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Préparation pour la veille

I. Lecture du saint Evangile (S. Matth. chap. XXV, 24-30).

24. Accedens autem et qui unum talentum acceperat, ait: Domine, scio quia ho­mo durus es, metis ubi non seminasti, et congregas ubi non sparsisti.

25. Et timens abit, et abscondi talentum tuum in terra: ecce habes quod tuum est. 26. Respondens autem Dominus ejus dixit ei: serve male et piger, sciebas quia meto ubi non semino, et congrego ubi non sparsi:

27. Oportuit ergo te commeettere pecuniam tuam nummulariis, et veniens ergo re­cepissem utique quod meum est cum usura.

28. Tollite itaque ab eo talentum et date ei qui habet decem talenta.

29. Omni enim habenti dabitur et abundabit: ei autem qui non habet, et quod vi­detur habere auferetur ab eo.

30. Et inutilem servum ejicite in tenebras exteriores: illic erit fletus et stridor den­hum.

24. Celui qui avait reçu un talent, s'approchant, dit: Maître, je sais que vous êtes dur, vous moissonnez où vous n'avez pas semé, et vous re­cueillez où vous n'avez pas cultivé.

25. Vous craignant donc, je suis allé cacher votre talent en terre et je vous le rapporte.

26. Son maître lui répondit: Paresseux et mauvais serviteur, tu savais que je récolte où je n'ai pas semé, et que je recueille où je n'ai pas cul­tivé.

27. Il fallait donc confier ton argent aux banquiers, et en venant j'au­rais en effet reçu ce qui me revient avec l'intérêt.

28. Reprenez-lui donc le talent et donnez-le à celui qui en a dix.

29. On donnera en effet à celui qui a déjà et il abondera: mais à celui qui n'a rien, on ôtera encore ce qu'il paraît avoir;

30. Puis jetez ce serviteur inutile dans les ténèbres extérieures où rè­gnent les pleurs et les grincements de dents.

II. Sommaire - On abuse de la grâce en la rendant inutile par sa faute, tantôt par une résistance positive à la loi de Dieu; tantôt par l'inattention aux touches de la grâce, qui sont souvent d'une délicatesse extrême; tan­tôt par l'inconstance qui succède souvent à nos résolutions et à une ar­deur éphémère.

Abuser de la grâce, c'est mépriser le don et l'amour de Dieu. C'est blesser le Cœur de Jésus. C'est une profanation semblable à celle du corps eucharistique de Notre-Seigneur.

Cet abus mérite un châtiment. Il entraîne la perte de nombreux méri­tes. Il rend les grâces plus rares. Il conduit à l'insensibilité spirituelle. Il peut être puni de l'endurcissement et de la substitution des grâces. Redoutons de tomber dans une telle ingratitude.

Méditation

I. Lecture du saint Evangile.

II. Méditation.

Le fidèle. - Seigneur, je suis à vos pieds, confus de toutes vos bontés et de toutes mes ingratitudes passées. J'ai mille fois blessé votre cœur si bon et si sensible. Je voudrais secouer le poids de cette ingratitude et sor­tir de cette voie funeste. Eclairez-moi, aidez-moi.

Le Sauveur. - Mon fils, la fidélité parfaite à la grâce, c'est-à-dire aux inspirations et aux mouvements de l'Esprit de Dieu, a été tout le secret de ma sainteté. Cet Esprit divin s'est reposé en moi et a rempli mon âme de l'abondance de ses dons: Requiescet super eum spiritus Domini, (Is. XI, 2) c'est-à-dire que dans tous les détails de ma vie, j'étais mû, conduit, diri­gé par l'Esprit divin, qui était comme l'âme de mon âme, et qui, trou­vant en elle la plus parfaite docilité, y opérait en plénitude pour y pro­duire les œuvres de la plus éminente sainteté. La volonté de mon Père, dictée par l'Esprit-Saint, était la loi de mon Cœur: Scriptum est de me ut fa­cerem voluntatem tuam. Deus meus, volui, et legem tuam in medio cordis mei (Ps. 39).

Marie ma Mère est aussi pour vous un admirable modèle de fidélité à la grâce. Prévenue, dès l'instant de sa Conception immaculée, de l'abondance des dons surnaturels, enrichie et ornée de tous les trésors de la grâce, éclairée des plus vives lumières, et suavement portée à Dieu par un attrait puissant, que les penchants désordonnés de la concupiscence ne contrebalancèrent jamais, elle fut toujours docile à la voix de l'Esprit-Saint vivant en elle. C'était la bonne terre où la semence ne tombe pas inutilement, mais porte des fruits au centuple. Elle cherchait toujours en

son cœur très pur les fruits à tirer de mes mystères: Maria conservabat omnia verba haec in corde suo (Luc. II). Ne refusant rien à la grâce qui la sol­licitait, elle montait toujours, allant de vertu en vertu, de sacrifice en sa­crifice. C'est par là, plus encore que par les prérogatives dont elle fut comblée, qu'elle était agréable à mon Père et à moi. C'est ce que j'expri­mai quand une femme la proclamait bienheureuse à cause de sa mater­nité divine. je repris: «Plus heureux encore ceux qui écoutent la voix de Dieu et la suivent fidèlement» (Luc. XII). Pouvais-je mieux vous faire entendre que la principale gloire de ma Mère n'était pas de m'avoir en­gendré, mais de n'avoir jamais abusé de la grâce.

Tous les saints aussi ne se sont sanctifiés que par la docilité à la grâce. C'est ce qu'exprimait saint Paul: Gratta Dei sum id quod sum, et gratta in me vacua non fuit (I Cor. XV, 10).

Ceux-là abusent de la grâce, qui rendent inutile par leur faute ce don précieux, en négligeant ou en refusant de lui faire produire des fruits de sainteté.

Plusieurs abusent de la grâce par une résistance positive. Ils savent ce que l'Ésprit-Saint demande d'eux et ils le lui refusent. je frappe à la por­te de leur âme, pour en prendre possession, et ils s'obstinent à tenir cette porte fermée. Ces âmes se raidissent en quelque sorte pour s'enfermer dans leur liberté et leur vie déréglée comme dans une forteresse inexpu­gnable. Elles sont semblables à des chemins battus sur lesquels la semen­ce tombe en vain sans pouvoir y pénétrer.

Un abus de la grâce moins coupable, mais beaucoup plus fréquent est celui qui résulte de l'inattention. Comment correspondre à une grâce dont on ne remarque même pas la présence? L'attention est d'autant plus né­cessaire que les touches de la grâce sont souvent d'une délicatesse extrê­me. C'est comme un léger souffle, un mouvement au plus intime de l'âme. Ceux-là seuls peuvent les discerner qui ont la précieuse habitude de vivre en eux-mêmes et d'observer ce qui s'y passe. Aussi un grand nombre restent sourds et insensibles aux appels réitérés de la grâce.

Un troisième abus de la grâce, c'est l'inconstance. L'âme inconstante entend la voix de Dieu et met la main à l'œuvre, mais elle ne persévère pas. Après une oraison bien faite, une action de grâces fervente, sous l'influence d'une retraite, d'une ordination, d'une prédication, elle prend de généreuses résolutions, qu'elle commence à mettre en prati­que, mais ce n'est qu'une ardeur éphémère. La volonté s'affaisse bientôt sur elle-même. Après quelques semaines, quelques jours peut-être, tout a disparu. La tiédeur a repris le dessus et la grâce est devenue inutile.

Quel désordre douloureux il y a dans ces abus des grâces! Si la grâce est un don de votre Dieu, ne faudrait-il pas la recevoir avec respect? Pouvez-vous en abuser sans faire injure à votre Dieu, sans vous rendre coupable envers lui d'une sorte de mépris?

N'est-ce pas pour vous mériter cette grâce que je suis venu sur la ter­re, que j'ai souffert et que je suis mort? Elle est le fruit de la Redemp­tion, le prix de mon sang et le don de mon Cœur. L'abus de la grâce est donc une sorte de sacrilège et de profanation. C'est le mépris de mon amour.

Les saints l'ont reconnu. Saint Augustin compare celui qui écoute sans attention et sans respect la parole de Dieu (et on peut en dire autant de toute grâce) à un homme qui par sa négligence laisserait tomber à ter­re le corps de son Sauveur: Non minus reus erit qui corpus Christi in terram ca­dere sua negligentia permiserit. Saint Paul exprime la même pensée: «Ceux qui violaient la loi de Moïse étaient condamnés à mort sans pitié. Quels châtiments ne méritent donc pas ceux qui auront foulé aux pieds le Fils de Dieu, profané le sang de l'alliance et méprisé l'esprit de la grâce!» (Hebr. X, 28). Pensez enfin combien l'ingratitude m'est douloureuse à moi qui désire tant vos cœurs et qui fais tout pour les conquérir.

Ne m'a-t-on pas vu pleurer sur Jérusalem, sur Capharnaüm, Bethsaïda et Corozaïm, à cause de leurs résistances aux grâces qui leur étaient offer­tes. «Si tu comprenais ma générosité», disais-je à Jérusalem. Si cognovisses quae ad pacem tibi (Luc. XII). A Corozaïm, je disais: «J'ai cependant opéré chez toi des merveilles qui auraient converti Tyr et Sidon» (Matth. XI). Et à Capharnaüm: «Je t'ai cependant élevée jusqu'au ciel en te choisissant pour mon séjour» (Luc. X). Aussi mon Père est obligé de châtier sévère­ment cette ingratitude. Non seulement l'âme infidèle demeure pauvre au milieu des dons divins qui lui sont offerts, mais elle est punie par l' insensi­bilité spirituelle. Elle s'endurcit. Rien ne peut plus ni l'émouvoir ni l'atten­drir. A force de fermer l'oreille à la voix de l'Esprit-Saint, on finit par ne plus l'entendre. La délicatesse de l'âme s'émousse par ses résistances. Il faudrait un miracle de grâce pour sauver une telle âme.

Un châtiment plus terrible encore est la soustraction des grâces. Après avoir frappé longtemps à la porte d'un cœur pour en obtenir l'entrée, je me retire. Je mets fin à des sollicitations inutiles. Vous lisez dans Jéré­mie l'abandon de Babylone: Curavimus Babylonem et non est sanata, derelin­quamus eam (Jer. 51, 9). Dans la parabole des talents, j'ai indiqué que le serviteur paresseux serait dépouillé au profit du serviteur diligent. Rappelez-vous aussi les exemples terribles de Saül dont la famille a été privée du trône; de David privé de l'honneur d'élever le temple; de Salo­mon dont le royaume a été divisé; du misérable judas remplacé au collè­ge apostolique par saint Mathias; du peuple juif qui a perdu le titre de peuple de Dieu (Matth. XXI). Je menaçais l'évêque d'Ephèse de lui reti­rer toutes grâces: Movebo candelabrum tuum de loco suo (Apoc. 2).

Soyez donc fidèle pour ne pas blesser mon Cœur. Craignez d'irriter la justice de mon Père par votre ingratitude. Réparez les abus passés par le bon usage des grâces présentes.

AFFECTIONS ET RESOLUTIONS

Combien vous avez été généreux et magnifique envers moi, ô mon Sauveur! Que de grâces reçues, et souvent des grâces peu communes! vocation, lumières spéciales, avertissements!

Combien j'ai été ingrat envers votre Cœur si bon et indocile envers l'Esprit-Saint! Que de fois j'ai fermé l'oreille à votre voix! Vous avez frappé à la porte de mon cœur et j'ai refusé de vous ouvrir. J'en suis hu­milié et attristé. Pardonnez-moi. Je serai désormais attentif aux inspira­tions de l'Esprit-Saint. - Je m'examinerai sur ce sujet pour m'en humi­lier et me corriger.

BO«»UQUET SPIRITUEL

- Vocavi et renuistis… despexistis omne consilium meum et increpationes meas neglexistis (Prov. I, 24).

- Videns civitatem, flevit super illam (Luc. XII).

- In propria venit et sui eum mon receperunt (Joan, 1).

- Je vous ai appelé et vous n'avez pas répondu… Vous avez méprisé mes conseils et négligé mes reproches (Prov. 1, 24).

- Et regardant Jérusalem, il pleura (Luc. XII).

- Il est venu et les siens ne l'ont pas reçu (S. Jean, 1).

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