famille, mon neveu ici présent et une personne gravement malade. - De tout cœur, dit-il, pour toutes vos in­tentions: Che questa benedizione vi sia di conforto. Le bon sourire du S. Père marquait sa tendresse paternelle.

Le 30, visite au Cardinal Merry del Val96). Il voudrait bien nous aider en Finlande, mais… Attendons le nouvel Archevêque de Mohilev. En attendant nous pourrons peut-être avoir quelques facultés: celles des missionnaires apostoliques… et le pouvoir d'absoudre de l'hérésie pour un nombre de cas. 134

Quelques jours de calme et de travail. Lectures ascétiques: Bossuet97) (Doctrine spirituelle), R. P. Poulain98) (Les grâces d'oraison).

Pour les grâces ordinaires d'oraison, les auteurs ascétiques sont bien à peu près d'accord. Il y a 1° la méditation discursive; 2° l'oraison affecti­ve; 3° l'oraison de simple regard ou de simplicité, ou de contemplation passive.

Pour les grâces d'oraison de l'ordre mystique, il y a beaucoup de va­riété dans les divers auteurs. Ste Thérèse les surpasse tous pour la description détaillée des divers phénomènes de la contemplation. Elle ra­conte ce qu'elle a éprouvé elle-même. Mais elle prend soin de nous dire que Dieu agit diversement dans 135 les âmes et que son expérience n'indique pas un ordre absolu et immuable.

Le P. Poulain s. j. dans son grand ouvrage indique quatre degrés d'union mystique: 1° la quiétude ou l'union intermittente; 2° l'union complète, 3° l'extase, 4° les épousailles spirituelles.

Mais l'extase n'exprime-t-elle pas plutôt une grâce extraordinaire? Le P. Lallemant99) fait remarquer que la vie d'union en N.-S. lui-même et en Marie se réalisaient habituellement sans extase.

J'aime beaucoup la division que donne Richard de S.-Victor (12e siè­cle)100): De gradibus caritatis. Cette division était très goûtée par Bossuet, par s. François de Sales101), par le P. Faber102), par le P. Lallemant. Je ne sais pas pourquoi le P. Poulain l'a omise. 136 Richard de S.-Victor distingue les degrés de la contemplation par les divers états de la charité fervente. Il en compte quatre: 1. les blessures d'amour, caritas vulnerans; 2. la captivité d'amour, caritas ligans; 3. les langueurs d'amour, caritas languens; 4. les défaillances d'amour, caritas deficiens.

Dans le premier l'amour perce le cœur et se rend maître de toutes les affections; dans le second il lie l'esprit et s'attache toutes les pensées; dans le troisième il interdit l'action des sens extérieurs et des puissances intérieures; dans le quatrième, il cause à l'âme des défaillances et com­me une mort par les désirs immenses de son zèle.

D'autres ajoutent un cinquième 137 dégré: la transformation de l'âme ou les épousailles divines, caritas transformans.

Désirons au moins de recevoir une assez grande abondance de charité pour bien répondre à notre but spécial, qui est la vie d'amour et d'im­molation.

N.-S. me visite par sa grâce aux belles fêtes de s. Stanislas et de ste Ger­trude. Il me fait voir l'immense misère de 20 années de ma vie, où j'ai vécu dans la tiédeur et la négligence avec des alternatives de bonne volonté. je voudrais vivre désormais en esprit au pied de la croix avec ste Madeleine, pour pleurer mes péchés jusqu'à ma dernière heure. 138

138-139

Octobre 1907 1Novembre 56
Novembre 4La messe d'or 57
Mons 7Retour 58
Décembre 7Décembre 60
Cinq-fontaines 840 ans 61
Noël 11
1909
1908
Janvier64
Janvier 13Rénovation à Louvain 65
Rome 14Février 66
Audience 15Rénovation à Luxembourg 67
Visites 18Avril 72
Février 19Rénovation à Rome 72
Mars 20140 Béatifications 72
Avril 22Le mois à Sittard 75
Mai 25Juillet 82
Retour 27Pèlerinages 82
Juin, visites 28Août 88
Juillet 29Septembre 91
Août 32Retraite 93
Septembre 33Meslin 123
Retraite 34Octobre 124
Chapitre général 45Italie 124
Octobre 50Messine 131
Sacre de Mgr Grison 52Audience 133
Audience 54Novembre 134

1)
Le Frère du P. Ottavio Gasparri, cf. NQ, vol. 3, note 38, p. 460; cf. NQ XXIII, 82.
2)
Santerre Alfred, cf. vol. 3, note 4, p. 454.
3)
Franken (Pierre-Bonaventure) dehonien, né le 4.11.1880 à Süchteln (Allemagne); profès le 8.9.1901 à Sittard; prêtre le 10.8.1907 à Luxembourg; mission­naire au Brésil du Sud: 1910-1919; décédé le 12.6.1919 à Sâo Bento do Sul (Brésil). Salerni (Alphonse), né en 1887; profès le 6.10.1907; sorti de la Congrégation en 1911.
4)
Le P. Barth (Luc Joseph) dehonien, décédé le 22.8.1907 à Banalia (Zaïre), cf. NQ, vol. 3, note 19, p. 466.
5)
Mgr Péchenard Pierre-Louis, cf. NQ, vol. 2, note 46, p. 625.
6)
P. Germain Chanel, décédé le 14.10.1907 à Kasindi (cf. Necrologium S.C J. 1878-1978, p. 207).
7)
P. Lobbé Albert, dehonien: cf. NQ, vol. 1, note 99, p. 524.
8)
A Saint-Quentin.
9)
Cf. Notes sur l’Histoire de ma Vie, cf. vol. VIII: Index analytique des matières: Patronage (Œuvre St-Joseph), p. 195.
10)
Cf. Notes sur l’Histoire de ma Vie, cf. vol. VIII: Index onomastique: Julien, p. 247; Guillaume, p. 242; Lecot, p. 249; Henri Basquin, p. 219; Jean Lecot, p. 250; Jourdain, p. 247.
11)
Nous rappelons que la nièce du P. Dehon, Marthe Marie Louise, avait épou­sé en 1899 en secondes noces le comte Alphonse André Robert de Bourboulon, Grand Chambellan du Roi de Bulgarie (+ 1932) et donc neveu adoptif du P. Dehon (cf. G. Manzoni sci, Leone Dehon e il suo messaggio, p. 535).
12)
Merry del Val, Raphaël (card.), cf. NQ, vol. 3, note 50, p. 462.
13)
Benigni (Umberto), ecclésiastique italien, historien, journaliste, intégriste. Né à Pérouse (30.3.1862), décédé à Rome (26.2.1936). Après son ordination (1884) il devient secrétaire de l’Archevêque de Pérouse et professeur d’histoire ecclésiastique au séminaire diocésain. Très intéressé par les problèmes sociaux, il fonde en 1892 la revue La Rassegna sociale; en 1893, il publie à Gênes L’eco d’Italia et plus tard, à Rome, il collabore à La Voce della verità. De 1901 à 1904, il enseigne l’histoire ecclésiastique à l’Apollinaire de Rome. En 1904, il est employé par la Congrégation de Propaganda Fide comme minutan­te. En 1906, il entre à la Secrétairerie d’Etat où il travaille jusqu’en 1911 et où il a de fréquents contacts avec le Card. Merry del Val. De 1911 à 1920, il enseigne à l’Académie des Nobles Ecclésiastiques. Il fut un adversaire déterminé du modernisme et représentant de l’intégrisme. Toutefois, une grande partie de ses activités antimodernistes restaient secrètes et sont entourées de mystère. La Corrispondenza di Roma, qu’il a fondée en 1907, devenue en 1908 Correspondance de Rome sert comme agence internationale d’actualités anti-modernistes. Y paraissent nombreuses dénonciations des savants et d’autres personnalités accusées de tendances modernistes. Après avoir quitté la Secrétairerie d’Etat en 1911, Mgr Benigni se consacra au «Sodalitium Pianum» ou «Sodalizio di S. Pio V», connu aussi sous le nom de «Sapinière», sorte de société secrète anti-moderniste qui veillait sur l’orthodoxie des savants catholiques, sou­vent suspectés de modernisme en publiant des jugements et des condamnations dans la Correspondance de Rome, agence de presse à laquelle puisaient les journaux catholiques de l’Europe. Le «Sodalitium Pianum» a été supprimé en 1921 par Benoît XV. De 1921 jusqu’à sa mort (1934), reduit au rang de simple monsei­gneur, Benigni soutient l’ «Action Française», condamnée ensuite par Pie X. L’ouvrage le plus important d’Umberto Benigni est L’Histoire sociale de l’Eglise, en cinq volumes (NCE).
14)
Bégin (Louis-Nazaire), cardinal archevêque de Québec, né à Lévis (Canada) en 1840 et décédé le 18 juillet 1925 à Québec. Après ses études au petit séminaire de Rome, il fut compagnon d’études du P. Dehon à Santa Chiara (cf. NHV, IV, 147). Le P. Dehon écrit: «Je m’étais attaché à lui. Il avait un naturel fort aimable et une intelligence d’élite» (NHV, IV, 147). Après son doctorat à Rome, Bégin retourne au Québec pour y enseigner la théologie. Il exerce diverses fonctions au séminaire, publie plusieurs ouvrages et est admis à la Société Royale du Canada. En 1888, il devient évêque de Chicoutimi où il construit la résidence de l’évêque. Transféré à Québec comme coadjuteur (1891), il devient administrateur de l’archidiocèse en 1894, archevêque en 1898, cardinal en 1914. Il fonda au moins 70 nouvelles paroisses, accueillit de nombreuses congrégations religieuses et fonda le journal L’action catholique ainsi que tant d’autres œuvres de charité. Il organise le premier synode plénier du Canada, en 1909.
15)
Boutry (Thomas François: 1845-1925), év. de Le Puy: 1907-1925.
16)
Le chanoine Peyron «devenu le secrétaire érudit et zelé de l’évêché de Quimper», comme écrit le P. Dehon dans ses Mémoires (NHV IV, 146).
17)
Palmieri A., La Chiesa russa, Firenze 1908, un ouvrage important sur la situation de l’Eglise russe au 19ème et au début du 20ème siècle, basé sur la docu­mentation des revues religieuses russes de cette époque.
18)
Le plan de la Franc-Maçonnerie en Italie et en France… ou la clef de l’Histoire depuis 40 ans, P. Lethielleux, Paris 1908, cf. OS, 111, pp. 379-432. Pour la critique de cette étude cf. G. Manzoni scj, Leone Dehon e il suo messaggio, pp. 401-406.
19)
Même si la préface de l’ouvrage porte la date de 1909, en réalité elle ne parut qu’en 1919, en deux volumes, aux éditions Casterman, Tournai, cf. OSp., vol. III et IV.
20)
Henry (Paul-Emile-Marie-Joseph: 1851-1911), év. de Grenoble: 1900-1911.
21)
Henri Dehon et sa femme Laure Longuet.
22)
Mignot Eudoxe, archevêque d’Albi, cf. NQ, vol. 1, note 5, p. 526.
23)
Palombina se trouve dans la province d’Ancône (les Marches). Probablement, le P. Dehon veut parler de Palombara (Sabina) près de Montecelio.
24)
Lecot Victor, arch. de Bordeaux et tard., cf. NQ, vol. 1, note 104, p. 525.
25)
Ferrata Domenico (tard.), cf. NQ, vol. 2, note 10, pp. 630-631. Vannutelli Serafino et Vincenzo (cardinaux), cf. NQ, vol. 2, note 9, pp. 615-­616.
26)
Rampolla del Tindaro Mariano (tard.), cf. NQ, vol. 2, note 4, p. 614.
27)
Don Federico Gambarelli, fondateur du Sanctuaire de Notre-Dame-de-Guadalupe où s’était établit la première communauté dehonienne en Italie, à Albino (Bergamo), avait un caractère difficile. «Il se considérait comme maître et patron de tout. Il regrettait la vente et le contrat qu’il avait signé. Il finit par traî­ner les dehoniens devant les tribunaux, d’abord civils et puis ecclésiastiques». La situation était encore plus difficile à cause de l’opposition, depuis le début, du prévôt d’Albino don Perani. «Le Père Dehon… un homme paisible, tout en ayant raison et jouissant de l’appui de Mgr Radini Tedeschi (évêque de Bergame), déci­de de transférer la fondation ailleurs. Ainsi, à la fin de 1908, la maison de Notre­Dame-de-Guadalupe, après d’interminables vexations, a été revendue à don Gambarelli». Les dehoniens vont provisoirement dans une maison mise à leur disposition par le notaire Samuel Solari (cf. G. Manzoni scj, Leone Dehon e il suo messaggio, o. p., p. 427).
28)
Le plan de la Franc-Maçonnerie…, cf. note 18, p. 498.
29)
L’Année avec le Sacré-Cœur.
30)
Vives y Tuto Calasanz (tard.), cf. NQ, vol. 2, note 16, p. 665.
31)
Madeleine-Sophie Barat, sainte (1779-1865), fondatrice de la Société du Sacré-Cœur, béatifiée en 1908, canonisée en 1925.
32)
Goyau (Georges), historien français (1869-1939). Ses premiers ouvrages exaltent le rôle de la papauté. Il rejoint les ardents représentants du Ralliement et du catholicisme social. Il a publié une centaine de volumes (cf. NQ, vol. 2, note 69, p. 643).
33)
Le P. Claude-Barnabé Charcosset, dehonien: cf. NQ, vol. 1, note 98, p. 509.
34)
Kanter Georges-Charles, dehonien: cf. NQ, vol. 2, note 92, p. 648.
35)
Le P. Dehon écrit ainsi dans ses Mémoires: «Le noviciat de Sittard com­mença le 2 fév. 83. C’est le P. Alexandre de Pascal qui en fut l’occasion. Ayant lu dans les journaux des offres de maisons en Hollande, il avait reconnu le nom d’un de ses anciens compagnons aux zouaves pontificaux. Il était allé voir. J’y étais allé ensuite avec lui en décembre et j’avais loué le castel de Watersley. La dévotion à N.-D. du S.-Cœur, si vivante à Sittard, nous attirait et nous pensions que la sainte Vierge voulait nous protéger dans notre exil d’Egypte» (NHV XIV, 143) (cf. NQ, vol. 1, note 6, pp. 488-489).
36)
van Diepen (Jacques-Everard) dehonien, né le 15.5.1878 à Avenhorn (Pays­Bas); profès le 23.9.1902 à Sittard; prêtre le 25.5.1907 à Malines; missionnaire au Brésil du Nord: 1903-1904 et 1911-1913; Sup. Rég. du Brésil du Nord: 1912-1913; décédé le 30.8.1915 à Porto Calvo (Brésil).
37)
Boecker Joseph-Théodore, dehonien: cf. NQ, vol. 3, note 3, p. 454.
38)
Glod Sébastien-Gabriel, dehonien: cf. NQ, vol. 3, note 38, p. 460.
39)
Mille lieues dans l’Amérique du Sud: Brésil, Uruguay, Argentine, Casterman, Tournai 1909.
40)
P. André Prévot, dehonien: cf. NQ, vol. 1, note 96, p. 524.
41)
Grison Aimé-Emile-Gabriel (Mgr), dehonien: cf. NQ, vol. 1, note 63, p. 516.
42)
Gotti Antonio, Girolamo Maria (card.), cf. NQ, vol. 2, note 19, p. 632.
43)
Gilbert (Charles-Joseph-Louis-Abel. 1849-1914), év. de Le Mans: 1894-1898; démiss. (août 1897); év. tit. d’Arsinoë (24 mars 1898), décédé à Rome: 5 juillet 1914.
44)
Dom Luiz da Silva Britto, cf. NQ, vol. 3, note 82, p. 458.
45)
P. Maximin Cottart, dehonien: cf. NQ, vol. 3, note 2, pp. 482-483. P. Graaf Jean-Pierre, dehonien: cf. NQ, vol. 3, note 43, p. 461. P. Wedemeyer Bernard-Isidore, dehonien: cf. NQ, vol. 3, note 2, pp. 482-483.
46)
Meller (Henri-Timothée) dehonien, né le 11.1.1869 à Cologne; profès le 18.9.1897 à Sittard; prêtre le 10.8.1902 à Luxembourg; missionnaire au Brésil du Sud: 1903-1942; Sup. Rég. du Brésil du Sud: 1908-1911; décédé le 23.6.1942 à Tubarāo (Brésil). Stolte Jean-Basile, dehonien: cf. vol. 3, note 3, p. 486. Fischer (Jean-Christophe), dehonien, né le 8.9.1878 à Nettersheim (Allemagne); profès le 23.9.1903 à Sittard; prêtre le 25.7.1908 à Luxembourg; missionnaire au Brésil du Sud: 1908-1914 et 1920-1954; Cons. prov. de la Prov. BM: 1934-1938; Sup. de la maison de Corupà: 1938-1940; décédé le 13.8.1954 à Taubaté (Brésil). Baumhoff (Ferdinand) dehonien, né le 16.2.1881 à Attendorn-Helden (Allemagne); profès le 26.9.1902 à Sittard; prêtre le 10.8.1907 à Luxembourg; mis­sionnaire au Brésil du Sud: 1908-1914, 1919-1929, 1933-1955; Cons. prov. de la Prov. BM: 1934-1938; Sup. de la maison de Taubaté: 1936-1942 et de la maison de Brusque: 1944-1946; décédé le 30.11.1955 à Formiga (Brésil).
47)
Picard Raphaël-Gabriel, dehonien: cf. NQ, vol. 2, note 8, p. 661.
48)
Harmel Léon, cf. NQ, vol. 1, note 93, p. 508.
49)
Charcosset Claude-Barnabé, dehonien: cf. NQ, vol. 1, note 98, p. 509.
50)
Cf. G. Manzoni scj, Leone Dehon e il suo messaggio, o. c., p. 427.
51)
Mgr Grison.
52)
La Congrégation est divisée en deux Provinces: l’Orientale et l’Occidentale. Le Conseil de la Province Orientale est composé des Pères: Joseph T. Bocker, Sup. Prov. de la Prov. Or.: 1908-1911, cf. NQ, vol. 3, note 3, p. 454. Peters (Joseph-Victor) dehonien, né le 13.8.1873 à Kleve (Allemagne); profès le 24.9.1894 à Sittard; prêtre le 10.8.1899 à Luxembourg; Cons. prov. de la Prov. Or.: 1908-1911; de la Prov. Allemande: 1911-1919; Sup. loc. de la maison de Luxembourg: 1912-1918; décédé le 31.12.1922 à Say/Bendorf (Allemagne). Jonkmann (Bernard- Willibaldus) dehonien, né le 8.4.1877 à Nordhorn (Allemagne); profès le 8.9.1898 à Sittard; prêtre le 6.6.1903 à Rome; missionnaire au Brésil du Sud: 1905-1907; Cons. prov. de la Prov. Or.: 1908-1911; Secr. prov. de la Prov. Or.: 1908-1911; Sup. Prov. de la Prov. Allemande: 1911-1918; Cons. gén.: 1919-1926; décédé le 18.8.1952 à Lengerich (Allemagne). Wiese (François Ass.-Conrad) dehonien, né le 18.2.1867 à Meschede-Berghausen (Allemagne); profès le 1.10.1897 à Sittard; prêtre le 22.12.1900 à Luxembourg; Sup. de la maison de Sittard: 1907-1912 et 1932-1934, et à Fünfbrunnen: 1912­1921; Cons. prov. de la Prov. Or.: 1908-1911 et de la Prov. Allemande: 1929-1936; décédé le 18.12.1947 à Sittard. Tillmann (Clément-Liborius) dehonien, né le 7.2.1872 à Dinschede-Oeventrop (Allemagne); profès le 7.2.1893 à Sittard; prêtre le 10.8.1896 à Luxembourg; mis­sionnaire au Zaïre: 1899-1900; Maître des novices à Clairefontaine: 1901-1903; Sup. de la maison de Fünfbrunnen: 1903-1912; Cons. prov. de la Prov. Or. 1908­1911; décédé le 3.4.1934 à Bremen/Soest (Allemagne).
53)
Mgr Gabriel Grison.
54)
Bunn (Joseph-Adrien) dehonien, né le 25.10.1831 à Sermaize (France); profès le 22.9.1905 à Sittard; prêtre le 8.12.1908 à Louvain; missionnaire au Zaïre: 1909-1914 et 1919-1923; décédé le 25.5.1931 à Bruxelles. Guillaume (Adrien Jean du Cénacle), dehonien: cf. NQ, vol. 3, note 1, p. 463.
55)
Cf. Notes sur l’Histoire de ma Vie, cahier VI, pp. 76-84.
56)
Wulfers Jean-Laurent, dehonien: cf. vol. 3, note 40, p. 460 cf. Le Règne du Sacré-Cœur (Bruxelles): Janvier 1909, pp. 17, 19-26.
57)
P. Prévot Léon-André, dehonien: cf. NQ, vol. 1, note 96, p. 524. Van Halbeek (Hubert-Lambert) dehonien, né le 19.8.1874 à Echt (Pays-Bas); profès le 20.9.1894 à Sittard; prêtre le 10.8.1898 à Luxembourg; Sup. de la maison de Bruxelles: 1904-1910; Cons. prov. de la Prov. Occidentale: 1909-1911; Sup. Prov. de la Prov. Néerlandaise: 1911-1919; décédé le 10.12.1924 à Maastricht (Pays-Bas). Mailier (Victor-Rémi) dehonien, né le 7.1.1878 à Neuvillers/Recogne (Belgique); profès le 1.10.1897 à Sittard; prêtre le 28.5.1904 à Rome; Cons. prov. de la Prov. Occidentale: 1909-1911; Secr. prov. de la Prov. Occ.: 1909-1911; missionnaire au Zaïre: 1911-1921; décédé le 11.2.1921 à Beni (Zaïre). Brovillé (Edouard-Grégoire) dehonien, né le 4.4.1879 à Metz; profès le 8.9.1898 à Sittard; prêtre le 28.5.1904 à Malines; Sup. loc. de la maison de Clairefontaine: 1907-1910 et 1922-1925; Cons. prov. de la Prov. Occidentale: 1909-1911 et de la Prov. Franco-Belge: 1911-1919; Maître des novices à Clairefontaine: 1920-1921; Sup. de la maison de Louvain: 1925-1927 et de la maison de St-Quentin: 1929­1936; décédé le 3.5.1940 à St-Quentin. Hermans Charles-Albert, dehonien cf. NQ, vol. 3, note 45, p. 470.
58)
Jacquemin (Paul-Augustin) dehonien, né le 27.12.1875 à Andelot en Montagne (Jura); profès le 26.9.1902 à Sittard; prêtre le 25.5.1907 à Malines, Maître des novices à Manage: 1909-1911 et à Brugelette: 1911-1931; Sup. de la maison de Manage: 1910-1914 et de la maison de Brugelette: 1911-1914; Économe prov. de la Prov. Franco-Belge: 1911-1919; Sup. de la maison d’Amiens: 1931-1936; Cons. prov. de la Prov. Française: 1937-1946; décédé le 16.5.1964 à Amiens.
59)
Lambert Théodore-Michel, cf. NQ, vol. 3, note 4, p. 463.
60)
Kohl Hermann-Philippe, dehonien: cf. NQ, vol. 2, note 62, p. 670. Bunn Joseph-Adrien, dehonien: cf. NQ, vol. 3, note 54, p. 501.
61)
Cf. Notes sur l’Histoire de ma Vie, cahier II, p. 47r.
62)
Cf. G. Manzoni scj, Leone Dehon e il suo messaggio, pp. 245-283.
63)
Les Soeurs-Servantes, en particulier la Mère Marie du Cœur de Jésus (la Chère Mère), Sr Marie de Saint-Ignace et Sr Marie de Jésus.
64)
La Mère Marie-Véronique du Cœur de Jésus (Caroline Lioger): 1825­1883, fondatrice des Soeurs-Victimes du Sacré-Cœur de Jésus (1857) (cf. M. Denis scj, La spiritualité victimale en France, Studia Dehoniana 11, Rome 1981, pp. 121­148), cf. NQ, vol. 1, note 51, p. 501.
65)
Galley Marius-Jean de Sainte-Véronique, cf. NQ, vol. 1, p. 501
66)
Félix-Jules-Xavier Jourdan de la Passardière, né le 22 mars 1841 à Granville, près de Coutance (Manche). Il rétablit en France les Oratoriens de St Philippe de Néri et fut Supérieur de cette congrégation à Draguimars (Var). En 1884, il devient évêque auxiliaire de Mgr Caverot à Lyon. En 1887, il est évêque auxiliaire du Card. Lavigerie, archevêque d’Alger et de Carthage (cf. NHV XII, 170; XIV, 113-115).
67)
Cf. Notes sur l’ Histoire de ma Vie, cahier XIV, 154-155. Lateau (Louise). «Stigmatisée» célèbre à la fin du 19ème siècle. Née le 24 janvier 1850 à Bois-d’Haine (diocèse de Tournai), décédée le 25 août 1885. Le vendredi 24 avril 1868, des plaies apparurent à ses pieds, ses mains, sur son front et elles sai­gnaient chaque vendredi, jusqu’en 1881. Selon l’affirmation de plusieurs person­nes, elle cessa toute alimentation à partir du 30 mars 1871, n’absorbant plus que l’hostie de la communion. Chaque vendredi elle avait aussi de fréquentes extases. Le cas de Louise Lateau fut étudié par une commission d’enquête, composée d’ecclésiastiques et de médecins. On peut regretter qu’elle ait toujours refusé de se soumettre à un examen médical dans une clinique. L’enquête n’a jamais pris publiquement de position définitive concernant l’authenticité des faits, leur origi­ne et leur nature (cf. NHV IX, 62, X, 11. 16-19, 46-48; XII, 172; XIV, 154-155).
68)
Gay Charles-Louis (Mgr), cf. NQ, vol. 1, note 15, p. 493; cf. NHV VI, 107. 116, VII, 130; XI, 174; XII, 106; XIII, 83; XIV, 107-111. 114. 160. 161. 162; XV, 47. 48. 58. 60. 81.
69)
Soeur Marie du Sacré-Cœur, cf. NHV XIV, 115-118.
70)
Estelle Faguette, née en 1843 à St-Memmie (Marne), gravement malade depuis des années. En septembre 1875, son cas est désespéré. Elle prie Notre Dame de lui obtenir la guérison. Le 15 février 1876, elle est aux portes de la mort; Marie apparaît et dit: «Courage! Mon Fils va se laisser toucher»; le 16: «Tu seras guérie samedi»; Le 19, au jour dit, Estelle est soudainement et radicalement guérie; «Hors des lois de la nature», disent les médecins. Dix autres apparitions suivent. A la neuvième, le 9 sept. Notre-Dame présente à Estelle le scapulaire du Sacré-Cœur et, le 8 déc., lui donne mission de le répandre. Une pluie de grâces tombait de ses mains. Estelle meurt à Pellevoisin le 23 août 1929, à 86 ans (CHAD) (cf. NQ, vol. 2, pp. 554-556).
71)
Jeanne d’Arc, sainte (1412-1431), béatifiée par Pie X en 1909, canonisée par Benoît XV, le 9 mai 1920.
72)
Jean Eudes, saint (1601-1680), fondateur de la congrégation masculine de Jésus et Marie et de l’ordre féminin de Notre-Dame de la Charité du Refuge, pour aider les femmes déchues. Apôtre de la dévotion aux Sacrés Cœurs de Jésus et de Marie, il composa un office et une Messe propres qui ont reçu l’approbation de l’Eglise. Auteur de plusieurs ouvrages dont le plus important est «Le Cœur admi­rable de la Mère de Dieu» (Caen 1680). Béatifié par Pie X, le 25.4.1909, il fut canonisé le 31.5.1925 par Pie XI.
73)
Jean-Théophane Venard, bienheureux (1829-1861). Membre des Missions Etrangères de Paris, immédiatement après son ordination (1852) il part pour Hong Kong. En 1859, malgré la persécution et sa santé fragile, il est envoyé au Tonkin occidental. Il exerça le ministère dans de grandes difficultés et dans des moments de repos forcé traduisit une part du Nouveau Testament en annamite. Dénoncé et arrêté en novembre 1860, il fut enfermé pour un an dans une cage et puis décapité. Son corps, exhumé en 1864, a été transporté à Paris; sa tête, jeté dans le Fleuve Rouge, a été retrouvée deux semaines plus tard et, à présent, elle se trouve à l’église de Ké-tru où elle est vénérée.
74)
Mille Lieues dans l’Amérique du Sud: Brésil, Uruguay, Argentine, Casterman, Tournai 1909.
75)
Joseph Oriol, saint. Né à Barcelone en 1650, il se distingue depuis sa jeunes­se par sa piété. Etudiant de théologie à l’université de Barcelone, il reçoit le cha­risme de faire des miracles. Docteur en Théologie, il est ordonné prêtre en 1676. Après un pèlerinage à Rome, en 1686, il obtient d’Innocent XI le bénéfice de la résidence à l’église de Ste Marie del Pino, à Barcelone. Il exerçait son ministère sacerdotal parmi les soldats, les marins, et les enfants. Très austère pour lui-même, il ne prenait que trois heures de repos par jour, assis dans une chaise. Il se nour­rissait de pain et d’eau et portait en permanence un cilice. Après 1698, les nécessi­teux et les infirmes deviennent ses préférés. Nombreux sont ceux qui guérissent grâce à sa prière. Il devient un saint toujours plus connu et plus populaire. Il décède le 23 mars 1702, à Barcelone. Sur sa tombe, à l’église de Ste-Marie del Pino, surviennent toujours de nouveaux miracles. Béatifié par Pie VII en 1805, il est canonisé le 20 mai 1909 par saint Pie X. Clément-Marie Hofbauer, saint. Né à Tasswitz (Moravie), en 1751, reçut au baptê­me le prénom de Jean. Durant sa vie d’ermite, il prit le prénom de Clément auquel, par dévotion à la ste Vierge, il joignit celui de Marie. Pendant ses études de philosophie à l’université de Vienne, il allait chaque année en pèlerinage à Rome où il se retirait dans la solitude de Quintiliolo (Tivoli). Il fut admis dans l’ordre des Rédemptoristes en 1784, st Alphonse Liguori étant toujours en vie. En 1785, avec la profession perpétuelle, il reçut tous les ordres. Il propagea l’ordre des Rédemptoristes en Pologne, en Allemagne, en Suisse et en Roumanie. De 1787 à 1808, il exerça un apostolat très intense à Varsovie. Un décret de Napoléon y mit fin. Ainsi, il dut retourner à Vienne où il développa un intense apostolat ayant pour effet de nombreuses conversions parmi les intellectuels et les aristocra­tes de la capitale. Il décéda le 15 mars 1820, fut béatifié par Léon XIII en 1888 et canonisé le 20 mai 1909 par saint Pie X.
76)
Freyd Melchior, cf. vol. 3, n. 23, p. 476.
77)
Le P. Dehon avait chargé le P. B. Charcosset, l’Assistant général, de fon­der une maison de recrutement en Espagne. En réalité, ce furent les Pères allemands, missionnaires au Cameroun, qui pour éviter de se faire prisonniers s’étaient réfugiés dans l’Ile de Fernando Poo (1915), rejoignant ensuite l’Espagne, ils acceptèrent de l’Evêque de Cadix un ministère paroissial. Après la guerre, le P. Dehon insiste pour qu’on y ouvre une maison de la Congrégation. Ce fut chose faite en 1919, au moment de l’ouverture de l’école apostolique de Puente la Reina. Par contre, la première fondation en Angleterre n’a lieu qu’en 1936, avec la paroisse de Redbourn.
78)
Le noviciat de Sittard commence le 2 février 1893, cf. NHV XIV, 143-144.
79)
Le Card. Raphaël Merry del Val, cf. vol. 3, note 50, p. 462.
80)
Keller (Prosper). – Fils aîné d’Emile, né à Strasbourg le 15 nov. 1854. En 1870-1871, il accompagne son père sur les champs de bataille de l’armée de l’Est, puis à l’Assemblée nationale de Bordeaux… Reçu premier à S.-Cyr (1873) et à l’Ecole d’état-major (1876), il fut un temps affecté au ministère de la Guerre (1887-1888). A l’appel du comte de Mun, il fit partie, avec Lyautey et Margerie, du groupe fondateur des Cercles d’action sociale. En 1906, sous le ministère Combes, il refusa, en sa qualité de colonel comman­dant le 163e régiment d’infanterie à Bastia, de prendre part aux inventaires des biens d’Eglise et dut donner sa démission. Pie X le nomma camérier secret (1907) et lui conseilla de créer une associa­tion pour aider les officiers français victimes de leurs convictions catholiques: ce fut l’œuvre nommée Honneur et Conscience. A la même époque, l’union des catho­liques, que souhaitait le Pape et qu’encourageait le Cardinal Merry del Val, trou­va en la personne de Pr. Keller un animateur en France. Il succéda à son père en 1909 comme président de la Société générale d’éducation et d’enseignement. Parallèlement, il présidait le Comité catholique de Défense religieuse. C’est aussi dans la perspective d’une union des catholiques, conjuguant les efforts des mouve­ments animés par MM. Pion, Marc Sangnier ou MM. Veuillot et Bainville, que Pr. Keller présida le Comité Jeanne-d Arc, organisateur de manifestations populaires. Rappelé à l’activité, le colonel Keller fit la guerre de 1914-1918 à la tête d’une brigade. En 1922, à la demande personnelle de Pie XI, il entreprit de denoncer les abus du laïcisme au cours de conférences dans les principales villes de France. C’est en prononçant l’une d’elles à Rouen, en 1930, qu’il fut prévenu du mal qui devait l’emporter. Il mourut à Odratzheim (Bas-Rhin), le 26 sept. 1931.
81)
Cf. NQ. vol. 3, note 13, pp. 497-498.
82)
Bouteiller (François Joseph Cal.), dehonien, né le 10.5.1850 à Pommiers (Charente-Maritime); prêtre le 23.9.1876 à La Rochelle; profès le 2.9.1892 à St­Quentin; décédé le 27.9.1933 à Chef Boutonne.
83)
Vernoux (Zacharie-Hilaire) dehonien, né le 5.11.1867 à Paillé (Charente­Maritime), profès le 2.2.1894 à Sittard; prêtre le 11.10.1896 à Poitiers; décédé le 9.2.1957 à St-Jean d’Angély (Charente-Maritime).
84) , 85)
Cf. NHV XII, 166.
86)
Bataille de Las Navas de Tolosa où les trois rois chrétiens alliés (Pierre Il d’Aragone, Sance VII de Navarre et Alphonse VIII de Castille) infligèrent une lourde défaite aux Almohades (dynastie berbère musulmane qui régna au Maroc et en Espagne méridionale au XIIe et au XIIIe siècles), en les contraignant à se retirer au sud de la Serra Morena. Ainsi commence un processus rapide de désa­grégation de l’empire des Almohades, reconquis par les rois chrétiens et déchiré par de permanentes sécessions en Afrique nord-occidentale.
87)
Goebels (Joseph-Anscharius), dehonien, né le 7.7.1877 à Mülheim (Allemagne); profès le 24.9.1899 à Sittard; prêtre le 24.6.1904 à Rome; Sup. de la maison d’Albino: 1914-1919 et de la maison de Bologne: 1919-1920; Econome prov. de la Province Italienne: 1921-1922; en Espagne: 1922-1945; Maître des novices à Novelda: 1922-1928; Sup. de la maison de Novelda: 1923-1929 et 1930­-1931; Sup. Rég. en Espagne: 1930-1939; Sup. de la maison de Puente la Reina: 1931-1935; Cons. et Secr. gén.: 1935-1936; Sup. de la maison de Valencia: 1939­-1945; décédé le 11.10.1945 à Valencia.
88)
Jean-Louis-Georges Malézieux, fils de Marthe Dehon et d’André Malézieux, né le 20.2.1889 à La Capelle.
89)
Benoît,-Joseph Labre, saint. Né à Amettes (Artois) en 1748, à douze ans il fut envoyé à Erin auprès de son oncle prêtre où son idée de devenir trappiste devint mûre. Contrarié par sa famille et ayant essuyé le refus de plusieurs Chartreuses et Trappes, il a été enfin accepté à l’essai à l’abbaye cistercienne de Sept-Fontaines. Après quelques mois il doit la quitter à cause d’indicibles tourments spirituels qui le réduisent à mettre en danger sa vie. En juillet 1770, il part pour Rome. C’est à ce moment-là qu’il a une vision claire et nette de sa vocation de pèlerin aux divers sanctuaires d’Italie et d’Europe. C’est ce qu’il fait jusqu’à Pâques 1774 quand il arrive de nouveau à Rome où il vit jusqu’à la fin de sa vie ne s’absentant que pour ses pèlerinages annuels à Lorette. Réduit à une indigence totale, il meurt à Rome le 16 avril 1783. Après trois jours de miracles extraordinaires et d’honneurs triomphaux, le corps de Benoît Labre a été enseveli dans son église préférée, de Ste-Marie-aux-Monts. Béatifié par Pie XI en 1860, il a été canonisé en 1881 par Léon XIII.
90)
Simon (Antoine), homme politique français (Troyes 1736 – Paris 1794), cor­donnier rue des Cordeliers, membres des jacobins, puis du conseil général de la Commune, il fut désigné par Chaumette comme gardien du Dauphin, séparé de sa mère dans la Tour du Temple (1793). Tout en voulant inculquer ses principes à l’enfant, il se montra assez bon avec lui, en essayant de le distraire et on ne peut ajou­ter foi aux allusions au sujet de ses moeurs qu’il aurait faites à Hébert lors du procès de la reine. Dessaisi de ses fonctions (1794) il fut exécuté après Thermidor (GL).
91)
Augereau (Pierre-Francois-Charles), duc de Castiglione, maréchal et pair de France (1757-1816). Fils d’un domestique et d’une fruitière, il s’engagea d’abord dans les troupes napolitaines, puis, en 1792, dans les armées françaises; il s’y condui­sit si brillamment, tant en Vendée qu’aux Pyrénées, qu’en 1785 il était déjà général de division. Napoléon le fit maréchal, duc de Castiglione. II fut un des premiers à se rallier à Louis XVIII, qui le nomma pair de France. Entreprenant et courageux, il avait une réputation de pillard; les «fourgons d’Augereau» sont restés légendaires.
92)
Kieffer (Georges), dehonien, né le 20.11.1887 à Rumersheim (Alsace); profès le 24.9.1908 à Manage (Belgique); décédé le 15.9.1909 à Louvain (Belgique).
93)
Mgr Lelong Etienne, cf. NQ, vol. 2, note 25, p. 633.
94)
Farinelle Jules-Léon, dehonien: cf. NQ, vol. 3, note 65, p. 453.
95)
Le plus jeune des neveux du P. Dehon, en 1909, était Robert-Henri-Ernest­-Marie, fils de Marthe Dehon et du comte A.A. Robert de Bourboulon. Il est né le 16.7.1900. Des deux autres neveux, fils de Marthe Dehon et d’A. Désiré Malézieux (+ 8.6.1893), Jean avait 20 ans (né en 1889) et Ernest 23 ans (né en 1886).
96)
Le card. R. Merry del Val, Secrétaire d’État de saint Pie X, cf. NQ, vol. 3, note 50, p. 462.
97)
Bossuet (Jacques-Bénigne), né le 27.9.1627 à Dijon, év. de Condom: 1670­-1671; démiss. (31.10.1671); év. Meaux: 1681-1704; décédé le 12.4.1704 à Paris.
98)
Poulain (Auguste), né à Cherbourg le 15 déc. 1836, il entra dans la Compagnie de Jésus en 1858. Avant et après sa théologie, il enseigna les sciences exactes. Familier de l’oraison de quiétude, cet esprit clair put discuter avec compétence de théologie mystique. Il avait publié en 1893 un volume sur La mysti­que de saint, Jean de la Croix. Il édita, en 1910, Des grâces d’oraison, description des états mystiques, importante contribution aux études sur cette matière. Le livre connut le succès. En 1910, le P. Poulain présenta au public le Journal de Lucie­-Christine (Mme Boutle-Bertrand), autobiographie d’une dame du monde, favori­sée de grâces mystiques. Il mourut le 19 juill. 1919 (CHAD).
99)
Lallemant Louis, cf. NQ, vol. 1, note 1, p. 510.
100)
Richard de Saint-Victor, théologien et mystique, né en Écosse (?) au début du XII` siècle, mort à Paris en 1173. Entré chez les Chanoines Réguliers de St­-Victor (Paris), il fut disciple de Hugues de St-Victor et, probablement, lui succéda dans l’enseignement de la théologie à l’école du monastère. Il devint prieur de l’abbaye en 1162 et le resta jusqu’à sa mort. Il a écrit de nombreux ouvrages parmi lesquels De gradibus caritatis, De quatuor gradibus violentae caritatis.
101)
François de Sales, saint (1567-1622), év. de Genève, docteur de l’Église et fondateur, avec ste Françoise Frémyot de Chantal, de l’ordre de la Visitation (1610), auteur de nombreux ouvrages de spiritualité, parmi lesquels de deux chefs-d’œuvres: Introduction à la vie dévote et Traité de l’amour de Dieu.
102)
Faber (Frédéric-William), théologien ascétique de l’Oratoire (1814-1863). Ardent disciple de Newman, il reçoit l’ordination anglicane en 1839. Lors de sa visite à Rome, en 1842, il manifeste une attitude favorable envers le catholicisme. La conversion de Newman (9.10.1845) lui fait prendre une décision. Il est accepté par l’Eglise catholique le 17.11.1845. Une petite communauté des convertis se forma à Birmingham. Faber en devint le Supérieur. En 1847, il est ordonné prê­tre. En 1849, les convertis entrent dans l’Oratoire. W. Faber a exercé une grande influence dans sa patrie et à l’étranger, par ses écrits, sa prédication, en tant que théologien et directeur spirituel. Il a écrit 49 biographies parmi lesquelles celle de Grignon de Montfort qui est un chef-d’œuvre. Ses huit principaux ouvrages de spiritualité restent célèbres: All for Jésus (Tout pour Jésus); Growth in Holiness (Croissance dans la sainteté); The Blessed Sacrament (Le Saint-Sacrement); Spiritual Conferences (Conférences spirituelles); etc. Il faisait partie des ultramontains et possédait une grande dévotion à l’égard de Pie IX. Il apparaît comme grand serviteur de Dieu.
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